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réglée & uniforme ou fans uniformité, avec-deffein ou fans deffein, pénitente ou fans pénitence, férieufe & laborieuse, ou inutile & remplie d'amufement. Je ne fai rien de tout cela, & ne defire pas même de le favoir; mais je fai bien que c'eft le meilleur & même l'unique moyen de fortir de l'incertitude où vous étes, que de bien régler votre état préfent. Il y auroit une infinité d'autres chofes à vous dire fur votre Lettre, & entr'autres fur la maxime de ne fe point diftinguer dans l'état & dans l'âge our vous êtes, qui eft merveilleulement équi voque, & qui peut être bonne & mau vaife, felon l'ufage & l'application que l'on en fait. J'en pourrai faire le fujer d'une autre Lettre; mais pour n'éten dre pas trop celle-ci je n'y ajoûterai plus rien, finon que je ferai mon poffible

pour vous procurer la connoiffance, de Madame N.... qui vous peut être très-avantageufe, parceque je ne connois. gnere de perfonne qui ait plus de vertu. qu'elle, & particulierement plus de bonté.

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LETTRE IIL

Examen de cette regle, Qu'il ne faut point que les jeunes perfonnes fe diftinguent

en rien.

A LA MEME.

'Ai cru, Mademoiselle, devoir partager en deux lettres la réponse que j'avois à faire à celle que vous m'avez fait Phonneur de m'écrire, tant pour éviter de faire un écrit plutôt qu'une lettre, que parceque ce que j'arà traiter dans celle-ci, eft fort feparé de ce que j'ai traité dans l'autre. Car le fujet que je me suis propofe, eft de vous entretenir de cette maxime fur laquelle vous me demandez mon fentiment, qui eft, dites-vous, qu'it Vous femble qu'on ne doit fe diftinguer en rien, fur-tout quand on est jeune,& qu'on n'eft point affuré de ce que l'on doit faire ; à quoi vous ajoûtez, que c'est un des endroits de votre vie qui vous embarraffe le plus.

Il est certain en géneral, que c'eft une vie non feulement permife, mais louable, que celle de ne le point diftinguer. Car toute diftinction attire l'application des hommes, leur application

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fauroit y fatisfaire à fes devoirs, fans le di ftinguer des autres en beaucoup de choses, & donner fouvent occafion aux perfonnes relâchées de nous condanner de bizarrerie,& de fe fervir à notre égard de tous les autres noms, par lefquels le mon de est ingenieux à décrier la veritable pieté. Qu'une perfonne comme vous soit auffi modefte qu'elle doit être, qu'elle ait foin de ne paller pas inutilement la vie, & de ne la pas perdre à des amufemens & à des vifites inutiles, qu'elle fe croye obligée de faire des lectures réglées, de travailler, de prier, de réparer par la pénitence les fautes ordinaires, de ne mener point une vie diffipée, je mets en fait qu'elle n'évitera point de paroître fmguliere, & de fe diftinguer des autres. Cependant il n'y a rien en tout cela qu'elle doive abandonner par la crainte des difcours des hommes. Je dis plus, qu'il n'y a rien qui foit attaché à un certain état, & qui dépende du choix que l'on en peut faire. Soit donc que vous em braffiez la condition du mariage, foit que vous demeuriez dans l'état où vous êtes, foit que vous choififficz quelque retraite dans une Maison Religieufe, avec engagement ou fans engagement, vous devez faire état que vous ferez égale ment obligée à une exacte modeftie.

& à une vie réglée, & qui ne foit pas de caprice & de fantaisie, à une vie de travail proportionné felon vos forces, à une vie de pénitence, à une vie recueillie, &que vous y aurez la même obligation d'éviter tout ce qui eft opposé à - cette vie. Si cela vous paroît étrange, ce pourroit être le fujet d'un autre entretien. Mais il fuffit de vous dire préfen→ tement qu'en quelque état que l'on foit, on eft obligé de vivre par lesprit de Dien, & non par la cupidité; qu'on est non feulement obligé d'aimer Dieu, mais de travailler continuellement à croître dans fon amour que comme on est at taqué dans tous les états de diverses tentations, on y doit résister dans tout état par une vie de priere; que comme l'on y fait toujours des fautes, on les doit tou jours auffi réparer par une vie de mortification & de pénitence. Or on ne fauroit faire tout cela, Mademoiselle, fans se diftinguer des autres dans une infinité d'occafions, parcequ'il y a très-peu de perfonnes qui le faffent, & que celles qui ne le font pas fe portent aifément à décrier celles qui le font,& à donner un air de ridicule à leur dévotion. Il faut donc regarder, Mademoiselle, la crainte de fe diftinguer comme une fort grande tenta tation dans la vie, parceque de-peur d'e

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