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Si nous devons juger des ouvrages anciens par les modernes, Claudien blâmoit avec raison le mauvais goût avec lequel ces vêtemens étoient peints. Il eft certain qu'aujourd'hui-même le deffin ne répond pas à la beauté & à la

richeffe des couleurs.

Strabon rapporte que les Indiens portoient des vêtemens de toiles ornées de fleurs peintes : ΣΙΝΔΟΝΑΣ ΕΥΑΝΘΕΙΣ. Gette épithète indique que ces ornemens étoient délicatement exécutés (1).

paffage. Attalicus, je crois, fe difoit seulement de ce qui étoit riche, élégant, ou d'un travail délicat, comme tout ce que poffédoit Attale, roi de Pergame, fameux par fes richeffes & fa magnificence. Heinfius propofe de fubftituer telis à velis, qu'il entend par tenture ou tapis peints. Mais il paroît par le xIx liv. de Pline, c. 1, & par l'usage conftant des autres auteurs, que le mot velum s'applique à la toile, & telum à la toile teinte.

(1) Strab, liv. xv, p. 709. Zwdwv signifie toile

Les Macédoniens, qui accompagnèrent Alexandre fur les rives de l'Indus, apprirent d'eux l'art de teindre les toiles de diverfes couleurs.

On trouve dans les hiftoriens plufieurs faits relatifs à la culture du coton, & à la fabrication des toiles dans ces contrées.

Le lin étoit cultivé dans l'Inde; & nous favons quels étoient les faifons & le fol convenables pour le femer.

L'habileté de ces peuples à filer & tiffer le lin étoit fi connue, que Denis Périégète, dans fa defcription de leurs coutumes & de leurs mœurs, cite ces travaux comme l'occupation qui carac térise cette nation.

Ces toiles de lin ainfi préparées, faifoient une partie de leurs vêtemens,

ou vêtement de toile. Hefychius. Eindar, ¿born, ὀθόνια, λινὰ ιμάθια. Bayfius, de re veftiaria p. 53. Sindon, veftis linea. Ce mot s'explique auffi quelquefois par toiles de coton.

& une branche fort étendue de leur commerce. L'auteur ancien du voyage dans lamer Rouge, Periplus mari Erithrai, compte plufieurs marchés Indiens où l'on vendoit cette marchandise. Le plus fameux fe tenoit fur les rives du Gange qui lui donna fon nom.

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Je crois néceffaire d'obferver les grandes erreurs commifes par quelques écrivains fur ce point d'antiquité. Voffius, dans fes notes fur Pomponius Mela, foutient, que par-tout où les anciens font mention de la laine, du lin, ou du coton des Indes, nous devons, par ces mots, entendre la foie. Cette affertion eft entièrement détruite par les paffages tirés des meilleurs auteurs, que je viens de citer, relativement à ces peuples qui même, par un motif de religion dont je parlerai bientôt, n'auroient jamais admis l'ufage général de la foie, s'ils l'avoient poffédée.

Les auteurs anciens nous apprennent auffi que le coton étoit produit & tra

vaillé dans ces contrées. Pline nous dit qu'on faifoit les étoffes les plus fines avec celui qu'on y recueilloit, ainsi qu'en Perfe. Arrien les cite- pour deur éclatante blancheur. Il paroît qu'ils ne différoient pas des cotons qui nous viennent aujourd'hui de ces climats, peints ou imprimés avec une variété de figures & de couleur bien au deffus de celles que les Européens ont en dernier lieu imitées. Ces ouvrages ne font pas travaillés par les Mahométans établis dans l'Inde, mais par les defcendans de fes anciens habiran's (1), auquel l'art de peindre les

(1) Quelques-uns des princes régnans Indous, remontent fans obscurité à l'origine de leur famille au-delà de quatre mille ans. Les contrées gouvernées par des princes naturels du pays, malgré les ravages des Mahométans, font ri ches & bien cultivées; leurs gouverneurs encou ragent l'induftrie & le commerce. C'est aux Indiens que nous devons les belles manufactures 'de l'Orient.

toiles de différentes couleurs, ou de les teindre en plein, paroît avoir été transmis par leurs ancêtres.

Ce pays, célèbre pour ces ouvrages, fourniffoit auffi les matériaux néceffaires à leur exécution, Strabon affure qu'il abondoit en drogues, racines, & fubftances colorantes qui produifoient ces couleurs admirables. Pline en cite quelques unes qui, d'après leur nom & leur description, reffemblent beaucoup à celles que nous tirons encore aujourd'hui de cette partie du monde. Parmi ces fubftances, il en eft une fort semblable, par fon nom, fa couleur & fon origine, à l'indigo (1) dont fe fer

(1) Ab hoc maxima autoritas Indico. Ex India wenit arundinum fpuma adhærefcente limo; cùm teritur nigrum, at in diluendo mixturam purpura cæruleique mirabilem reddit. Plinii,l. xxxv, c. v→ Indiâ conferente fluminum fuorum limum. Ib. c. viii. L'indigo moderne reffemble autant par fa couleur que par sa dénomination à la substance co

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