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leur groffeur le plus fouvent n'excede pas celle d'un pois, & leur couleur eft ordinairement d'un rouge blanchâtre, à peu prés comme ces chairs fongueufes qui

naiffent dans les ulceres.

Les verruës pendantes, quoi qu'étroites par le bas, ont des vaiffeaux à leur bafe qui les abbreuvent & qui font si considérables, eû égard à leur peu de volume, que lorsqu'on les extirpe il en fort du sang assez abondamment. Quelques-fois elles tombent, fe diffipent & fe guériffent d'elles-mêmes, particuliérement celles qui viennent en la partie intérieure des paupières, qui renaissent auffi affez fouvent ; quelques-fois même les unes & les autres s'enflamment ou s'abfcedent en leur ` tête, ou s'ulcerent; & quelques-fois auffi apres être tombées, abfcedées, ou ulcerées, leur racine reftante se groffit infenfiblement & fe convertit en une tumeur fchirreufe ou chancreuse.

La premiére efpece, quand on la tranche, ne laisse aucune racine & par conféquent ne revient point; & la feconde efpece, à caufe d'une petite racine ronde & quelques-fois filamenteufe, qui refte enfoncée dans la chair, eft fujette à germer de nouveau, à moins qu'on ne confomme cette petite racine..

Les verruës à base large rarement guériffent, fi on ne les panse, & même fouvent on ne les peut diffiper: & quand leur base eft fort large, on ne les peut couper fans qu'il y reste un grand ulcere, dont les fuites feroient fâcheuses; c'est pourquoi on ne coupe que celles dont la bafe n'a pas plus d'étenduë que leur corps. Celles qui font malignes & chancreufes ne guériffent:

point par les remedes, & il eft tres rare quelles guérifTent par l'opération quand leurs racines font groffes & dures, & quelles rampent en plufieurs endroits de la paupière, à moins qu'on n'emporte la piéce qui les contient, encore cela eft-t'il fort suspect.

On diffipe ou emporte les verruës des paupières par les remedes ou par l'opération. Les remedes ne conviennent qu'aux verrues de leur fuperficie extérieure, l'œil ne pouvant fouffrir de tels remedes, fi on vouloit s'en fervir pour les verruës intérieures. Et l'opération convient également aux extérieures & aux intérieures.

Les remedes diffipent & emportent les verruës en deffeichant & abforbant l'humeur qui les nourrit, cequi fait quelles s'atrophient enfuite & s'évanouiffent. Ét de ces remedes les uns agiffent fi lentement qu'à peine s'apperçoit-t'on de leurs effets, d'où vient qu'on dit qu'ils agiffent par une propriété occulte, comme le fuc laiteux de pissenlit, le fuc de cichorée verrucaire, de geranium robertianum, de pourpier, de mille feuille &c. & les autres agiffent plus puiffamment, comme le fuc de racines de grande chelidoine, la poudre de fabine &c. On doit préférer ces derniers aux autres ; & pour s'en fervir pour les paupières, on doit incorporer la poudre de fabine avec un peu de miel, pour en oindre les verruës trois ou quatre fois par jour; ou les oindre de même du fuc de chélidoine, jufques à ce quelles dîfparoiffent. Mais on les détruit plus promptement par les remedes cauftics, comme en les touchant legerement avec l'eau forte, l'efprit de vitriol, l'eau de fublimé, décrite au chapitre 10. que l'on rend plus forte, s'il en eft befoin, où celle-ci.

Prenez du verdet, de l'alum & du fel commun une drachme de chacun, du vitriol romain & du fublimé corrofif, de chacun une demie drachme, pilez ces chofes & les faites bouillir dans quatre onces d'eau de pluie ou d'eau de plantain, filtrez la liqueur & la confervez dans une phiole pour vous en fervir comme deffus, Prenant garde qu'il n'entre d'aucuns de ces remedes dans l'œil.

L'opération qui eft le plus fûr moien & le plus prompt pour emporter les verruës confidérables des paupières, foit extérieures ou intérieures, fe fait en deux maniéres, ou en les liant, ou en les coupant. La ligature convient aux deux efpeces de verruës pendantes quand elles font en dehors des paupières, ou à leurs extrémités: on les lie d'un noeud de Chirurgien, le plus prés de la peau qu'on peut, avec un fil de foye ou de lin; ce noeud fe fait en paffant deux fois l'extrémité du fil par l'anneau qu'on forme dabord, & par ce moien on le ferre quand on veut de jour à autre jufques à ce que la verruë foit tombée. S'il refte quelque petite racine, on la confomme en la touchant avec quelque une des. eaues cauftiques fufdites, pour empêcher quelle ne repullule; enfuite on deffeiche l'ulcere reftant ou avec l'onguent de tuthie, ou quelque collyre deficcatif.

La ligature ne fe pratique point pour les intérieures, parceque le fil feroit un corps étranger qui incommoderoit trop l'œil: ainfi on les coupe. Et pour ce faire on prend avec le poûce & le doigt indice de la main gauche le bord de la paupière, on la renverse, & avec des cifeaux qu'on tient de l'autre main on coupe les verruës tout prés de la peau, foit quelles foient à base

large ou ou à base étroite; on laisse ensuite abbaiser la paupiére & le fang s'arrête prefque toûjours de lui-même: s'il tardoit à s'atrêter, on feroit couler dans l'œil quelques goutes d'un collyre fait avec quinZe grains de vitriol blanc & un fcrupule de bol de levant lavé, diffouts dans deux onces d'eau de plantain, renduë fort muccilagineuse par l'infufion de la gomme Arabique ou tragacanth. On deffeiche enfin l'ulcere avec un collyre deficcatif.

On coupe auffi les verruës extérieures des paupières & celles qui pendent à leurs bords de la même maniére que les intérieures : & pour le faire fûrement, on étend avec deux doigts la paupière & on les tranche avec la pointe des cifeaux; & fi le fang ne s'arrête, on fe fert d'une poudre faite avec une partie de vitriol romain calciné, deux parties de gomme arabique trois parties de bol de levant, dont on met un peu fur un plumaceau qu'on applique fur la playe & qu l'on conuict avec les doigts jufques à ce que le fang foit arrêté. On applique enfuite deffus un petit emplâtre de diapalme, une compreffe & le bandage ordinaire; finiffant la cure comme je l'ay dit ci-devant.

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9. Du Cancer des Paupières.

CHAPITRE X.V.

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Es paupières font auffi quelques-fois travaillées de cancer de même que les autres parties de la face. La dureté de la tumeur, fon inégalité, fa couleur livide ou plombée, la groffeur & la dureté des vaiffeaux qui rampent en fa bafe, la douleur quelle cause,,

& l'irritation qu'on y remarque enfuite de l'application des remedes ordinaires aux autres tumcurs, font affez connoître cette maladie.

Il commance ordinairement par une petite tumeur dure & douloureufe de la groffeur d'un grain de bled & qui augmente infenfiblement; & quelques-fois auffi par quelqu'une de ces petites tumeurs qui fe font par congestion & dont j'ay parlé ci-devant; ou par une verruë naiffante, quand ces maladies dégénèrent de leur nature à l'occafion de quelque acide malin qui s'y mefle dans la fuite.

Fort fouvent le cancer des paupières ne s'ulcere point, demeurant dans un état fixe fans augmenter. Il croît auffi quelques-fois démesurément ou s'ulcere. Et de quelque maniére qu'il foit, il s'irrite lorsqu'on veut tenter de le guérir ou par les remedes ou par l'opération, à moins qu'il ne foit encore que naissant.

Ainfi quand il eft dans cet état fixe & fans ulcération, on ne doit point entreprendre de le guérir par les remedes qui amolliffent, fuppurent ou réfolvent les autres tumeurs, dans la crainte de reveiller fon levain malin, cequi le feroit manifeftement augmenter & ulcerer au lieu que le laiffant en repos, il peut demeurer fort long-tems en cet état fans que de lui même il s'échauffe ou s'ulcere, comme l'expérience le fait connoître. L'opération y eft auffi fi fufpecte quelle eft rejettée unaniment par les meilleurs Praticiens, non feulement pour les cancers des paupières, mais auffi pour tous les cancers de la face, qu'ils ont à ce fujet appellez, noli me tangere, & cela à caufe des mauvaises iffuës

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