Imágenes de páginas
PDF
EPUB

AN. 1438. leurs devoirs. S'étant enfuite entretenu quelque tems: avec lui, il le fit conduire avec la même pompe au fon des trompettes dans le palais qu'on lui avoit préparé, & où il fut traité avec beaucoup de fomptuofité & de magnificence, comme il convenoit à un empe

LXXXV.

Le patriarche

Concil. tom. XIII. p. 904.

reur.

le

Trois jours après cette entrée, le patriarche qui étoit vient à Ferrare. demeuré à Venise avec une partie des métropolitains. & des évêques, arriva par eau à Ferrare dans un magnifique vaiffeau du marquis d'Eft. Il paffa dans ce vaisseau le reste du jour & la nuit, jusqu'à ce qu'on eût reglé la maniere dont lui & ceux de fa fuite feroient reçûs. Car, comme il vouloit maintenir fa dignité, qui étoit la premiere de l'églife Orientale, où l'on ne convenoit point de la primauté & de la fuperiorité du pape, puifque c'étoit de cela même dont on devoit difputer dans le concile, il prétendoit traiter d'égal avec pape, fans que l'on mît entre eux d'autre difference que celle de l'âge. Il étoit fur-tout attaché à deux points.. Le premier, de vouloir que l'on envoyát des cardinaux au-devant de lui, ce qu'on n'avoit pas fait, n'y étant: ,, venu que des évêques. Le fecond, de ne point fouffrir qu'on lui parlat de baifer les pieds du pape, felon la coûtume de l'églife Occidentale,,.. Et comme il infiftoit fur ces deux articles avec beaucoup de fermeté,, le pape fut obligé pour le bien de la paix, de les lui accorder. Néanmoins il ne voulut point qu'il fît porter fa croffe, ni qu'il donnât fa benédiction dans la ville. de Ferrare.

LXXXVI. Maniere dont

le patriarche fa

lue le pape. Concil. tom.

XIII. p. 904.

[ocr errors]
[ocr errors]

"

Le lendemain donc après que tout fut reglé, quatre cardinaux accompagnez de vingt-cinq évêques, de grand nombre de prelats & d'officiers du pape, & du marquis d'Eft avec les enfans & la nobleffe, alle..

rent recevoir le patriarche à la defcente du vaiffeau; AN. 1438. & après les premiers complimens, lui présenterent & à ceux de fa fuite, les chevaux qu'on leur avoit amenez, fur lesquels ils monterent; & deux cardinaux, dont l'un étoit Profper Colonne, neveu du défunt pape, s'étant mis aux deux côtez du patriarche, on marcha en ordre jufqu'à la porte du palais, où le patriarche mit pied à terre. De là il fut conduit, en traverfant les falles & les antichambres jusqu'à la porte de la chambre secrete, où le pape, qui ne vouloit pas que l'audience fût publique, l'attendoit affis fur un trône fort élevé; ayant à fa droite les cardinaux fur des fieges affez bas. A l'arrivée du patriarche on ouvrit la porte, & on le fit entrer, accompagné seulement de fix des fiens, qui furent les métropolitains de Trébizonde, d'Ephefe, de Cyzique, de Sardes, de Nicée & de Nicomédie. Le pape le voyant approcher, se leva de son trône pour le recevoir; ils s'embrafferent, & fe donnerent le baifer de paix. Après quoi le pape s'étant remis fur fon trône, on fit affeoir à la gauche le patriarche fur un fiége femblable à celui des cardinaux. Les fix métropolitains furent pareillement admis au baiser, & fe mirent enfuite à la gauche du patriarche, mais debout, comme firent aufli les autres Grecs de la suite, qu'on fit entrer les uns après les autres fix à fix, & qui lui firent la reverence felon leur differente qualité, ou en lui baisant la main & la joue, ce qui fut permis aux évêques & aux principaux officiers de l'églife de Conftantinople, ou en faisant une profonde inclination, comme firent les autres ecclefiaftiques: car pour les laïques, ils lui baiserent les pieds à genoux; ce qu'on permit pour s'accommoder à la coutume des Grecs. Quelques jours après il fallut traiter avec l'empe

avec les Grecs

concile.

n. 69.77.

AN.1438. reur & le patriarche de la celébration du concile; LXXXVII. dont il y avoit déja eu deux feffions, comme on l'a Le pape traite vû, la premiere le dixiéme de Janvier, où avoit préfur l'affaire du fidé le cardinal Albergati, qu'Eugene avoit envoyé Voyez ci-deus devant lui à Ferrare en qualité de fon légat; la feconde qu'Eugene lui-même avoit tenu le quinziéme de Février. Le pape fe voyant assuré des Grecs, commença auffi-tôt après la cerémonie de leur réception à les entretenir de cette affaire : & comme l'empereur infiftoit toujours à vouloir que les rois & les princes de l'Europe affiftaffent à ce concile, ou en perfonne, ou du moins par leurs ambaffadeurs, il fut enfin réfolu d'un commun confentement, qu'on tiendroit le neuviéme d'Avril la premiere féance des Latins avec les Grecs, expreffion captieufe dont on fe fervit fe fervit pour faire entendre à tout le monde que les deux églifes d'Orient & d'Occident étoient affemblées à Ferrare dans un concile légitime, où tous les princes & tous les prelats étoient invitez. De plus, afin qu'on eût le loifir de s'y rendre, on arrêta que la feconde feffion ne fe celébreroit que quatre mois après la premiere ; & que durant tout ce tems-là on tiendroit des congrégations particulieres, où seize fçavans hommes que l'on choisiroit entre les Latins, & autant du côté des Grecs, propoferoient dans des difputes & dans des conferences reglées, ce qu'ils avoient à dire fur les cinq articles qu'on devoit examiner dans le concile. 1. Touchant la proceffion du Saint-Esprit. 2. L'addition Filioque, que l'on avoit faite au fymbole. 3. Le purgatoire & l'état des ames avant le jugement. 4. L'ufage des azymes dans les faints myfteres. 5. La primauté & l'autorité du faint fiege.

LXXXVIII.

Articles qu'on ner dans le con

devoit exami-¦

cile de Ferrare.

Cette résolution prife, le pape envoya fes lettres

tom. XIII.cone.

LXXXIX. Les Grecs &

circulaires à tous les princes & à tous les évêques, pour AN. 1438. les inviter à se rendre dans quatre mois à Ferrare, afin d'affifter à ce concile, où, en préfence de toutes les puiffances du monde chrétien, l'Orient se devoit réunir à l'Occident, pour ne faire plus deformais qu'une feule bergerie fous un même pafteur. On penfa donc à tenir la premiere feffion du concile, qui dans les Actes d'Au- Ata Patricii, gustin Patrice, est, nommée la troisième, à cause des p.1556. deux premieres tenues avant l'arrivée des Grecs; mais comme ces deux premieres ne font plutôt qu'une introduction au concile, & que les actes romains ne placent qu'au huitiéme d'Octobre la premiere feffion, où l'on commença à parler de la proceffion du Saint-Esprit, qui étoit le point principal du differend qui fe trouve entre les deux églifes, Orientale & Occidentale; pour eviter la confufion, nous fuivrons à l'avenir cet ordre. Ainfi le neuviéme d'Avril qui fut le Mercredi-faint, étant arrivé, on fe mit en devoir de faire l'ouverture du concile à Ferrare: mais dans le tems qu'on étoit prêt de s'affembler, il furvint une conteftation touchant les féances du pape, de l'empereur & du patriarche. Le pape fouhaitoit que fon trône fût mis au haut de l'é- P.905. & feq. glife dans le milieu entre les deux rangs, parce que préfidant en perfonne au concile, il devoit être comme le centre & le nœud qui réunit les deux partis. Mais l'empereur des Grecs s'y oppofa fortement, & foutint que ce devoit être plutôt fa place, comme en effet Conftantin l'avoit occupée au concile de Nicée, & Marcien qui étoit affis avec le fenat dans le baluftre au bas de l'autel, dans le concile de Calcedoine. On répondit à l'empereur, qu'il étoit vrai que les papes n'eurent point cette place du milieu dans ces conciles, mais que c'étoit parce qu'ils ne s'y étoient point trouvez en perfonne. A a iij

les Latins s'afl'églife de faint George.

femblent dans

Acta Patricii,

tom. XIII.conc.

XC.

AN. 1438. Il fallut donc accommoder cette affaire, & l'accommodement fut, que le pape feroit placé dans une chaire élevée à la premiere place du côté droit; que l'on mettroit un pas au-deffous de lui un trône vacant pour l'empereur des Latins, & qu'au deffous du même côté feroient placez les cardinaux, les archevêques & les Reglement évêques d'Occident: Que l'empereur Grec auroit un pour les féances trône de l'autre côté vis-à-vis celui de l'empereur des Latins; que l'on mettroit au-dessous la chaire du patriarche de Conftantinople, enfuite le banc des vicaires des autres patriarches, & après eux les archevêques & les évêques Grecs; & que le defpote Demetrius, frere de l'empereur feroit affis fur un fiege à côté de lui. Le grand autel de l'église de faint George où se tenoit le concile étoit tourné vers l'Orient; de forte que le côté droit de l'évangile qui étoit le Septentrion, étoit occupé par le pape & les Latins, & le gauche vers le Midipar les Grecs. L'évangile étoit placé au milieu de l'églife devant l'autel.

Acta Juftinia ini in hift concil.

Florent. tom.
X11.concil.

Cet ordre ainfi arrêté, le pape revêtu de ses habits pontificaux, s'étant mis dans fon trône, neuf cardinaux prirent leurs places immediatement au-dessous du fiege préparé pour l'empereur des Latins, & qui fut toujours vuide à caufe de fon abfence. Le patriarche de Jerufalem du rit latin fut placé après le premier des cardinaux, & celui d'Aquilée après le dernier. Les archevêques & les évêques fuivoient felon l'ordre d'antiquité & du tems de leur confecration, au nombre d'environ cent cinquante; puis les abbez, les genéraux d'ordres, les docteurs, & les autres ecclefiaftiques qui rempliffoient tout le bas de l'églife; le haut étoit rempli par les protonotaires apoftoliques, & par les autres officiers. Les avocats confiftoriaux étoient fur les dé

[ocr errors]
« AnteriorContinuar »