SCENE X X I. Quatre ENFANS amenez par une Nourrice, AGNE'S, LE BAILLI, UN ARCHER. AGNE'S. V Enez, famille défolée; Venez pauvres enfans, qu'on veut rendre Or phelins, Venez faire parler vos foupirs enfantins. " Et d'où diable a-t-on fait fortir ces Marmots-là? Ai-je dans ma maison des chambres inconnuës? Oh! pour le coup il faut qu'ils foient tombez des nuës; Ont-ils pû parvenir à l'âge où les voilà, AGNE'S. N'y voïez point mes traits, n'y voyez que les vô tres, Ils ignorent leur pere, ainfi que beaucoup d'au tres: Ces gages précieux, que j'ofe vous offrir, Pour prouver un himen, petite impertinente, Vous montrez des Enfans, la preuve en est plaifante. 'AGNE's lui montrant fon Contrat de Mariage. Vous me faites rougir, & c'eft trop m'infulter, En voïant ce contrat en pourrez-vous douter? LE BAILLI après l'avoir examiné. Ah! je ne dis plus rien; & cet acte authentique Impofera du moins filence à la critique. En regardant les Enfans. Qu'ils font jolis! gentils! j'en fuis tout réjoui, Ils reffemblent au perc, on diroit que c'est lui. Il les embraffe. 'A toute ma tendresse enfin, je m'abandonne. à l'Archer. Faites venir mon fils, allez, je lui pardonne. C'en eft fait vous; Aimez plus que jamais, Agnés, ce cher époux; Ma femme grondera, fera bien la mauvaise, Mais je m'en moque. AGNE'S. Hélas! que vous me comblez d'aise! Mais d'où vient tout à coup la douleur que je fens? Le cœur me bat, je tremble.... Eloignez mes Enfans. LE BAILLI. Quels tranfports imprévûs! quelle mouche vous pique? Chere Agnés, qu'avez-vous? AGNE's en criant. Seigneur, j'ai la colique. Ah! je me doute bien d'où peut venir cela, Ma carogne de femme a joué ce trait-là; Quel tems a-t'elle pris pour un coup de la forte? Ma foi fi j'en fçai rien, que le diable m'emporte Et de m'en informer je prens peu de fouci, Non plus, que de chercher remede à tout ceci. XXII, PIERROT fans voir Agnés, LE PIERROT, Souffre Ouffrez qu'à vos genoux, mon pere, je dé SCENE ploïe, Tout ce qu'en ce moment, mon cœur reffent de joïe. Vous me rendez Agnés. LE BAILLI,' Ah! mon pauvre garçon ! Je vous la rends ici d'une êtrange façon ; hôte; Votre Agnés va mourir... mais ce n'est pas ma faute. PIERROT. Ah! voilà de ces coups, Ce fer m'eft donc rendu pour m'arracher la vie, LE BAILLI lui retenant la main. PIERROT. Pourquoi me fecourir Laiffez-vous voir, mon pere, en me laiffant mon rir... LE BAILLI. Quel galimatias! morbleu, quelle chimere ! Laiffant mourir un fils, fe montre-t-on son pere? Je veux que vous viviez. PIERROT. Et fi je ne meurs pas, Que deviendra Conftance avec tous fes appas? Faudra-t'il l'époufer, s'en retournera-t'elle? Vous m'irez là-deflus chercher encor querelle. AGNE'S. Adieu mon cher époux, c'en est fait, je me meurs, Venez à mes genoux étaler vos douleurs. PIERROT. Chere Agnés, vous mourez: ô rigueur inhumaine! ARLEQUI N. Tirons tous nos mouchoirs, voici la belle Scene. |