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AN. 1528%

parole, en lui faifant rendre Ravenne & Cervia, com-
me ils le lui avoient promis; par-là il vouloit faire en-
tendre qu'on ne devoit pas trouver étrange qu'il
ne fe hâtât pas de contenter le roi d'Angleterre
puifque ce prince négligeoit de lui faire rendre jufti-
ce par les Venitiens. Il auroit fouhaité, qu'on eût
crû que cela feul arrêtoit le jugement de l'affaire ;
mais de quelque précaution qu'il usât, Henri & Fran
çois I. furent bien-tôt informez de la négociation
que
sa sainteté entretenoit en Espagne ; ils lui en firent
faire leurs plaintes; mais elle nia conftamment qu'el-
le eût jamais pensé à se départir de la neutralité; &
pour diffiper ces foupçons, qu'elle appelloit mal fon-
dez, elle envoya en Angleterre Campana, pour af
furer de nouveau Henri de fes bonnes intentions: mais
en même-tems elle chargea cet envoyé d'un ordre
exprès à Campege de brûler la bulle dont on a
parlé, & de différer autant qu'il pourroit le juge-
ment du divorce. Campege exécuta fur le champ le
premier de ces ordres, & trouva depuis ce tems-là
de nouveaux prétextes pour le retardement des procé
dures.

Catherine,

terre, s'adref

nand.

La conduite de la reine Catherine y contribua; XLVII. elle ne négligeoit rien pour engager l'empereur, & reine d'Anglel'Archiduc Ferdinand fes deux neveux à la protéger; fe a l'empereur elle se plaignit à eux de la conduite du roi, & encore & à Ferdiplus de celle de Wolfey, leur donna avis de toutes les difficultez qu'on formoit contre fon mariage, & demanda leur affiftance & leur confeil. Ils recurent avec joïe cette occafion d'embarraffer le roi Henrî, & conseillerent à Catherine de ne jamais confentir à entrer en religion, & de ne se point relâcher de fes

droits; ils lui manderent encore qu'ils avoient affez AN. 1528. de pouvoir à Rome pour lui faire rendre juftice, & qu'au pis aller, fi l'on en venoit aux extrémitez, ils

23.

C.

Campege ex

volontaire

reçu du

pape,

fçauroient toujours foutenir les intérêts de fa fille. Cavendich. c. Catherine appuyée fur ces promeffes, refufa constam10. pag. 22. ment le divorce, & continua de vivre avec le roi comme auparavant, fans paroître ni plus grave, ni plus trifte, & ayant toujours avec lui même lit, & même table. Campege de fon côté ne ceffoit d'exhor→ ter le roi, de la part du pape, de ne point quitter la reine, eu égard au tort qu'il feroit par-là à sa réputation, & aux guerres qu'il auroit à foutenir contre l'empereur. Mais voyant que ce prince ne fe rendoit point à fes raifons, & craignant les fuites d'une telle XLVIII. affaire, il confeilla à Catherine, fuivant l'ordre qu'il horte Catheri- en avoit de fe féparer volontairement ne à fe féparer d'Henri, & de fe retirer dans un monaftere. Mais ment du roi. comme il eft difficile de quitter une couronne, quand on a droit de la porter, & de renoncer à sa liberté, quand on croit pouvoir en joüir, Catherine n'écoura point ces propofitions. Le vingt-feptiéme d'Octobre, les deux légats appréhendant de plus en plus les conféquences de fa fermeté, vinrent la trouver, accompagnez de l'archevêque de Cantorbery, de l'évêque de Londres, & d'autres prélats, & la folliciterent de nouveau d'entrer dans un couvent; mais elle leur déclara nettement, que puifqu'on pensoit à la faire entrer par force, dans un lieu où fon inclination l'auroit affez portée fi on l'eût laiffè agir librement, elle maintiendroit tant qu'elle auroit de vie, le mariage auquel Dieu l'avoit appellée; elle ajouta que les juges qu'on lui avoit donnez lui étoient fufpects, qu'ils

avoient été obtenus fur un faux expofé, qu'ils lui AN. 1528. étoient contraires, fur tout Wolfey qui ne lui avoit attiré la perfécution qu'elle fouffroit, que parce que l'empereur n'avoit pas agi pour l'élever à la papauté, qu'ainfi elle les récufoit; enfin qu'elle ne pouvoit se désister de fes pourfuites, fans faire un tort irréparable aux droits de fa fille, qui lui étoient beaucoup plus chers que les fiens; elle demanda cependant un confeil, & on lui permit de faire venir de Flandre un procureur, un avocat & un conseiller, qui vinrent en effet en Angleterre, mais qui n'y demeurerent pas long-tems, parce qu'on craignit que leur préfence n'excitât les Anglois à la révolte, à caufe des mauvais traitemens qu'on faifoit à la reine.

Pour faire voir la justice de ses prétentions, Catherine produifit la copie d'un bref, qui contenoit une difpenfe plus ample que celle de la bulle, fur la quelle les légats vouloient juger cette affaire, & qui réparoit tous les défauts de cette bulle. Le pape disoit dans la préface de ce bref, qu'Henri & Catherine lui avoient expofé, qu'ils fouhaitoient se marier enfemble, pour conferver la paix entre les deux rois, qui fans ce mariage feroient toujours divisez, & que pour cet effet, ils lui demandoient la difpenfe dont ils avoient besoin; & dans le corps du même bref, le · pape ajoutoit que, vû les raifons des expofans, il accordoit à Henri la permiffion d'épouser Catherine, quand même cette princeffe auroit confommé fon mariage avec Arthus, au lieu que dans la bulle il étoit expreflément marqué, que fuivant la fupplique d'Henri& de Catherine, le mariage de cette princeffe avec Arthus avoit peut-être été consommé, forfitan : il est

XLIX.

Nouveau bref produit fur

que la reine

fon mariage

vrai que Catherine ne produifoit qu'une copie de ce AN. 1528.bref, mais elle prétendoit que l'original étoit entre les mains des Espagnols, & ceux-ci difoient eux-mêmes qu'ils le poffédoient, & qu'ils l'avoient tiré d'entre les papiers de D. Puebla, qui étoit leur ambassadeur en Angleterre au tems du mariage de Catherine. Pour s’assurer du fait, on écrivit auffi-tôt à l'évêque de Worcester, & au docteur Lée ambaffadeur en Espagne, de chercher ce bref en ce pays-là, mais il ne paroît pas que leurs recherches ayent produit quelque chose d'utile, ni que ce bref ait été trouvé; on envoya auffi François Brian & Pierre Vannes à Rome pour le même fujet ; & ces deux agens furent suivis par les docteurs Knyght & Benet, qui devoient travailler conjointement avec eux.

L.

Propofitions

que le roi

& Angleterre

fait faire à

Rome.

Ces derniers envoyez pafferent par Paris, où Fran çois I. leur donna des lettres, par lefquelles il ordonnoit aux ambaffadeurs qu'il avoit à Rome de se joindre à ceux qui folliciteroient pour Henri.

Etant arrivez à Rome, ils rendirent ces lettres à ceux à qui elles étoient adreffées, & chercherent enfuite avec foin dans la chancellerie de Rome le bref, dont Catherine avoit prétendu produire une copie; mais leurs recherches ayant été inutiles, ils firent au pape plufieurs propofitions, qu'ils étoient chargez secretement de faire; & pour cet effet, ils firent comme s'ils parloient d'eux-mêmes. Elles tendoient principalement à trouver des expédiens pour terminer l'affaire du divorce. Ils en propoferent plufieurs fur lefquels ils confulterent, fous des noms fuppofez, les plus célébres canoniftes de Rome, pour fçavoir s'ils étoient praticables. Pour les faire goûter au pape, ils lui pro

mirent

mirent que le Roi d'Angleterre & celui de France, fe- AN. 1528. roient garder par deux mille hommes, Ravenne & Cer

via, dont il demandoit la reftitution aux Venitiens, qui la lui refufoient.

LI.

voyez d'Henr

Cette garde de deux mille hommes pouvoit bien mettre obftacle aux deffeins, que les Venitiens euf- Autres propefent pû avoir fur ces deux places, mais ne les remet- par les entoit pas entre les mains du pape, comme celui-ci le vi fouhaitoit. Les envoyez fentoient bien, qu'une telle propofition ne le fatisferoit pas pleinement, c'eft pourquoi ayant envie de la faire paffer, ils lui repréfenterent en même-tems, qu'il devoit fe défier de l'empereur plus que jamais, & ne point penser à traiter avec lui, parce que le deffein de ce prince étoit de le faire dépofer comme bâtard, d'élever en fa place le cardinal Quignonés, qu'on appelloit de Angelis, & de fe faifir de tout l'état eccléfiaftique; qu'ainsi le moyen de fe foutenir, & de fe défendre contre ces pernicieux projets, c'étoit de demeurer toujours uni aux rois de France & d'Angleterre, & d'accepter les fecours que ces princes lui offroient. Après avoir fait au pape ces propofitions, ils lui demanderent comme d'eux-mêmes, si supposé que la reine entrât en relifi gion, il donneroit difpenfe au roi pour un nouveau mariage, & ne légitimeroit pas les enfans des deux lits ou bien, fuppofé que la reine ne voulût se faire religieufe, à moins que le roi ne fît la même chofe, fçavoir, fi après que la reine auroit fait fes vœux, fa fainteté difpenferoit Henri des fiens, & ne lui accorderoit pas la liberté de fe remarier. Et comme Clement VII. étoit d'un naturel fort timide, ils lui firent entrevoir que s'il n'étoit pas favorable à

pas

:

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