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Si les palmes de Mars n'excufoient mon offense.

Et plus bas :

Ainfi se va plaignant Dorizis que la guerre
Arrefte fur la mer dans ces legers vaisseaux >
Esloigné de fa Belle, ayant le cœur en terre,
Ses defirs dans le Ciel, & fon corps fur les eaux.

DE MONT-
GAILLARD.
Ibid. fol. z.

Quant à fa difgrace, fans pouvoir en Ibid, fol, 27; deviner le fujet, il me femble que le

Poëte en montre clairement la réalité

par ces autres vers :

Desdaigné de mon Prince, & mesprisé de Claire
La terre pour horreur, le Ciel pour adversaire,
Combattu du deftin, comme de la douleur,
Que dois-je devenir ?...

Mon Maiftre me délaiffe, & ma Maitreffe encore. 7
Je fçay bien que j'ay tort, qu'ils ont tous deux raison;
Car l'un eft un grand Prince,& l'autre eft une Belle&c.

Deux autres faits ne font pas moins
certains: le premier, qu'il fut attaché
à MM. de Galles, c'est-à-dire,à Laurent
de Galles, Seigneur du Meftrail, tué
devant Crémieu au mois de Février
1550. & à M. de la Buiffe, fon frere,
Seigneur de Voyron & du Viviers. Le
fecond, qu'il eft mort à la fin de 1605.
ou au commencement de 1606. La
preuve de ce fecond fait, c'eft que fon

Epitaphe compofée par d'Audiguier

DE MONT- fe lit dans l'édition des Poëfies de celuiGAILLARD. ci donnée en 1606. & que d'Audiguier dit que Montgaillard étoit mort trèsrécemment. Il ne marque point à quel âge; mais de la maniere dont il s'exprime, je conclud qu'il devoit être jeune. Voici en effet comment il le fait parler.

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Paffant, voilà de mon départ

Le feul regret qui me demeure :
Je me plains d'eftre nay trop tard,
Et non pas que trop toft je meure:
Car naiffant plutoft, j'euffe fait
Le cours de mon los plus parfait.

Que Montgaillard ait eu ou non quel-
que paffion pour fa Flamide ou fa
Claire, l'Editeur de fes Poëfies nous
affure qu'il n'avoit eu que de l'indif-
férence pour fes vers, & que pendant
fa vie il n'en avoit publié aucun; qu'il
s'étoit même peu foucié ni de les ré-
pandre, ni de les conferver, & que
fans fes amis qui en avoient des copies,
le public en auroit été privé. Il n'y au-
roit rien perdu. Montgaillard en avoit
cependant gardé du moins une partie
puifque s'il fut tenté de bruler ce qu'il
pour fa belle, loin de fuc-

avoit fait

Comber à la tentation, il voulut mê

me qu'on fçût qu'il avoit été tenté. DE MONTVenez, dit-il,

Venez, dolens efcrits qu'un amour pur & faint
Sur l'innocent papier par ma main avoit peint,
Venez venger ma fin par voftre fin certaine.
Venez doncques, venez parfumer mon cercueil;
Vous fuftes autresfois les couriers de ma peine
Vous ferez aujourd'hui les témoins de mon deuil,&c.

,

Le même Editeur de ces Poëfies nous donne Montgaillard pour un homme fans eftude & fans art, & qui n'avoit qu'un beau naturel. On trouve cependant dans fon recueil des vers italien's & efpagnols de fa compofition; & l'on voit d'ailleurs qu'il n'ignoroit point la langue latine. A l'égard de fon beau naturel fes Poëfies ne le prouvent gueres.

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On peut divifer celles-ci en plufieurs parties. La premiere, fous le titre d'Œuvres mêlées, contient un grand nombre de Stances & quelques Chanfons. La feconde intitulée, GaillardiJes du fieur de Montgaillard, remplit exactement ce titre : ce font des cou

plets fatyriques, burlesques, ironiques, & tous très libres. La troifiéme, offre des Cartels, ou petites pieces qui

GAILLARD.

Ibid. fol. 54.

paroiffent avoir été compofées pour

DE MONT- des divertiffemens. Les Vers héroïques GAILLARD. font la quatrième : il y en a plufieurs

à la louange du Duc de Guife; un commencement d'Hymne de la victoire, au Roi; un Difcours imparfait d'un combat naval donné par le Duc de Guise. La cinquième partie renferme des Vers funebres, c'est-à-dire, les Epitaphes hiftoriques & panégyriftes de Laurent de Galles, Seigneur du Meftrail, de deux freres de ce Seigneur, d'Olivier de Galles, & de quelque Dame ou Demoifelle, que le Poëte ne défigne que fous le nom de Marguerite. Il y a du feu dans la Defcription qu'il fait des exploits de M. du Meftrail, & l'on fent que c'eft un militaire qui parle de ce qu'il aime. Peutêtre avoit-il été témoin de plufieurs de ces exploits.

On a rangé fous la fixiéme partie, les Vers Spirituels de l'Auteur, quoiqu'il n'y ait que trois pieces fort courtes; fous la feptiéme des Difcours amoureux à Belize, en profe; & enfin fous la huitiéme les Poëfies efpagnoles

de l'Auteur.

Au folio 74. de ce recueil on lit ce Dialogue de Montgaillard, fur le Ta

bleau de feu M. le Duc de Guife; je ne le crois pas indigne d'être con- DE MONTfervé.

Toi qui fis le pourtrait de ce Lorrain vainqueur, Pourquoy n'achevas-tu le plus beau de l'ouvrage ? C'eft que dans les hafards Mars lui peignoit le cœur Tandis qu'en ce Tableau je tirois fon image.

Mais pourquoy fur fon front nie mis-tu les lauriers Qu'il acquift poursuivant mainte grande conquefte? C'est que pour en donner à mille autres guerriers, 11 fe les arracha lui-mefine de la tefte.

Voyant dans ses regards les foudres s'affembler " Blefiis-tu point de peur en lui peignant la face? Avec l'un de fes yeux Mars me fit bien trembler, Mais par l'autre l'Amour me redonna l'audace.

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Comme tu nous as peint tant de feux dans les yeux,
Tu devois fur fa levre imprimer la parole.
Je ne le pouvois pas ; car c'eft à faire aux Dieux
Qui font que les vertus parlent par for idole.

Maïs, ô Peintre, dis-moi, pourquoy dedans la main,
Au lieu de ce bafton , ne lui mis-tu l'efpée ?
C'est qu'un pourtrait fi beau fembleroit inhumain
Si l'on voyoit le fang auquel elle eft trempée.

Tu nous a fait grand tort de n'avoir mis icy
Ses combats, fes labeurs, & fes exploits de guerre,
Non, je n'euffe fçeu peindre e en lieu fi racourcy
Ce que fes bras ont peint deffus toute la terre.

JUDE SER CLIER.

GAILLARD

JUDE

La même année 1606. Jude SERCLIER, Dauphinois, né à la Cofte faint SERCLIER

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