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Il eft vray que les eauës diftillées de quelques plantes narcotiques, comme de Morelle, de Ciguë, de Pavot, même leurs fucs dépurez conviennent dans les inflammations & en appaisent souvent les douleurs: mais ce n'eft point en condenfant les humeurs & les parties fur lefquelles on les applique; au contraire, c'est en relâchant les fibres des parties membraneuses, ouvrant leurs pores, fondant les humeurs & les difposant à transpirer ou à reprendre leurs cours ordinaire. C'est aussi pour cette raifon qu'on fe fert de ces plantes dans les tumeurs fchirreufes que l'on veut ramollir pour les réfoûdre ou amener à fuppuration, & l'expérience fait connoître quelles n'y font pas inutiles. Et comme dans les inflammations il y auroit à apprehender qu'en relâchant trop, on ne caufât de la putréfaction dans la partie enflammée, c'eft la raison pourquoi on ne fe fert point des eauës diftillées de ces plantes, qu'on n'y mefle au moins un tiers de quelque eau fpiritueufe rafraichiffante & un peu aftringente, ou quelque autre remede à peu prés de semblable vertu, & qu'on cesse l'ufage de ces eauës fi-tôt que l'inflammation commence un peu à diminüer, ou qu'on remarque dans la partie quelque legere tumeur oedemateuse.

Il arrive quelques-fois que la chaleur eft fi grande particuliérement quand les paupières font enflammées, que les compreffes imbues des collyres que l'on applifur l'œil font incontinent feiches; cequi oblige de les renouveller fouvent. En ce cas pour ne point tant fatiguer le malade, on fe fert de quelqu'un des cataplasmes anodins & rafraichiffants fuivants.

que

On prend environ Une once & demie de maëlle de pomme douce cuite auprés du feu, une once de muccilages de fémences de coins tirez dans Peau rofe, un blanc d'œuf reduit en eau, deux ou trois cuillerées de bait de femme & dix ou douze grains de faffran en poudre, on mefle le tout enfemble en forme de cataplafme, que l'on étend fur un linge & que l'on applique tiede fur l'œil malade, dans lequel on a fait couler auparavant quelques goutes d'un des collyres fufdits.

Ou, on fait infuser De la mie de pain blanc & tendre, dans parties égales de lait de femme, d'eau rofe, ou autres eanës rafraichißantes, qu'on applique comme deffus fur l'œil malade.

Ou on prend Parties égales de moëlle de pommes cuites & de caße recemment mondée, qu'on mefle ensemble, y ajoûtant de l'eau de rofes & du lait de femme, autant quelles en peuvent abforber, pour en faire un cataplafme qu'on applique comme il a été dit.

On peut laiffer ces remedes fix ou fept heures fans les changer, à moins que la chaffie foit en fi grande quantité & fi acre qu'on apprehende que par fon trop long fejour elle n'ulcere l'oeil ou n'augmente au moins l'inflammation; alors on les leve plûtôt afin de nettoyer l'œil & le laver avec quelqu'un des collyres fufdits.

Quand la douleur & l'inflammation commencent à s'appaiser, qui est une marque que les humeurs ne fluent plus avec tant de violence fur l'œil, & que la maladie est prés de fon declin; on doit alors se servir de remedes qui digerent, attenuënt & refolvent les humeurs, & qui en même tems aient de l'aftriction, afin

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de rendre aux fibres leur vertu élastique, pour quelles puiffent en se refferrant, fe décharger plus aisément de l'humeur qui les abbreuve.

On fe fert pour cet effet en la maniére ci-deffus dite, du collyre fait Avec parties égales des eauës diftillées de rofes, d'eufraife de chelidoine, dans quatre onces defquelles on fait infufer une pincée de rofes rouges de la femence de fœnugrec autant qu'il en faut pour les rendre muccilagineufes, étant paffées par un linge, on y ajoûte Sept ou huit grains de fel de faturne, & cinq ou fix grains de camphre.

Si Ši les canaux lacrimaux font fi relâchez que les larmes fortent abondamment & fans douleur, au lieu Dé fel de faturne, on fait fondre dans le collyre fufdit pareille quantité De vitriol blanc.

Les cauës diftillées De petites marguerites, de brunelle, de bugle, de lierre terreftre d'autres plantes vulnénaires, feules ou meflées avec les fufdites pour en faire un collyre comme le précédent, font auffi un tres bon effet.

par

Si les membranes du blanc de l'œil ont été enflées & bourfoufflées la violence de la fluxion, & quelles ne fe réduifent pas dans leur état naturel par l'ufage de ces collyres, on y ajoûte Sept on huit grains d'alum pour les rendre plus ftipliques, ou on augmente la dofe Du vitriol blanc, cela s'entend pourveu que la douleur foit appaifée.

T

Ou on met Un blanc d'œuf, dans un plat d'étain, on lagite avec un morceau d'Alum, jufques à ce qu'il acquierre une confistance approchante de celle de l'onguent; on étend ce remede fur un linge, & apres en avoir introduit un peu dans Foil, on en couvre les

paupières l'ayant fait un peu chauffer auparavant, Ce remede par fon aftriction eft propre aufli à remettre les paupières relâchées par la violence de la fluxion, & à les desseicher auffi bien que les parties voifines de I œil qui ont été excoriées par l'acrimonie des larmes. Si on apprehende la trop grande astriction de ce remede, ou que le relâchement des paupières ne foit pas confiderable, on se fervira du cataplafme fait Avec la moëlle de coins cuits dans l'eau rofe & l'eau de plantain, dans deux onces de laquelle on mettra un gros de poudre de rofes ges & un demy fcrupule de fel de faturne, ayant foin en même tems de couler dans l'œil quelques goutes d'un des collyres fufdits.

Sur la fin de l'ophthalmie on ne travaille plus qu'à refoûdre l'humeur qui peut être reftée fur & aux environs de l'œil, & à le fortifier : pour cela on fe fert du collyre fait Avec les eaues diftillées de fænouil d'eufraife dans lesquelles on mefle un peu d'efprit de vin; ou de celui fait Avec les femences d'anis ou de fœnouil, infufées dans le vin & diftillées, en la maniére & comme je l'ay dit au chapitre

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de la première partie ou bien on fe fert Des eauës diftillées de rue, d'abfinthe, d'hypope, de méliẞe, ou autres de cette nature, feules ou meflées enfemble & animées Avec un peu d'efprit de vin. On peut auffi fe fervir de la décoction de ces mêmes plantes qui fait le même effet.

Il y a des ophthalmies inveterées & fi opiniatres quelles réfiftent à tous les remedes ordinaires; ou fi elles guérissent, elles récidivent peu de tems apres. Comme elles font pour l'ordinaire caufées par une fluxion habituelle d'humeurs féreuses & pituiteufes aigries

par

par le deffaut d'une bonne fermentation, comme il arrive fouvent chez les enfants & les vieillards, & dans ceux qui font fujets aux tumeurs fcrophuleufes & autres tumeurs froides; ou par des levains chancreux, fcorbutiques, véroliques, ou autres infignes intemperies du fang: on doit pour les guérir détruire auparavant, autant qu'on le peut, toutes ces caufes mauvaises, tent par les remedes généraux qui leurs conviennent, que par les remedes fpécifiques à ces fortes de maladies.

A l'égard des ophthalmies qui font fuivies de pustules, abcez, ulceres, ou autres maladies de l'œil, ou des ophthalmies qui font des symptomes de ces mêmes maladies, on aura recours pour les guérir aux chapitres ou je traite en particulier de ces maladies.

Tous les remèdes topiques que je viens de propofer, conviennent dans toutes les vrayes ophthalmies, puifque leurs differences ne demandent point d'indications oppofées: il eft feulement de la prudence du Chirurgien Oculifte de bien obferver leurs différents degrez & leurs divers états, pour y appliquer les remedes dans l'ordre & fuivant les reigles prefcrites. J'aurois pû en proposer un plus grand nombre, mais ceux là suffisent: châque Chirurgien peut fe fervir de ceux qui lui font familiers, pourveu que ce foit avec raison.

Je fçais que beaucoup de Praticiens fe fervent indif féremment & fans raifon dans les ophthalmies de plufieurs efpeces de collyres, dans lesquels ils font entrer La tuthie, le verdet, la pierre calaminaire, l'aloës, la farcocolle, l'encens, le maftich & autres, fuivants effectivement en cela les fentiments de quantité de nos Auteurs qui

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