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Par tel mouvement qu'il vous plaît
Faites connoître fa bévûë

A qui vient à tout coup repeter ce qu'on fçair,
Il fe trouble, il se déconcerte,

A peine a-t-il ouvert le bec
Que travaillant à pure perte

Vous le mettez bien-tôt à fec.

Je me fens tranfporté d'une douce manie.
Suppofons-nous au plus fort des hivers
Autour d'un feu rangez en bonne compagnie
Que le fâcheux femble avoir dans fes fers.
Si-tôt qu'il entre fur la scene,

Qu'on l'aperçoit regrattant de vieux faits,
Sans raifon dans l'efprit en enfoncer les traits;
Le monde fourdement s'agite & fe demene,
Et le dégoût commun tenant lieu de fignal
On fe défend tant bien que mal.

L'un prend la pelle, & l'autre les pincettes,
Le premier nous donne le ton.

Les chenets, les carreaux lui fervent de trompettes
Qu'il fait jurer de la belle façon;

L'autre égratignant un tifon

Forme un nuage de bluettes.

L'un par les pieds ébranle la maifon,

L'autre à beaux coups de poing fecoue une cloifon.

Les

Les uns avec leurs clefs imitant des fonettes
Rendent notre caufeur auffi fot qu'un oifon;
D'autres par des écrans, en guife de raquettes,
Rejettent à grands cris la balle au compagnon.
L'un rencontrant fous fa main des mouchettes
De l'étui fait un violon ;

L'autre par defefpoir en figne d'union,
Remuant fes deux bras, comme des girouettes,
Fait du droit un archet, pour racler le garçon;

Ou

pour montrer le cas qu'on fait de fes fornettes L'index de fa main gauche, entrant en rang d'ognon,

Frotte l'autre de même nom,

Plus vite qu'un tambour n'agite ses baguettes,
Comme un navet que racle un marmiton. ́
Tous pour biffer le conte hors de faifon
Trouvent dans leur courroux des armes toutes prêtes,
Et du parleur tirent raison,

Bernent fes dits ufez comme vieilles gazettes.
Enfin traits goguenards y tombent à foifon.

Ciel! quelle fimphonie! ah ! quel jeu ! quelle fête
Dites à la plus fortè tête

De faire ferme & tenir bon.

Nous avons le champ libre à la fin de la guerre ;
Et muet ainfi qu'un poiffon

Le redifeur tombe par terre,
Perdant le fil de fa chanfon,

F

Et comme frappé du tonerre
Eft plus traitable qu'un mouton.

Des Cotins, à cette fatire,
Gronderont, que l'on faffe une neceffité

De donner à ce qu'on veut dire

La grace de la nouveauté.

Qui vous parle d'un fait trop tard pour vous l'apprendre,

Ou croit apprendre un fait dont il vous a parlé,
Saus pitié fera-t-il rack ?

Une hiftoire deux fois ne peut-elle s'entendre
Eh! quoi? la bonne intention

De vous plaire & de vous inftruire
A tout homme doit-elle nuire
La régle eft fans exception?

De la focieté vous troublez l'harmonie

Fi des douceurs d'aucune compagnie s
Si tous les membres différens

Sont l'un de l'autre érigez en Tyrans.
Viens-je donc fans cartier & fans miféricorde
Jetter dans l'univers la pomme de difcorde?
Je ne m'y trouve aucun penchant,
Purgeons-nous d'un pareil reproche,
Dans la juftice ainfi me retranchant,

Je vai me prouver moins mêchant,

Mais donner aux caufeurs encore un tour de broche

Or voici quelques Loix, qu'adopte l'équité,
Un Officier de la Raclure,

S'il ne balance & ne mesure

Les inconveniens avec l'utilité,

A fon art fait toujours injure.
Ua fait paré d'un agrément nouveau,
D'une circonftance inconnuë,

Ne doit jamais être mis à niveau
D'un autre tout d'une venue;
Mais une hiftoire toute nuë,
Qui reparoît fur le bureau,

Fut-ce une fois, raclez, tirez-la de ma vûë,
Un objet ignoré de plus de la moitié
Du cercle dont on fait partie,

Aux Racleurs doit faire pitié.
L'ignorance d'autrui lui fert de garentie;
Le foible doit ceder au fort.

Qu'on renverse le cas, les Racleurs n'ont pas tort,
Celui qui craint, par défaut de memoire,
De ternir un fujet en le remaniant,

Qui tient le dé d'un air modefte & défiant,
Eft à l'abri de tout déboire.

Deux mots de préambule operent cet effet.

Sa fureté vient de fa méfiance,

Son refpect éteignant tout de fir de vengeance,

Vous demande un double bienfait...
Comme c'eft malgré lui qu'il erre,
Vous lui devez en bonne guerre,

S'il va contre la loi, remontrer fes rigueurs,
Il prend d'abord le parti du filence >
Et ce nouveau trait de prudence-
Emouffera les ongles des Racleurs.
Que fi pour ménager fa honte,

On lui laiffe enfiler fon conte,
Parlat-il à plus fins que foi,

Il n'aura pas les gans, ce feroit trop de gloires
Mais pour prix de fa bonne foi

Il mérite du moins le plaifir de le croire.
Je tourne la medaille & change de leçon :
Homme qui de fon fac croit tirer piece rare.
Et fe payant de la façon

Vous rançonne, fans dire gare."

Ji c'eft gros Jean qui montre à fon Cure' Je le livre aux Racleurs ; qu'il en foit reviré, Que d'une falve générale

De prime abord on le regale ;

Puis dans fon corps par maint brocard
Lui faifant rentrer la parole,

Qu'll foit inftruit à fon dam un pew tard

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