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qui cependant ne diminuë rien du génie qu'il faut avoir pour réüffir dans ce genre d'Ouvrage.

Perfonne, je crois, ne fera le reproche à Moliere d'avoir emprunté de Plaute le fujet d'Amphitrion, celui du Feftin de Pierre de Calderon, & d'avoir pris dans les anciennes Farces Italiennes une partie de fes Sujets & de fes Scenes comiques; dès que l'on conviendra qu'il eft devenu original dans la façon dont il a traité ce qu'il a emprunté d'autrui, on ne pourra lui refuser la juftice & les loüanges qu'il mérite. Qu'importe, après-tout, que ce qu'on nous préfente fur le Théatre foit original ou non, pourvû qu'il en ait le caractere; & ne vaudroit-il pas mieux reprendre de bons Sujets oubliés depuis un ou deux fiécles, que d'en imaginer de nouveaux, en courant le rifque de la réüffite? Il eft vrai, que ces anciens Sujets ne demandent ni faillies d'efprit, ni bons mots, ni équivoques; mais y auroit-il grand mal de ramener fur le Théatre la franchise & le naturel de Guillaume, de Chrifaldes, & le beau fimple d'Harpagon, d'Arnolphe & de Sga narelle ? On objectera peut-être que le fond de ces anciennes piéces n'eft pas noble, & fouvent même dans le bas; mais il eft aifé de répondre à cela, que fi ce même fond produit des fituations vrayes, naturelles, & comiques, il n'eft pas difficile de l'anoblir; & de le rendre convenable aux mœurs du tems où l'on écrit. D'ailleurs, une action Théatrale ne doit-elle fe paffer qu'entre des petits Maitres, des Financiers, ou des coquettes du grand monde ; & ne peut-on, à l'exemple de Moliere, mettre fur la Scene les Bourgeois, & les gens du tiers Etat? Ils ont leurs ridicules auffi bien que les Marquis & les femmes du bel air; mais avec cette différence, que les ridicules des Bourgeois font vrays, & dans la nature; & que ceux des petits

Maîtres ne font, en quelque façon, que des contorfions ou des affetteries. Le fuccès qu'a eu le Patelin moderne, & le plaifir qu'il fait encore aujourd'hui dans fes repréfentations, eft une preuve que l'action bourgeoife feroit fufceptible fur le Théatre, d'autant, ou peut-être de plus de comique que l'action noble; fi depuis trente ans les mœurs n'avoient pas changé, & fi le Bourgeois, qui rougit aujourd'hui de l'être, n'avoit adopté les façons de penfer & d'agir des gens de qualité, & n'avoit mis le naturel & la fimplicité des mœurs de nos peres, au rang de leuts pourpoints & de leurs ringraves.

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QURUDURUWukunukukunUKUDURUDUQUYS

NOMS DES ACTEURS du Prologue de la Comédie de Patelin.

THALIE.

MERCURE.

APOLLO N.

VULCAIN.

MINOS.

PLUTON.

PREMIERE GRACE.

DEUXIE'ME GRACE.

TROISIE'ME GRACE.

CHOEUR DES DIEUX,

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PATELIN.

Le Théatre repréfente l'Olimpe; Mercure, le Meffager de Jupiter, affemble tous

les Dieux.

MERCURE..

DIVINITE'S de la Terre & des Cieux,

Que de toutes parts on s'avance? Accourez tous : le Souverain des Dieux Nous honore de fa présence;

Hâtez-vous, hâtez-vous de paroître à fes yeux ?

CHOEUR DES DIEUX.

Hâtons-nous, hâtons-nous de paroître à fes yeux.

UN DES DIEUX.

Dans ce jour de réjoüiffance,

De fon augufte préfence,

Il daigne honorer ces lieux,

Que l'on chante, que l'on danse?

CHOE UR DES DIEUX.

Que l'on chante, que l'on danse;

Hâtons-nous, hâtons-nous de paroître à fes yeux.
UN DES DIE U X.

C'eft ici, qu'éloigné des travaux glorieux,
Qui laffent quelquefois la suprême Puissance,
Il fe plaît à goûter le charme précieux,
Des tranquilles plaifirs que donne l'Innocence.
CHOEUR DES DIEUX.

Que l'on chante, que l'on danfe;

Hâtons-nous, hâtons-nous de paroître à fes yeux.

Ici les Dieux & les Déesses témoignent par leurs danses la joye de paroître aux yeux de Jupiter.

MERCURE. (Recit de chant. J
Laiffons aux Filles de Memoire,
Le foin d'éternifer fa gloire;

Et puisqu'il nous paroît daigner y confentir;
Avec le fecours de Thalie,

Par quelque heureuse saillie,
Tâchons de le divertir.

THALIE. (Recit fans chanter.)
Lorfqu'il prenoit plaifir à mes jeux innocens,
La Scene pour lui plaire enfantoit des miracles,
Depuis que de fa vûë il prive mes Spectacles,
Ils font devenus languiffants :

Pour lui j'avois pris foin de former un Moliere; Mais il n'eft plus, c'eft vous en dire affez. Tâchons donc de trouver dans les fiécles paffés, Pour les jeux d'aujourd'hui quelque heureufe matiere,

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