PREFAC E.

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E favorable accueil que le Public a fait aux differens Recueils de Pieces fugitives qui ~ont paru jufqu'icy, faifoit souhaiter aux Sçavans que quelqu'un entreprit la continuation de ces ouvrages. Il ya quelques années que j'avois conçu le deffein que j'execute aujourd'hui, & l'apprehenfion de n'être pas fecondé dans mon projet, qui ne peut être facilement executé par un homme feul, me l'avoit prefque fait perdre de vûë. Mais depuis qu'un grand nombre de Sçavans, tant de cette Ville que des Provinces, qui m'honorent de leur bienveillance, & dont les noms, s'il m'étoit permis de les nommer, donneroient beaucoup de

relief à cet ouvrage, m'ont offert genereusement de me fournir des Differtations fur differens genres de Litterature, ou qu'ils ont faites eux-mêmes, ou qu'ils poffedent manuscrites dans leurs Bibliotheques, qui renferment pour la plupart des threfors confiderables en ce genre, me trouvant en état de foutenir dans la fuite les engagemens que je contracte aujourd'huy avec le Public, j'ay cru lui faire plaifir de ne pas differer plus long-tems à lui presenter cet effay.

Mon but principal eft de recueillir les petites Pieces en tout genre de Litterature, tant de Vers que de Profe, compofées par les Sçavans du dernier fiecle ou par ceux qui font aujour d'hui l'ornement de la Republique des Lettres, foit qu'elles aïent déja été imprimées, foit qu'elles foient demeurées ma

nufcrites; fans prétendre neanmoins donner l'exclufion à de plus anciennes. Je ferai très fcrupuleux fur le choix des Pieces déja imprimées, & je n'en donnerai-point, 1°. qui n'ayent eu l'approbation generale des Sçavans, foit par les découvertes utiles qu'elles renferment, foit par la fingularité des faits, foit par l'élegance, la politesse & l'agrément du discours; 2°. qui ne foient devenuës rares, ou qui ne fe trouvent que dans des Recueils confiderables, que peu de Sçavans font en état d'acquerir; & où, quand ils les poffederoient, elles font pour ainfi dire perdues pour eux. Les Pieces qui ne feront pas marquées à ces caracteres, feront laiffées dans l'obfcurité qui leur convient. A l'égard des ouvra ges manufcrits, je ne me rendrai pas fi difficile, fi l'on ex

cepte les pieces d'Eloquence, comme Poëmes, Harangues, &c. qui ne font communément eftimables que par l'élegance: ou la beauté du tour, la nobleffe ou l'énergie des pensées : tout ce qui renfermera quelque recherche utile, quelque experience nouvelle, quelque point: de critique ou d'hiftoire, ap-. puyé fur de nouvelles preuves, fera admis. Lors qu'une Differ tation fera écrite d'un ftile bas, obfcur, ou qu'il n'y aura pointd'ordre dans les preuves; je ne refuferay pas, i l'Auteur y confent, de donner tous mes foins pour la rendre digne du Public, finon je la ferai paroî tre dans le même état dans. lequel l'Auteur me l'aura remife. Les perles ne perdent rien de leur valeur pour n'être pas enchaffées dans une matiere précieuse.