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fincerité vraiment chrétienne, & d'une intention pure AN. 1432. & droite. Après ces excufes il conclut ainfi. "Je l'ai dit ,, fouvent, je le dis encore, & je le protefte devant Dieu & devant les hommes, que fi votre fainteté ,, ne change pas de confeil & de deffein, elle fera cause d'un fchifme & d'une infinité de maux, qui afflige»ront l'églife.

"

XIV.

Réponse fy

du pape Euge

ne.

Concil. P.

Les peres du concile entrerent dans les vûes du cardinal Julien, & feconderent avec plaifir fes bonnes nodale du conintentions, comme il paroît par la réponse fynodale cile aux légats qu'ils firent aux légats du pape Eugene, dans laquelle, après avoir déclaré que la diffolution du concile de Balle fcandaliferoit toute l'églife, & après avoir prié le Labbe, tom.XII fouverain pontife, de ne point attrifter le Saint-Efprit, 6730 mais plutôt de fe joindre, comme un bon pere, à l'églife Catholique, que le concile repréfentoit; ils répondent aux raifons que les légats avoient alleguées, pour perfuader la diffolution : & comme elles fe réduifoient toutes à établir l'autorité du pape fur le concile, les peres de Bafle s'attachent à relever l'autorité du concile fur le pape. Voici le principe qu'ils établissent d'abord: que, quoiqu'ils reconnoiffent le pape comme chef de l'églife, il eft néanmoins obligé d'obéir aux conciles genéraux, légitimement établis & affemblez, dans les chofes qui regardent la foi, l'extinction du schisme, & la réforme de l'églife, fuivant le decret du concile de Conftance. Ce principe pofé, voici quelles font leurs preuves.

I. Perfonne ne peut contester l'autorité de l'églife, & que tout ce qu'elle reçoit ne doive être également reçu par tous les Fideles, comme l'enfeigne fi fouvens faint Auguftin: Je ne croirois point, dit-il, a l'evangile, si je n'y étois engagé par l'autorité de l'églife. Qu'elle foit infail

AN.1432. lible, & exemte d'erreur, ce font des principes certains. Or cette infaillibilité ne convient qu'à l'églife feule, par un privilege spécial, qui n'a pas été accordé aux anges, puifqu'ils ont péché; ni à nos premiers peres, qui ont été prévaricateurs ; ni aux papes mêmes, puifqu'il y en a qui ont erré dans la foi. Il n'y a donc quel'église qui puiffe faire des loix qui obligent univerfellement tous les Fideles.

tom.x11.p.673.

II. Les conciles genéraux font d'une autorité égale à Conc. Labbe, celle de l'églife. Le concile de Constance a décidé expreffément, qu'un concile genéral, legitimement affemblé, reprefente l'églife Catholique, & tient fa puiffance immédiatement de Jefus-Chrift; & Martin V. a dit dans une de fes lettres, que ce qui a été dit dans le concile de Constance, de l'autorité de l'églife, doit être appliqué au concile genéral qui la représente; parce qu'autrement la représentation ne feroit pas fidelle, fi le concile qui repréfente, n'avoit pas la même autorité, que l'églife qui eft représentée. D'où il fuit que les conciles genéraux font infaillibles, puisqu'ils font l'église même. Quand les autres preuves manqueroient, ajoute-t-on, celle-ci feule fuffiroit pour établir l'autorité des conciles genéraux.

Ibid.

III. Quoiqu'il foit vrai que le pape foit le chef minifteriel de l'églife, pour parler avec les peres du concile de Bafle, il n'eft pas cependant au-deffus de tout ce corps mystique; la raifon, l'experience, & l'auto- . rité nous font voir le contraire. La raifon, car ce corps myftique qui eft l'églife, même fans compter le pape, ne peut pas errer dans les chofes de foi. L'experience auffi a fouvent fait voir que le pape, quoique chef de ce corps, a erré, & que ce corps ayant toujours perfevere dans fon infaillibilité, a condamné & déposé des

Matt. 18.

Galat. cap. 2

papes convaincus d'erreur dans la foi & dans les mœurs; AN. 1432. & qu'au contraire le pape n'a jamais condamné, ou ex- Conc. Labbe, communić, ou déposé le reste du corps de l'église. Ainfi tom.x11.p.673quoique le pape & l'église ayent reçu le pouvoir de lier & de délier, le pape toutefois n'a jamais exercé ce pouvoir contre l'églife; mais l'église l'a quelquefois exercé contre le pape. L'autorité enfin nous prouve la même chofe : car ces paroles de Jefus-Chrift dans l'évangile: Si votre frere a péché contre vous, dites-le à l'églife, & s'il n'écoute pas l'église même, qu'il foit à votre égard comme un Païen & un Publicain, comprennent tous les hommes, faint Pierre auffi - bien que fes fucceffeurs. Que faint Pierre ait été compris dans fes paroles, faint Paul nous en fournit une preuve évidente, lorsqu'il resista en face à cet apôtre devant tout le monde, parce qu'il étoit, dit-il, répréhensible. Or, qu'a-t-il fait autre chofe, en résistant à faint Pierre, en prefence de tout le peuple, que découvrir fa faute à toute l'églife? Que fes fucceffeurs y foient compris auffi, il est aisé de le prouver par les exemples des papes Anastase & Libere, qui furent regardez par toute l'église de Rome, comme des papes dans l'erreur & par la conduite du concile de Conftance, qui a déclaré que les crimes des papes contre la foi, leur schisme, & le déreglement de leurs mœurs, peuvent être déclarez à l'église, & qu'ils font tenus de fe foumettre à fes décifions. Que fi par opiniâtreté ils refusent d'y obéir, ils peuvent être condamnez à une pénitence proportionnée, & l'on peut recourir à d'autres remedes marquez dans le droit; & par confequent on peut les excommunier. Cela étant, ils feront regardez comme des Heretiques & des Publi

cains.

La lettre ajoute : Le pape fe plaint que nous ayons Ibid.

AN.1432. appellé les Bohémiens au concile : on ne l'a pu

tom.x11.p.673.

faire;

dit-il, fans offenfer le concile de Conftance qui les a Conc. Labbe, condamnez. On répond: Dans quel decret de ce concile avez-vous lu, que l'églife ne doive pas appeller les Bohémiens pour les inftruire? Nous ne fommes pas furpris, continue-t-on, fi l'on a pris occafion des termes dont s'eft fervi notre orateur, lorsqu'il a invité les Bohémiens au concile, pour avoir un prétexte de dissoudre le concile même, puifque l'on a fait un pareil ufage des lettres que nous avons écrites, quelque ménagées qu'elles fuffent. Plût-à-Dieu, que pour l'honneur du fouverain pontife, il n'eût pas inferé cette raison dans fes lettres, qu'une femblable convocation des Bohémiens, eft injurieuse au faint siege, aux conciles, aux decrets des faints peres & aux loix de l'église. Mais si le pape defapprouve l'audience qu'on accorde aux Bohémiens, pourquoi ne veut-il pas qu'on agiffe de même avec les Grecs; puifque les uns & les autres font féparez de l'unité de l'églife? Si le concile eft indiqué à Boulogne pour les Grecs; pourquoi les Bohémiens n'auront-ils pas le même avantage à l'égard du concile de Basle? Leur herefie n'eft-elle pas plus dangereuse; & n'est-ce pas une raifon qui nous oblige à nous y appliquer plus fortement ? La même lettre montre enfuite l'importance d'écouter les Bohémiens, les confequences fâcheufes pour l'église, si on leur refusoit une audience: la conduite qu'on y tiendra, n'ayant d'autre vûe que de les inftruire & les convertir, s'il eft poffible: & que cette conduite a été pratiquée par beaucoup de peres & de docteurs de l'églife, dans tous les fiecles. Elle conjure en finiffant & fupplie le pape avec toutes les inftances poffibles, pour le falut de fon ame, & pour la confervation de l'églife, d'adhérer au concile

de

de Bafle, & de ne point penfer à le diffoudre. Cette let- AN. 1432 tre est datée de Baile dans une congrégation genérale, le troifiéme de Septembre.

Les prelats qui étoient allé trouver le pape & les cardinaux de la part du concile, étoient, l'évêque de Lauzanne, & le doyen d'Utrecht : on les chargea de demander avec instance au pape Eugene la révocation de fon decret. Ces députez s'acquitterent de leur commission avec beaucoup de fidelité, & l'empereur joignit même fes prieres aux leurs; mais ils ne gagnerent rien encore fur l'efprit d'Eugene. Les députez revinrent fort chagrins du mauvais fuccès de leur députation, & le concile voyant qu'Eugene vouloit toujours maintenir fon decret, & que le concile fût diffous, celui-ci, fans avoir égard à ce decret, opposa son autorité à la fienne.

Pour cet effet on tint la troisiéme session dans l'églife cathédrale de Bafle le vingt-neuviéme d'Avril de l'an 1432. On commença par le rapport de tout ce que le concile avoit fait, pour fupplier le pape & les cardinaux de venir à Bafle, & y examiner avec les autres membres assemblez les affaires importantes qu'on avoit ày traiter; du refus qu'ils avoient toujours fait de s'y rendre, & de l'opiniâtre refiftance d'Eugene, qui vouloit abfolument que ce concile fût diffous. Après ce rapport on renouvella les decrets du concile de Conftance touchant l'autorité du concile genéral, que l'on avoit déja publiés dans la précedente feffion. On fit enfuite un autre decret, par lequel le prefent concile legitimement affemblé, gouverné par le Saint-Efprit, & ayant toute l'autorité d'un concile genéral avertit, prie, conjure, & fomme expreffément le pape Eugene de révoquer abfolument & de fait le decret qu'il avoit donTome XXII.

XV. Troifiéme fef

fion du concile

de Bafle.

Labbei, concil.

tomx11.p. 479.

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