Imágenes de páginas
PDF
EPUB

chante, comme je l'ay dit dans le chapitre précedent, fans que la peau des paupières se trouve toûjours rompuë; parcequ'étant plus épaiffe, plus forte & moins voifines des os, elle résiste davantage à la violence du coup. Dans cette rencontre pour peu que cette dilacération foit grande, l'œil fe déjette dans la partie oppofée, & s'avance quelques-fois fi fort hors de l'orbite, l'on découvre les mufcles du côté de la dilacéra

que

tion,

enforte que l'on croiroit l'œil perdu : cependant il fe peut reünir & rétablir dans fa fituation ordinaire, fans même que la vüe foit interreffée, pourveu que d'ailleurs le globe n'ait point été preffé; parceque cette dilacération n'étant que dans une partie de la conjonctive, cette membrane reçoit affez de nourriture pour procurer fa reünion. Cequi eft feulement à craindre, c'eft que l'air qui pénétre dans l'orbite n'altére le globe & n'y excite de l'inflammation, qui feroit fuivie d'une fuppuration qui dans la fuite feroit caufe que le globe s'uniroit de ce côté là fi étroitement à l'orbite, qu'il demeureroit immobile.

Si au contraire l'œil a été preffé, comme lorsque la dilacération a été caufée par quelque inftrument contondant qui ne s'eft point arrêté fur le bord de l'orbite, & qu'il y ait quelque def-rangement dans les parties intérieures; ou même fi l'inftrument a feulement donné à côté du globe & l'a déjetté violemment dans la partie oppofée & en dehors, & que par ce moyen le nerf optique ait fouffert une violente extenfion, quoi que fouvent la conjonctive ne fe trouve point déchirée: dans ces deux cas la vue refte confiderablement dimi

nuée, ou tout-à-fait perdue; parceque les parties intérieures étant def-rangées, les rayons de lumière ne fe trouvent plus dirigez pour fe porter dans leur ordre naturel fur la rétine; & que par la violente extension du nerf optique, fes fibres moelleufes font ou rompücs ou confondües, cequi lui fait perdre fon fentiment.

Les mêmes remedes dont on fe fert pour les playes. de la cornée & de la conjonctive, fervent pour la dilacération de cette membrane: ce qu'on doit faire de particulier, c'est que fi-tôt que l'on voit l'œil fe déjetter hors de l'orbite, on doit l'y repouffer & l'y contenir par des petites compreffes épaifles qu'on applique fur les paupières, & par un bandage un peu ferré, & cela tant que l'on voie que l'œil foit reüni : obfervant de tenir auffi l'autre oil couvert & bandé comme je l'ay déja dit.

que

Quand enfuite de quelques coups moins violents les précédents, ou par quelque caufe intérieure, les vaiffeaux dé la conjonctive fe trouvent rompus & ouverts, le fang s'épanche entre fes pellicules & les rend rouges & enfuite livides. Quand l'épanchement est abondant, il occupe tout le blanc de l'œil & le tumefie: quand il eft en moindre quantité, il n'en occupe qu'une partie qui eft le plus fouvent l'inférieure ; & quelquesfois il eft en fi petite quantité, qu'il forme feulement une tache rouge dans les environs du vaiffeau d'où il a Les Grecs s’est échapé. Et de quelque manière que cet épanche la nomment ment fe faffe, & en quelque quantité que le fang fe HYPOS trouve épanché, on appelle en françois cette maladie, PHAGMA. Oeil poché. a

Les Arabes

TARFEN

324

Soit que cet épanchement vienne d'une cause intérieure, comme lorfque les vaiffeaux de la conjonctive font d'une texture fi foible qu'ils ne peuvent foûtenir l'effort d'un fang échauffé, rarefié & abondant fans se rompre, comme on le voit arriver affez fréquemment à quelques perfonnes, particulièrement enfuite de quelques mouvemens violens & dans les grandes chaleurs de l'été, ou qu'il foit excité par quelques caufes extérieures; on traite cette maladie de même que les playes contufes de cette partie, quoi quelle ne foit accompagnée d'aucune folution extérieure. Ainfi dans le commencement on faigne le malade, on coule dans l'œil Le fang de pigeon, ou le lait de femme, ou celui de vache meflé de faffran, & par deffus on applique les compreffes trempées dans le collyre Fait avec le blanc d'œuf & l'eau rose'; & quand on ne craint plus d'inflammation, on travaille à réfoudre le fang épanché, en coulant dans l'œil quelques goutes du collyre Fair avec quatre onces des eauës de fænouil de rue rendües muccilagineufes par une infufion de graine de fenugrec, dans lesquelles on diẞoût dix grains de camphre& autant de faffran, & fur tout l'œil on applique une compreffe trempée dans une Décoction d'hyßope, d'abfinthe de fleurs de camomille & de melilot.

Il arrive auffi qu'enfuite de quelques coups orbes moins violents que ceux énoncez au chapitre 8. le globe de l'œil fe trouve pareillement contus; qu'il y a du fang épanché, ou entre fes membranes propres, ou au dedans de l'œil, fans toutes-fois qu'on remarque de confusion ou def-rangement dans fes parties intérieures, ni de dilacération fenfible: cependant on doit

craindre en cette rencontre la perte, ou au moins, une notable diminution de la vie, fi le fang épanché au lieu de fe réfoûdre, fuppure; puifque tout pus épanché au dedans de l'œil, pour peu malin qu'il foit, quand il eft en quantité, peut détruire les parties intérieures & caufer leur confufion, ou au moins les altérer confiderablement. On previent autant qu'on le peut les fuites fâcheufes de cette contufion intérieure, en la traitant comme la précédente; fe conformant aussi a ce que j'ay dit au chapitre 8. & ailleurs.

Pour la foibleffe qui refte à l'œil apres la guérison des playes & contufions, on se conformera a ce que j'ay dit à l'occafion de celle qui reste apres l'opération de l'abbaiffement des cataractes, & pour cet effet on aura recours au chapitre 15. de la première partie, ou ci apres à la fin du chapitre 13.

Digreffion, fur les caufes générales & particuliéres des fluxions, inflammations autres maladies locales; fur le bon usage de la faignée dans les inflammations & autres maladies, ‹ contre l'opinion de quelques Modernes ; & fur l'action des remedes purgatifs pour corriger l'intemperie du fang.

C

CHAPITRE XII.

N n'auroit jamais fait, & il feroit même fort ennuyeux, fi en traitant de chaque maladie en particulier, au lieu d'en rechercher la caufe la plus prochaine, on vouloit toûjours remonter jufques à la pre-· miére fource; & fi en prescrivant les remedes généraux,

on étoit obligé de retoucher les fondements fur lefquels leur ufage eft établi Cependant comme l'explication. particulière de chaque maladie dépend autant des notions générales qu'on fe forme de leurs causes, commc des notions particuliéres ; & que les reigles particuliéres de pratique font fondées fur les générales; je me vois obligé, avant que de pourfuivre la defcription des maladies de l'œil, d'expliquer fuccinctement dans ce chapitre les causes générales & particulières des fluxions, inflammations & autres maladies locales, de dire quelque chofe fur le bon usage de la faignée contre l'opinion de quelques Modernes, & sur l'effet des remedes purgatifs pour corriger l'intemperie du fang; afin d'éclaircir quelques difficultées qu'on pourroit faire naître de l'explication des caufes des maladies dont j'ay parlé ci-devant, & de celles dont je traiteray ci-apres, & de confirmer quelques reigles de pratique que j'ay fuivies & que je fuivray dans la fuite de ce traité.

1. Des caufes générales particuliéres des fluxions,
inflammations, &c.

Si on confidere comment le fang, en fe fermentant, se perfectionne & fe rend propre à entretenir toutes les parties de nôtre corps, quand sa fermentation est naturelle & bien reiglée, & comment, au contraire, il s'éloigne de sa perfection & tend à la deftruction de ces mêmes parties, quand elle est non-naturelle & déreiglée; il fera aifé de concevoir l'origine non feule.ment, des inflammations, mais auffi de toutes les autres tumeurs & abcez, des ulceres, & de tous les fymp

« AnteriorContinuar »