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perdre, et fi connu, que tout le monde applaudira à la juftice que Monfieur DE SANTEUL lui a rendue, en le mettant au nombre de fes intimes amis. Monfieur DE SANTEUL parloit alors de celle du fouffet de Chantilly.

A l'occafion de ce Soufflet, mis en Vers par celui qui l'a reçu, je me fers des mêmes raifons dont il a voulu confondre les devots & les fcrupuleux, qui vouloient qu'il condamnât à un oubli éternel une Piece, qui alloit immortaliser un affront qu'il avoit reçu. ( C'est ainfi qu'ils ont appellé une plaifanterie d'une Augufte PRINCESSE.) Voici de quelle maniere Monfieur DE SANTEUL fe juftifie fur ce fujet, auprès d'un de tes amis. Je vous envoye le Soufflet célebre, & donné par une PRINCESSE fans fcandale ; les devots ne l'interpréteront pourtant pas de même ; ne foyez pas de leur nombre. Malheur à moi, fi je fcandalifois les petits enfans Potius collo appenderem molarem lapidem. C'est un jeu d'esprit, on se delaffe quelquefois. Un Peintre fait un payfage, après avoir peint les faints Myfteres.

Ces mêmes devots lui ont encore deux

mois avant sa mort, reproché qu'un Poëte Chrétien dont l'Eglife avoit adopté les Hymnes pour les chanter, même pendant fa vie, dans nos Eglifes, devoit s'abstenir de travailler pour des petits Chiens (a); qu'il profanoit les talens qu'il avoit reçus du Ciel; qu'il ne devoit chanter que les Myfteres de la Religion, ou les Victoires de LOUIS LE GRAND,qui en étoit par tant de titres le Protecteur & l'appui. Il répond à ces reproches par des exemples, en écrivant à un de fes amis :

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Je vous envoye une Chienne de Piece, ou une Piece de Chien fur le petit Chien de Madame la PRINCESSE, les amours de M. le PRINCE; cela peut-être vous fcandalifera, mais fouvenez vous que :

·S. Gregoire de Nazianze a fait des Fables. Synezius Pere Grec, a fait l'éloge de la Calvitie.

Virgile a fait Culex, le Moucheron.
Wida Evêque d'Albe, a fait le jeu des

Echets.

Un autre Pape a fait Pfittacus.

Rien n'eft ici profane; c'est un jeu

(a) Monfieur de SAN- tit Chien de fon Altefle SeTEUL au mois de Juin 1697. reniffime Madame la PRINa fait à Chantilly la requête CESSE. & la destinée de Pluton pe

d'esprit, pourquoi ne pas écrire ce que l'on dit toujours à des petits Chiens qu'on careße fans fcandale?

Il ne faut que lire les deux lettres écrites à leurs Alteffes Sereniffimes, Monfeigneur le PRINCE (a), & Monseigneur le Duc DU MAINE (b), & l'on reconnoîtra qu'il n'a travaillé fur ce fujet, que parceque Monfieur le PRINCE l'y a engagé ; & qu'il ne s'y eft appliqué qu'à CHANTILLY, où les Poëtes animés par les beautez de cet aimable fejour, ont toûjours pris une honnête & agreable liberté ; Doctis ubi fas dulcè infanire Poëtis, c'eft ce qu'il dit dans la Piece LXVII. de ce Recueil. (c)

Monfieur DE SANTEUL ne s'eft pas feulement rendu recommandable par fes Ouvrages : tant de familles honteufes qu'il a fait fubfifter dans les années les plus difficiles; tant de pauvres malades qu'il alloit confoler par les fecours qu'il leur donnoit, & par les pieux fentimens que fa Religion lui infpiroit, pour les exhorter à la patience, & à une foumiffion aveugle aux ordres de Dieu, font autant

(a) Page 25. Tome II. de ce Recueil.

(b) Page 33. Tome II. (c) Page 12. Tome II. ã iiij

de voix qui publient fa charité. Ses frayeurs à la vue des jugemens de Dieu, font des preuves de fon fond de Religion. Combien de fois n'a-t'il pas dit dans l'amertume de fon coeur, qu'il vouloit facrifier toute fa reputation, & les applaudiffemens des hommes à une noble envie de faire fon falut, & operer dans une affreuse folitude les merveilles d'une auftere penitence Il avoit renouvellé ces genereux deffeins trois mois avant fa mort, dans la retraite qu'il fit à l'Abbaye de la Trappe; & il auroit, fi Dieu lui en avoit donné le tems accompli la promeffe folemnelle qu'il en avoit faite.

La Religion, qu'il a honorée par fes Hymnes facrées que l'on chante dans nos Temples, trouvoit en lui un cœur docile, humble, fimple, & foumis, au milicu même dès applaudiffemens qu'il recevoit de toute l'Europe. Il s'élevoit au-deffus de lui même, quand il s'entretenoit des Saints Myfteres. Et dans quelques compagnies qu'il fe trouvât, il fouffroit, quand les devoirs de fa Religion n'étoient pas remplis ; ce qu'il écrivit dans fon dernier voyage de Chantilly, au mois de Mai 1697. à M. PINEL DE LA

MARTELLIERE, que j'ai pour garant de tout ce que j'avance ici, en est un preuve: Je ferai, (dit-il) pour la Fête de l'Afcenfion, & me rendrai à Saint Victor: car je ne veux pas oublier mon devoir, & j'ai celui plus grand 'PRINCE à fervir que qui m'appelle ici. "C'est ici le Paradis Terreftre tous les PRINCES y font, & j'ai· l'honneur de manger avec eux, & je m'en retire fouvent, pour fonger que les vanités passeront comme une fumée.

Il a toûjours reffenti même jusqu'au dernier moment, cette terrible verité lorfqu'il dit à Monfieur l'Evêque d'Autun, qu'il étoit aujourd'hui au Louvre & demain au Tombeau. Qu'une mort fi precipitée nous a derobé de nobles fentimens & de pieufes exhortations! C'étoit dans fes infirmités qu'à l'exemple du grand Saint Paul, il parloit de Dieu & de la Religion avec une élevation qui avoit quelque chofe de Divin.

De fi nobles vertus qu'il a chrétiennement pratiquées, font bien efperer que Dieu lui aura fait cette mifericorde qu'il a toûjours implorée avec tant d'ardeur & de componction.

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Comme je n'ai rien autre chose à dire

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