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une ligne.

L travailla pour vivre. Voilà la vie de Le Sage contée en quatre mots dans le goût de ce docteur Zeb qui fit tenir l'histoire universelle en

Alain-René Le Sage naquit à Sarzeau, dans l'île de Rhuys, le 8 mai 1668, de maître Claude qui y avait un préfidial, & de demoiselle Jeanne Brenugat, femme légitime de maître Claude.

Dès qu'Alain fut d'âge à apprendre, il fut mis au collége de Vannes fous le recteur Brochart, .ex-jésuite, bon pédagogue. Mais il n'avait pas dix ans quand, en 1677, fon père le prit par la main pour conduire la bonne

Jeanne Brenugat, décédée le II septembre, jufqu'à la chapelle de Kerlen, dans l'églife paroiffiale de Sarzeau où elle fut inhumée. Puis, tout vêtu de noir, l'enfant retourna à Vannes, & après cinq années confumées fur les inftitutions de Quintilien & les vies de Plutarque, il dut reprendre le chemin de la chapelle de Kerlen où maître Claude allait rejoindre fa femme.

Il paraît que le défunt laiffait quelques biens à fon fils unique. Mais l'administration de ces biens fut remise à Gabriel Le Sage, frère de feu Claude, qui ruina fon pupille.

L'orphelin vint Paris vers 1690 pour fuivre, à l'Univerfité, les cours de droit & de philofophie. Nous le perdons dans la grande ville. Mais nous pouvons croire qu'il ne s'occupa pas que du Praticien françois & des règles du fyllogifme. Il avait l'efprit alerte, le corps difpos, la mine aimable. On dit qu'une dame de qualité s'aperçut de tout cela. On parle de galanteries; mais en fomme on ne fait rien de fes fredaines d'écolier. S'il les avait contées, elles feraient dans toutes les mémoires, & quelques jolies figures de péchereffes, bien fimples & pourtant immortelles, fortiraient

pour nous d'un vieux livre à tranches rouges. Mais les hommes qui, comme Le Sage, s'oublient fans ceffe, n'écrivent point leurs confeffions. Il y a bien de l'orgueil à s'humilier publiquement.

D'ailleurs, il en finit de bonne heure avec les aventures de jardins publics. Un amour férieux le prit pour le garder pendant toute fa vie.

Tandis qu'il demeurait dans cette rue du Vieux-Colombier où La Fontaine, Chapelle & Racine fe réuniffaient chez Boileau pour rire、 enfemble des fots, c'eft-à-dire de leurs ennemis, Le Sage, âgé alors de vingt-fept-ans, faisait de fréquentes vifites chez certain bourgeois de la Cité, père d'une belle & honnête jeune fille. Elle fe nommait Marie; il l'aima & fut aimé d'elle. Le reste du roman eft fimple; il est tiré tout entier des regiftres des paroiffes.

Le 17 août 1694, Le Sage obtint de l'archevêque de Paris une difpenfe de publication de bans pour époufer Marie Élifabeth Huyard, fille d'André Huyard, bourgeois de Paris, & de Marie Carlos, demeurant l'un & l'autre fur la paroiffe Saint-Barthélemi.

En vertu d'une nouvelle difpenfe, accordée

le 27 septembre de la même année, le mariage fut célébré le jour suivant dans l'église SaintSulpice, devenue à cette date la paroiffe des Huyard, comme c'était déjà celle de Le Sage.

Marie avait vingt-deux ans, Alain-René, vingt-fept ans. Il était avocat au Parlement. Il n'avait point de caufes, &, grâce à l'oncle Gabriel, pas un fou vaillant. Marie avait apporté en dot fa jeuneffe, fa beauté, fa vertu. Ils étaient bien obfcurs, ces deux pauvres enfants, & tellement perdus dans le royaume, ́au milieu de la foule des bourgeois vêtus de brun, qu'il eft impoffible aujourd'hui de retrouver leur trace. Danchet, camarade d'AlainRené à l'Univerfité, l'ami Danchet, bon humanifte, excellent cœur, fréquenta le jeune couple; mais, befogneux auffi, il s'en fut profeffer à Chartres.

On croit qu'Alain-René s'en alla avec fa femme du côté de Vitré & qu'il y fut fecrétaire d'un fermier général dans les aides ou dans les gabelles. Ce qui eft certain, c'eft qu'il était de retour à Paris en 1698, & logé proche cette église Saint-Sulpice où il s'était marié & où il fit baptifer, le 24 avril, fon fils Jules-François. Il avait, dans la capitale, un protecteur dont le

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