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tempêtes les plus terribles & les orages les plus furieux. Un bon Juge eft comme un rocher au milieu de la mer, battu des flots de . tous côtez fans en être ébranlé le moins du monde, je veux dire exposé aux atteintes de fes paffions & de celles d'autrui; mais parmi tous ces mouvemens il demeure inebranlable, & imite en cela ce que Dieu dit de lui même par un de fes Prophetes: Ego Deus, & non mutor. Quelques Philofophes mettoient l'independance de Dieu à ne fe point mêler des affaires du monde, s'imaginant que le foin qu'il en prendroit troubleroit fon repos & fa tranquilité, & qu'il étoit de la Majefté divine de ne vivre que pour foi. Les jeunes gens qui entrent dans la Robe fe forment une idée affez femblable de la judicature. Leur amour propre qui leur a fait entendre, comme l'Ange feducteur au premier homme, que par-là ils deviendroient des Dieux, leur perfuade qu'ils ne font fur les fleurs de lys que pour être adorez des autres, fans fe mettre en peine d'en meriter les adorations. Mais comme même la plupart des Payens n'ont pû reconnoître un Dieu oifif, & qu'ils ont crû avec raifon que l'Etre Souverain qui avoit tou£ créé, prenoit auffi foin de tout; les Magiftrats qui portent empraint fur le front le caractere de fa Divinité, doivent par leurs travaux & par leur affiduité à remplir leur devoir, fe rendre dignes d'un fi grand honneur. Les fecrets de la Providence divine font infcrutables ; il faut auffi que les fecrets de la Compaguie foient inviolables. Tout le monde fçait-il l'Hiftoire du jeune Papyrius Il fut mené par fon Pere au Senat; mais il eut la dence d'en cacher à fa mere les déliberations, & donna par-là un heureux préfage de ce qu'il feroit un jour : tant il eft vrai que le fecret eft la principale qualité d'un Senateur,& que fans cela un homme eft incapable d'entrer dans le Sanctuaire de la Justice. Enfin de tous les attributs de Dieu, il n'y a que la mifericorde qui ne convienne pas à un Juge. On peint la justice avec un bandeau fur les yeux, afin qu'elle ne foit point émuë par les larmes qu'elle verroit repandre, des balances à la main gauche pour pefer avec rigueur le droit des parties, & à fa main droite une épée pour punir fans pitié les criminels; car il n'appartient qu'à Dieu & au Souverain, qui en eft la plus vive image fur la terre, de faire des graces, & il n'eft pas moins deffendu d'abfoudre les coupables que de punir les innocens. Mais avant que de rendre la justice aux autres, il faudroit fe la faire à foy même, regler fa conduite comme on prétend regler celle d'autruy, & qu'on obfervât les Loix qu'on veut faire observer aux autres. Belles paroles d'un

pru

Empereur, dignum eft Majeftate regentis, legibus fubmittere prin. cipatum. Nous avons vû de fameux exemples fous le regne de notre invincible Monarque dans une affaire qui lui affuroit plufieurs millions. Au milieu des Magiftrats qu'il a choifis les plus fages du Royaume, il fe trouve prefque feul de fon fentiment; je dirois contre fes interêts, fi la juftice n'étoit le plus grand interêt des Rois. L'avis de la plupart des Juges, tant de raifons du bien public, tant de prétextes d'equité paroiffent devoir juftifier la poffeffion d'un bien fi avantageux; mais il eft l'Avocat de fes fujets, il examine avec fcrupule tout ce qui peut faire contre lui, il ne trouve pas fon droit affez fortement appuïé. Il y en auroit eu assez pour un Monarque qui auroit affecté même la reputation de juste ş mais il n'y en a pas affez pour LOUIS LE GRAND. Ce Prince par la paix qu'il vient de donner à fes ennemis, fait paroître fa moderation d'une maniere bien plus brillante. Il étoit infiniment fuperieur. Pour le bien de la Paix il abandonne le fruit de fes victoires, il se desarme, il fe borne lui-même. Peut on rien de plus glorieux ? Toute la terre a tremblé, & fuivant l'Ecriture, toute la terre, a gardé le filence à la vûë d'un grand Prince. Ne pour, roit-on pas dire avec juftice la même chofe du Roy? Ne pourroit on pas emploïer en fa faveur le même langage? Tous les peuples étoient attentifs au bruit de fes conquêtes qui allarmoient toutes les puiffances; leur attention a redoublé au nom de la Paix, qui n'eft dûë qu'à sa moderation. L'Europe qui en reffent les effets retentit de fes loüanges. Ne mêlons pas parmi les acclamations publiques, une voix foible & languiflante; contentons - nous qu'un filence refpectueux cache notre joïe & notre admiration. Avocats, plus votre profeffion eft excellente, plus vous devez la foûtenir avec honneur, envisagez toûjours la gloire, & qu'une conduite fage & reglée falle connoître que vos devoirs vous font toûjours prefens.

Procureurs, fi vous êtes fenfibles à vos veritables interêts, retranchez vos procedures. Observez avec exactitude les Ordonnan ces & les Reglements ; & par-là vous meriterez la confiance de vos parties, l'eftime du Public, & nôtre protection.

Huiffiers, il vous faut plus que des remontrances, les dereglemens aufquels vous n'êtes que trop fujets, nous font croire qu'elles feroient inutiles. Nous voulons feulement vous avertir que nous fçaurons diftinguer la probité des uns, & punir feverement la malverfation des autres,

REMERCIMENS

REMERCIMENT FAIT PAR FEU MONSIEUR le premier President de Harlay à Monfieur l'Evêque d'Amiens, fur la Meffe que ce Prélat celebra en 1697. à la rentrée du Parlement.

MONSIEUR.

La Cour rentrant dans fes fonctions ordinaires, & êtant obligée de demander à Dieu les forces & les lumieres qui lui font fi neceffaires pour les remplir dignement, a fait choix d'un Prélat auffi diftingué par fa naiffance que par fes vertus, pour les obtenir du Ciel. Dans un âge peu avancé, le Roi vous a nommé à l'Epifcopat, & pour monter fur la montagne fainte. Si ceux qui font revêtus de vôtre caractere, meritent d'être refpectez par leur vertu & par leur fcience ; on doit encore plus confiderer un Prélat élevé au dessus des autres par les rares talens qu'il a reçus de Dieu, & qui lui ont attiré l'eftime de Sa Majesté, qui renferme toutes les loüanges. Dans les années 1693. & 1694. qui ont été fi difficiles à paffer, vous avez, par vôtre fage conduite, & Par vô tre charité continuelle, répandu beaucoup de biens fur vôtre Diocefe. Vous avez prévenu les efperances de vos oüailles par vôtre zele, & vous leur avez montré l'exemple & leurs obligations. La Compagnie m'a chargé, MONSIEUR, de vous rendre en fon nom les actions de graces, de la peine que vous avez prife de quitter vôtre Diocese pour venir en ce jour demander à Dieu par le Sacrifice le plus faint, les lumieres dont elle a befoin. Ce n'est pas d'aujourd'hui que des perfonnes de vôtre nom ont pris place dans nôtre Compagnie. Vous avez même des proches qui en font les principaux membres, qui l'affiftent de leurs lumieres & de leurs confeils : elle vous fouhaite une fanté proportionnée à l'excés de vos travaux, & vous demande quelque part dans vos prieres. Elle vous affure par ma bouche qu'elle emploïcra toujours l'authorité qu'il plaît à Sa Majesté de lui confier, pour faire executer dans vôtre Diocese ce que vous jugerez neceffaire pour maintenir l'authorité du Roi, & rendre la justice à Les Sujets,

A

REPONSE DE MONSIEUR L'EVÊQUE d'Amiens au précedent Remerciment.

MESSIEURS,

Le veritable caractere du Magiftrat, c'est la fageffe. Le premier degré pour la poffeder, c'eft de connoître celui à qui on doit la demander ; & comme c'eft à Dieu, on doit auffi lui en confacrer les premices. Heureux, d'avoir été choifi pour une fr fainte entreprise ! Je ne puis faire affez de remercimens ; puisque j'entre dans le précieux heritage de mes Peres, non pas comme un étranger, mais comme reprefentant mes Prédeceffeurs, qui fe font toûjours fait une veritable gloire d'y rendre leurs services au Roi & à l'Etat. Les Evêques qui occupent tous les ans la place où j'ai l'honneur d'être aujourd'hui, ont toûjours reconnu avec tant de plaifir la protection que la Cour donne à l'Etat Ecclefiaftique, que je me trouve dans de plus fortes obligations, par rapport à l'honneur que j'ai de fortir du fang de fes membres, de concourir par mes prieres à lui marquer la reconnoiffance que j'en ai. Il ett inutile, MESSIEURS, de m'étendre fur les louanges & fur le merite de tous ceux qui compofent cette Auguste Compagnie. Le caractere du Chef répond à celui de tout le corps, & il réunit en fa perfonne tout le merite de fes Prédeceffeurs. Voulez-vous trouver un Philofophe: Cette élevation d'ame, fes profondes connoiffances & fa rare vertu le diftinguent entre tous les autres; l'étenduë de fon efprit, fon zele, fon application à rendre la justice, le font un Magiftrat accompli. Voulez-vous trouver un Orateur parfait ? Son Eloquence & fes riches expreffions font inimitables. Enfin voulezVous trouver un veritable Chrétien ? Rien n'eft comparable à fa pieté, à fa charité & à fon defintereffement. C'est fa fageffe qui l'éleve au-deffus des autres, & qui fait fon éloge par choix que le Roi a fait de fa perfonne. C'est par l'effet de ce même choix que le Roi, aprés s'être rendu formidable dans la guerre qu'il a foûtenue contre une ligue dont les vains efforts n'ont fervi qu'à faire. voir les forces fuperieures de ce grand Mo

le

marque, a employé l'un des proches de ce grand Chef
ner la Paix à l'Europe. On voit aujourd'hui l'Herefie bannie à
pour don
jamais de les Etats. Nos hiftoires ne fourniffent rien de fembla-
ble; & les fiecles à venir conviendront que l'ufage que le Roi
fait de les Victoires, est autant à admirer, que ces mêmes Vi-
Atoires; qu'il étoit feur d'en avoir la même récompenfe que celle
qui fut accordée à Aza, Roi de Juda. L'Ecriture marque qu'il
fit du bien en prefence de Dieu, & que Dieu lui donna la Paix,
& l'affûra d'en faire goûter les fruits & les avantages à fes
ples. Le Roi commence par décharger fes Sujets d'une partie
peu-
des impôts que la neceffité de la Guerre l'avoit obligé de leur
impofer, ne faifant confifter la gloire & tous les avantages de
cette longue Guerre, que dans leur foulagement ; feur que par
ce moyen & par les fages confeils de fes Miniftres qu'il avoit mis
à la tête de fa juftice, il feroit renaître l'abondance & la tran-
quilité parmi fes peuples.

1

DISCOURS PRONONCÉ EN L'HOTEL Deville de Beauvais le 2. Aoust 1702. par un Echevin qui fortoit de Charge.

MESSIEURS,

C'est une coûtume des plus anciennes que ceux qui ont été élevez aux honneurs par les fuffrages de leurs Concitoïens finiffent par un difcours qui exprime l'amour de la patrie. Cet amour est naturel à tous les hommes en quelques lieux qu'ils fe trouvent, l'esprit retrace toûjours une agréable idée du païs natal, & le cœur ne peut réfilter au penchant qui l'entraîne vers fon origine.

La même inclination paroît dans les chofes naturelles ; ce qui vient de la terre retourne à la terre, l'eau retombe dans la mer, s-ce le feu s'éleve toûjours vers fa Sphere, les animaux le plaisent dans l'air qu'ils ont commencé à respirer, & les poiffons dans leur eau. Seneque dit que nous aimons nôtre patrie, non parce qu'elle eft confiderable, mais parce qu'elle eft nôtre. Le Scythe fuivant le Poëte ne pouvoit fouffrir les magnificences de Rome, I liii ij

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