Imágenes de páginas
PDF
EPUB

les mains, & fa Maison reffembloit à ces Temples de l'Antiquité, où étoient en dépôt les Ordonnances & les Recettes qui convenoient aux maux différens. Il est vrai que les fuffrages des Courtifans en faveur de ceux qui font en place, font affés équivoques; qu'on croyoit faire fa cour de s'adreffer au premier Médecin, qu'on s'en faifoit même une espece de loi; mais heureufement pour les Courtifans ce premier Médecin étoit un auffi grand Médecin.

Il avoit befoin de l'être pour luimême; il étoit né d'une très-foible constitution, sujet à de grandes incommodités, fur-tout à un Afthme violent. Sa fanté, ou plutôt fa vie ne fe foutenoit que par une extrême fobriété, par un régime prefque fuperftitieux, & il pouvoit donner pour preuve de fon habileté qu'il vivoit.

Après la mort du Roi il fe retira au Jardin Royal, dont il avoit confervé la Surintendance. Son Art ceda enfin à une néceffité inévitable; il mourut le 11 Mars 1718 âgé de près de 80 ans.

L'Académie des Sciences l'avoit choifi en 1699 pour être un de fes Honoraires.

Outre un profond favoir dans fa Profeffion, il avoit une érudition trèsvariée, le tout paré & embelli par une facilité agréable de bien parler. La raifon même ne doit pas dédaigner de plaire quand elle le peut. Il étoit attaché à fes devoirs jufqu'au fcrupule; & quelquefois au milieu de douleurs affés vives, il ne laiffoit pas d'être auprès du Roi dans les temps où il y devoit être. L'affiduité dun homme aufli défintereffé, & qui au lieu de demander refufoit, n'étoit pas celle d'un Courtifan. Quelquefois il ne fe défioit pas affés des inftructions qu'il recevoit dans les chofes de fon ministere; car il étoit dans un pofte trop élevé pour avoir la vérité de la premiere main; & l'amour qu'il fe fentoit pour la juftice, le témoignage qu'il s'en rendoit, l'attachoit beaucoup aux idées qu'il avoit prifes. Ila toujours fouffert fes longues & cruelles infirmités avec tout le courage d'un fage Phyficien, qui fait à quoi la machine du Corps humain est fujette, & qui pardonne à la nature,

Il avoit époufé Marie Nozereau dont il a laiffé deux fils, l'aîné Evêque de Lombez, & le fecond Confeiller d'Etat,

[ocr errors]

ELOGE

DE M. L'ABBE'

DE LOUVOIS

C

AMILLELE TELLIER naquit le 11 Avril 1675, de Michel le Tellier, Marquis de Louvois, Miniftre. d'Etat, & de Dame Anne de Souvré. Il étoit leur quatriéme Fils, & fut deftiné de bonne heure à l'Eglife. Des Bénéfices confidérables fuivirent promptement cette deftination. De plus, dès l'âge de 9 ans il fut pourvû de la Charge de Maître de la Librairie, à laquelle M. de Louvois en fit unir deux autres en fa faveur, celle de Garde de la Bibliothéque du Roi, & celle d'Intendant & de Garde du Cabinet des Médailles. Tout le tournoit du côté des Sciences, & heureusement ses inclinations & fes difpofitions naturelles s'y accordoient,

On alla chercher pour lui les Maîtres que la voix de la Renommée in

diquoit. Tous ceux qui brilloient le plus dans la Littérature, & qu'on ne pouvoit pas lui attacher de fi près, on les attiroit chés lui, ou plutôt on les y admettoit; car il n'étoit guére befoin de violence ni d'adreffe pour les mettre en liaison avec le Fils d'un Miniftre tel que M. de Louvois. Ils n'arrivolent là que parés de tout ce qu'ils avoient de plus exquis; ils y apportoient les prémices de leurs Ouvrages, leurs Projets, leurs réfléxions, le fruit de leurs longues lectures; & le jeune homme qu'ils vouloient inftruire, & à qui ils ne cherchoient guére moins à plaire n'étoit nourri que de Sucs & d'Extraits les plus fins & les plus agréables. Il fit des Exercices publics fur Virgile, Homere & Théocrite, qui répondirent à une fi excellente éducation. Auffi M. Baillet ne l'oublia-t-il pas dans fon Livre des enfans célébres par leur favoir cet Enfant avoit bien des titres pour y tenir une place.

Il achevoit fa premiere année de Philofophie en 1691, lorfqu'il perdit avec beaucoup de douleur M. de Louvois fon Pere. Il prouva bien que fes études jufque-là n'avoient pas été for

cées i

cées ; il les continua avec la même ardeur, & embraffa même celles qui ne lui étoient pas abfolument néceffaires. Il apprit de M. de la Hire la Géométrie, & de M. du Verney l'Anatomie. Il ne crut pas, ce que bien d'autres auroient cru volontiers en fa place, que fon nom, fa richeffe, le crédit d'une Famille très-puifsante, fussent un mérite fuffifant.

Dans fon Cours de Théologie il trouva un Concurrent redoutable, M. l'Abbé de Soubize, aujourd'hui Cardinal de Roban. Il fe mit entr'eux une émulation dont ils profiterent tous deux; & par une espece de reconnoiffance de l'utilité dont ils avoient été l'un à l'autre, ils contracterent une étroite liaison.

Après que M. l'Abbé de Louvois eut terminé cette carriere, en recevant le Bonnet de Docteur de Sorbonne, feu M. l'Archevêque de Rheims fon Oncle lui donna de l'emploi dans fon Diocèfe pour fe former aux affaires eccléfiaftiques. L'école étoit bonmais févere, & à tel point, qu'elle eût pûle corriger des défauts même que l'on reprochoit au Prélat qui le formoit. Tome VI.

ne,

E

« AnteriorContinuar »