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qui ont écrit ce qui s'eft paffé fous les Céfars, nous euffent refufé cette fuite de l'Hiftoire Romaine, fous prétexte qu'il n'étoit pas aifé de trouver à TiteLive un continuateur digne de lui? Trop de timidité, en pareil cas, viendroit plutôt d'une ridicule vanité, que d'une fage & loüable modestie.

ge,

Pour moi, perfuadé qu'un Auteur ne doit que médiocrement confulter fes propres intérêts, lors qu'il a lieu de fe flater que le fonds de fon ouvraindépendamment de la forme, peut tourner à la gloire de fa nation, & au profit des Lettres ; je me fuis volontiers porté à recueillir ce qui regarde une Compagnie, à laquelle on doit prefque toute la perfection, où la Poëfie & l'Eloquence font arrivées fous le règne de Louis le Grand.

Que favons-nous, après tout, quelle fera en France la fortune des Lettres ? On ne fauroit prévoir tous les accidens qui peuvent un jour la menacer. Au moins eft-il certain que l'un des plus dangereux feroit le manque de protection. Or, fi jamais telle étoit la deftinée de nos neveux, par où la com

battroient-ils plus avantageusement que par l'exemple du plus grand de nos Rois? On verra bien par fes Mé dailles, qu'à tous les autres titres il ajoûta celui de PROTECTEUR DE L'ACADEMIE FRANÇOISE: mais fes Hiftoriens, entraînez fans ceffe par une foule d'événemens plus éclatans, négligeront vrai-semblablement d'écrire tout ce qu'il crut devoir faire en cette qualité. Attachons-nous donc à en donner ici un détail, qui ne fe trouvera point ailleurs, qui fera honneur à sa mémoire, & qui fervira peut-être à exciter, jufque dans fes derniers fucceffeurs, le même zéle pour l'avance

ment des Lettres.

Voilà le but de mon ouvrage, & par quels motifs je l'ai tenté.

Je m'y renferme entre 1652, qui est l'année où M. Pelliffon finit, & 1700.

Je n'y chercherai point d'autre méthode que celle qui fe préfente naturellement, de commencer par l'Hif toire générale de l'Académie,& de paffer enfuite à l'Hiftoire particuliére des Académiciens,

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Ouchant l'Académie en corps, on

The peut avoir que deux queftions

ne

à propofer.

I. Que lui eft-il arrivé de mémorable & qui ait contribué à maintenir, ou à illuftrer cet établissement ?

II. Quelles ont été fes entreprises, fes occupations ?

Pour ne rien confondre, je ferai mieux de traiter féparément ces deux articles, que de fuivre toûjours l'ordre des temps, qui eût fouvent troublé l'ordre des matiéres.

I.

Quand on écrit l'origine d'une na tion, ou d'une monarchie, on fait valoir jufqu'aux moindres événemens, qui paroiffent des pronoftics de fa grandeur future. Tel a été l'ufage des an ciens Hiftoriens; & c'eft, fans doute, pour s'y conformer, que M. Pelliffon

rapporte, comme une chofe très-glo rieufe pour l'Académie, la vifite qu'en

1652 elle reçut du Baron Spar, grand

Seigneur de Suéde. Mais l'eftime qu'elle s'étoit acquife dès - lors dans les pays étrangers, ne rarda pas à lui attirer une autre vifite infiniment plus honorable. Je parle de celle que lui rendit la Reine de Suéde elle-même , cette fameufe Christine, qui fe plaifoit fi fort au commerce des Savans & qui, prefque à la fleur de l'âge, préféra un loifir philofophique aux embarras de la Royauté.

Avant que de quitter la Couronne, elle avoit envoyé fon Portrait à l'Académie. On eut l'honneur de l'en remercier ; & voici fa réponse, dont l'original eft heureusement venu jufqu'à

nous.

MESSIEURS

Comme

من

j'ay fçeu que vous defirie mon Portrait, j'ay commandé qu'on vous le donnast ; &ce préfent eft doublement reconnu, par la maniére dont vous l'avez recen dans voftre célébre Académie, & parles loquentes paroles que vous avez employées

à m'en rendre grace. J'ay toujours en pour vous une estime particuliére, parce que j'en ay toujours eu pour la vertu ; &je ne doute point que vous ne m'aimiez dans la folitude, comme vous m'avez aimée fur le thrône. Les belles lettres que je prétends y cultiver en repos, & avec le loifir que je me réserve, m'obligent mefme de croire que vous m'y fere part quelquefois de vos ouvrages, puisqu'ils font dignes de la réputation où vous eftes, & qu'ils font presque tous écrits dans voftre langue, qui fera la principale de mon dezert. Je ne manqueray pas de vous en tesmoigner ma reconnoiffance, & de vous faire voir quand je pourray vous eftre utile, que je feray toujours,

MESSIEURS,

Très-affectionnée à vous fervir,

A Upfal, le 20

Juin 1654.

10

CHRISTINE.

Traverfant donc la France en 1658, elle voulut honorer l'Académie de fa préfence, mais fans pompe, & fans avoir donné le temps de fe préparer à la recevoir d'une maniére plus digne

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