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frequentes: Neanmoins la doctrine Catholique fur les Indulgences eft la même qu'anciennement. Il n'y a pas dans l'Eglife, dépofitaire de la verité, d'aujourd'hui ni d'hier: Ce qui l'a obligée à accorder plus fouvent les grands bienfaits des Indulgences, c'eft le même efprit qui l'a portée à les donner plus rarement, favoir la foibleffe prefente de fes enfans.

Tout le monde convient, qu'une des caufes legitimes de difpenfer ces graces, c'eft l'infirmité du penitent; car c'eft celle-là même qui engagea faint Paul à les donner à l'Inceftucux: fa foibleffe donna à craindre qu'un grand accablement de trif teffe ne le jettât dans le defefpoir, nè fortè abundanti triftitiâ abforbeatur ; car tout neceffaire que foit le remede de la penitence, fi l'excés ou la trop longue durée de ce remede caufe la ruïne des pecheurs en les defefperant, il en faut abre

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le tems par une Indulgence falutaire. Ne fruftrons pas l'Eglife du deffein qu'elle a de gagner les ames, & ne la faifons point tomber dans la confufion d'avoir été trompée par les artifices de Satan, di→ foit faint Paul à ce fujet : Ut non circumveniamur à fatana. Voïez, remarque S. Chryfoftome, comme cet Apôtre corrige le Corinthien ; il ne dit pas qu'il ait faic

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la penitence qu'il devoit ; mais qu'il lui Hom. 4. accorde le pardon à caufe de fa foibleffe. ad cor. On nous imputeroit, comme parloit S. Cyprien au fujet de l'Indulgence accordée aux Libellatiques, au jour du Jugement, que nous n'aurions pas eu foin de la brebis qui étoit infirme.

Ce principe étant certain, il refte à obferver en quel état étoient les Fideles,lorfque les Papes leur ont donné des Indulgences frequentes & plenieres. Baronius a remarqué, que ces grandes Indulgences n'ont pas commencé avant les Expeditions de la Terre-fainte: La caufe en étoit legitíme: c'étoit une commutation de penitence, autant qu'une Indulgence. Les exercices penibles & perilleux de la guer re compenfoient les travaux de la penitence. La delivrance des Chrétiens,gemif fans fous la captivité des Infideles, étoit un objet de piété tres digne d'émouvoir les entrailles de charité, dont l'Eglife eft remplie. Pouvoit-elle plus à propos fe relâcher de la Difcipline ancienne, que dans cette occafion? La neceffité l'a pouffee à renouveller fouvent ces entreprises, & en même tems à être indulgente; mais les hommes accoutumez à cette douceur, quoique meritée par des travaux & des perils tres-grands, curent de la peine à re

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venir aux aufteritez dures & longues imposées par les Canons. La fainte Epoufe de Jesus-CHRIST obligée avant les tems de ces Expeditions à fe départir de fa rigueur ancienne, & à n'imposer des penitences, que felon les Livres penitentiels, bien plus doux que les Canons des Conciles, fut encore obligée à caufe de la dureté des penitens, à fe relâcher de ce qui lui étoit refté de la feverité canonique. Les penitences devinrent arbitraires au x.Siécle: Les Miniftres des Autels

propofoient aux penitens les Canons, afin de leur faire connoître ce que meritoient leurs pechez; mais ils n'ofoient les y foumettre, de peur que ces hommes infirmes & lâches n'abandonnaffent tout-à-fait la penitence: Quelquefois ils en trouvoient d'affez forts pour embraffer la penitence canonique, mais il faloit que cela vînt de leur volonté. Tous les autres recevoient pour penitence des pelerinages des difciplines, des recitations de Pleautiers, des genuflexions réiterées, des mef fes à faire dire, des pauvres à nourrir, des contributions aux Eglifes, & autres pratiques femblables, que les Confeffeurs trouvoient avoir quelque rapport aux anciens reglemens.

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Aprés que les penitens eurent com

mencé de racheter une partie de leur penitence, ce qui arriva au 1x. Siécle; & qu'ils pûrent aux fuivans la racheter toute entiere, les Confeffeurs n'étoient pas les maitres de les foumettre à la rigueur des Canons; il leur faloit laiffer l'option de la penitence canonique ou du rachat : Non videtur,quòd pro peccatis occultis debeat poenitens aliquis arctari nolens ad aliquod fatisfactionis genus, fed redimere poteft, vel aliter compenfare: Ce font les paroles de Pierre de Poitiers, Chanoine de faint-Victor, qui écrivoit fon Penitentiel du tems d'Innocent III.

Les chofes infenfiblement arrivées à ce point, que pouvoit attendre l'Eglife des penitens, que foibleffe? Portez ainfi au relâchement, le moïen de les retenir? Il eft inconcevable avec quelle rapidité l'homme va au mal, lorfqu'il a une fois lâché la bride; on arrefteroit auffi-tôt un torrent: Il étoit donc comme impoffible de faire revivre les anciennes loix. Le tems auquel commencerent les Indulgences plenieres & frequentes, étoit ainfi un tems de douceur, une faifon de condescendence. Il faloit faire revivre la devotion dans les

Fideles, rappeller à la penitence les pecheurs: On y a emploïé le fecours des Indulgences, l'on a remis aux pecheurs une

partie de leur penitence, afin qu'ils accompliffent le refte; On la leur remit toute entiere pour des actions, des aumônes & autres pratiques, qui femblent modiques, mais dans la vûë de porter les Fideles à la contrition, à la confeffion de leurs pechez, aux fruits de penitence & au commencement d'une nouvelle vie. Les fouverains Pontifes ont voulu fecourir & aider leur foibleffe; ils fe font abbaiffez pour les relever. Le pecheur, aprés être tombé, étoit une mêche fumante & un rofeau à demi brifé ; la charité ne permettoit pas d'achever de rompre ce rofeau & d'éteindre cette mêche: Mais en s'abbaiffant, ils ne font pas tombez, & ils en ont relevé plufieurs, qui, étant retournez à une meilleure vie, y ont perfeveré.

CHAPITRE XII.

où l'on continue à expliquer le Dogme Ecclefiaftique touchant les frequentes Indulgences plenieres.

ON n'a jamais douté dans l'Eglife

que la contrition vehemente ne fup-

plcât aux exercices laborieux de la peni

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