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ODE

DE M. MALHER BE,

A MONSIEUR DE VILLENEUVE,. Seigneur de la Garde du Freinet. & de la Motte,

Sur fon Hiftoire Sainte.
LA Garde tes doctes Ecrits,

Montrent les foins que tu as pris
A fçavoir toutes belles chofes ;
Et ta preftance & tes difcours
Etalent un heureux concours
De toutes les graces, écloses.

DAVANTAGE tes actions
Captivent les affections

Des cœurs, des yeux, & des oreilles,
Forçant les perfonnes d'honneur

De te fouhaiter tout bonheur
Pour tes qualitez nompareilles.

Tu fçais bien que je fuis de ceux
Qui ne font jamais paresseux
A louer les vertus des hommes,
Et dans Paris en mes vieux ans
Je paffe à ce devoir mon tems,
Au malheureux fiecle où nous fommes,

MAIS las! la perte de mon fils, Ses Affaflins d'orgueil bouffis Ont toute ma vigueur ravie ; L'irgratitude & peu de foin

Que montrent les grands au befoin; De douleur accablent ma vie.

Je ne defifte pas pourtant

D'être dans moi-même content
D'avoir bien vêcu dans le Monde,
Prifé (quoique vieil abbatu )
Des gens de bien & de vertu,
Et voilà le bien qui m'abonde.

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Nos jours paffent comme le vent,
Les plaifirs nous vont décevant,
Et toutes les faveurs humaines.
Sont Hemerocales d'un jour,,
Grandeur, Richeffes & l'Amour,
Sont fleurs périflables & vaines..

Nous avons tant perdu d'amis,
Et de biens, par le fort transmis
Au pouvoir de nos adversaires;
Neantmoins nous voyons du
D'autruy les débris & la mort,
En nous éloignant des Corfaires.

port

AINSI puiffions-nous voir long-tema Nos efprits libres & contens, Sur l'influence d'un bon Aftres; Que vive & meure qui voudra, La conftance nous refoudra Contre l'effort de tout defaftre

LE Soldat remis par fon Chef,
Pour fe garantir de méchef,,
En état de faire fa garde,
N'oferoit pas en déloger

Sans congé, pour le foulager;-
Nonobftant que trop il luy tarde..

CAR s'il procedoit autrement,›
11 feroit puni promptement,
Aux dépens de fa propre vie.
Le parfait Chretien tout auffi
Créé pour obéir ainfi,
Il tient fa fortune allervie.

It ne doit pas quitter ce lieu Ordonné par la Loy de Dieu; Car l'ame qui luy eft remise Fellone,

ne doit pas fuir:

Pour fa damnation encourir,

Et d'être en l'Herebe remife,

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DESOLE', je tiens ce propos, Voyant approcher Atropos,

Pour couper le nœud de ma trame; Et ne puis, ni veux l'éviter,

Moins auffi la précipiter,

Car Dieu feul commande à mon ame.

NON, Malherbe, n'eft pas de ceux Que l'Esprit d'Enfer a déçus, Pour acquerir la Renommée De s'être affranchis de prifon Par une lame, ou par poifon, par une rage animée.

Θυ

Au feul point que Dieu preferira, Mon Ame du corps partira,

Sans contrainte ni violence;
De l'Enfer les tentations,
Ni toutes mes afflictions

Ne forceront point ma constance.

MAIS, la Garde, voyez comment

On fe divague doucement,

Et comme notre efprit agrée,
De s'entretenir près & loin,
Encor qu'il n'en foit pas befoin,
Avec l'objet qui le recrée.

J'AVOIS mis la plume à la main,
Avec l'honorable deffein

De louer votre fainte Hiftoire;
Mais l'amitié que je vous dois,
Par delà ce que je voulois,
A fait débaucher ma mémoire.

Vous m'étiez prefent à l'efprit,
En voulant tracer cet écrit,
Et me fembloit vous voir paroître
Brave & galant en cette Cour,
Où les plus hupez à leur tour

Tâchoient de vous voir & connoître,

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MAIS ores à moy revenu
Comme d'un doux longe advenu,
Qui tous nos fentimens cajole;
Je veux vous dire franchement,
Et de ma façon librement,
Que votre Hiftoire eft une Ecole.

POUR moy en ce que j'en ai veu,
J'affleure qu'elle aura l'aveu-
De toutexcellent perfonnage:
Et puisque Malherbe le dit,
Cela fera lans contredit,
Car c'eft un très juste présage,

Τουτι

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