Imágenes de páginas
PDF
EPUB

PASQUIN à part.

C'eft quelque chofe de moins. Monfieur, vous m'avez commandé de me rendre ici...

ERASTE.

Je croyois avoir besoin de toi; mais va m'attendre au logis.

PASQUI N.

Vous n'êtes pas content, Monfieur; vous aurois-je porté malheur le premier jour que je rentre à votre service ?

ERAST E.

Non, Pafquin, non; mais va m'attendre, te dis-je; je fuis bien aife que perfonne ne te connoiffe encore ceans: cela pourra peut-être me fervir dans la fuite.

PA QUIN.

Je m'apperçois, Monfieur, que vous n'avez pas oublié mes petits talens ; & je dois vous dire que depuis que je n'ai eu l'honneur de vous voir, je me fuis perfectionné auprès d'un fameux Operateur. ERASTE.

C'eft affez, Pafquin. J'attens ici cette Marton dont tu m'as ouï parler, qui fert Mariane. Je veux m'informer d'elle... mais la voici. Va-t-en, & ne dis ceans à perfonne que tu fois à moi.

PASQUÍN s'en allant.

Je comprens à peu-près que Pafquin ne fera pas aujourd'hui fans occupation,

SCENE I I.

ERASTE, MARTO N.

ERAST E.

HE' bien, Marton, tu l'as ouï toi-même.

Que dis-tu du pere de ta maîtreffe, & de la maniere dont il me traite ?

MARTON.

Moi, Monfieur? je dis qu'il faut prendre pa

tience.

ERASTE.

Mais n'y a-t-il pas là de quoi enrager?

[blocks in formation]

Non, Monfieur. Vous êtes jeune, amoureux, & homme d'épée, je ne m'étonne pas fi vous êtes

[blocks in formation]

Oui, vous l'êtes. Monfieur le Baron ne vous at-il pas promis que vous épouferez fa fille quand il fe portera bien?

ERAST E

Eh! ne vois-tu pas qu'il me dit la même chose

depuis trois mois, & que je pars dans huit jours pour ma garnison ?

MARTO N.

Et bien avant ce temps-là, il fe portera bien, peut-être.

ERAST E.

Peut-être! Oh! je ne puis plus attendre, & il faut absolument qu'avant mon départ je le faffe guérir. Dis-moi, qui font fes Medecins?

MARTO N.

Ses Medecins, Monfieur? il n'en a point.

ERASTE.

Comment ? un homme de fa qualité, malade dans Paris, fans Medecins ?

MARTON.

On voit bien, Monfieur, que vous avez toujours demeuré en Flandres, ou en Allemagne, & que vous ne connoiffez plus Paris. Ici, Monfieur, on ne fe fert plus de Medecins.

ERAST E.

On ne s'en fert plus ?

MARTON.

Eh! non, Monfieur, la Medecine eft au billon.

ERAST E.

Et de qui donc se sert-on ?

MARTO N.

On fe fert des Empiriques.

ERASTE.

Des Empiriques! quels animaux font-ce là ?

MARTON.

Ce font des animaux qui ne font ni Medecins, ni Chirurgiens, ni Apoticaires.

ERASTE.

Il n'y a pourtant que les gens de ces profeffionslà en qui l'on doive fe confier quand on eft ma

lade.

MARTON.

Aujourd'hui, Monfieur, c'est tout le contraire. les gens les plus éloignés de ces profeffions-là font ceux en qui on a le plus de confiance,

ERASTE

J'ai de la peine à croire...

MARTO N.

Oh! Monfieur, cela eft fi vrai, qu'à l'heure que je vous parle, on ne voit dans Paris que gens à fecrets, Souffleurs, Chimiftes, Charlatans de toutes nations, de toutes espéces : les coins des rues font accablés de leurs affiches; chaque matin on y voit éclore quelque nouveau guériffeur: & le pere de ma maîtreffe eft entre les mains de ces Meffieurs-là, qui font durer fa maladie, & retardent votre ma riage,

ERASTE,
Mais, enfin, quel mal a-t-il ?

MARTON.

[blocks in formation]

MARTO N.

Vous voyez qu'il n'eft point d'homme dans Paris plus haut en couleur, & plus rouge de vifage que lui.

ERASTE.

Cela eft vrai. Hé bien?

MARTON.

Il a la jauniffe, Monfieur, à ce qu'il dit,
ERAST E.

La jauniffe? cela ne peut être,

MARTO N.

Oh! Monfieur, depuis une maladie qu'il eut, caufée, dit-on, par un excès de bile, qui venoit de trop manger, il veut avoir la jaunisse en dépit de tout le monde.

ERAST E.

C'est une foibleffe dont il eft aifé de le guérir.

MARTO N.

Oui, fi c'étoit un homme fait comme les autres; mais jugez du perfonnage. A présent il ne veut prefque ni manger, ni boire, & c'eft ce qui entretient fa mélancolie.

ERASTE,

Je ne m'étonne pas fi l'on me cachoit fon mal,

[ocr errors][merged small]

Oh! bien, je vois qu'il ne faut que jouer d'adreffe pour le guérir, & je m'avife d'un expédient. J'ai pris ce matin un valet qui m'avoit fervi autre

« AnteriorContinuar »