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IvIL. Majefte & Meffieurs fes Miniftres, des excufes 1627. & raifons que vous me propofez. Au reste, je dois rendre compte de toutes mes actions, non feulement au Sereniffime Roy, máis encore à ceux de fon Confeil, qui m'ont d'autres fois regardé d'affez prés; l'ay d'ailleurs mon Confeil avec moy, fans qui je ne fais rien; Nous sommes tous étrangers; le manque de paroles & de memoire. Ie vous prie, Meffieurs, donnez-moy vos propos par écrit, afin que j'en fasse un rapport suffifant & veritable, vous aurez du temps à le faire; car vous voyez mon Armée en Bataille, dont il me faut tout prefentement faire la reveue avec Monfieur de Soubife, fans l'avis & confeil duquel le Roy mon Maître m'a défendu de rien entreprendre, & commandé d'en dépendre en tout &par tout. Sur cela ils fortirent tous. Et quant aux Deputez, ils furent conduits à bord de l'Amiral, regalez de force confitures & rafraîchiflemens & virent les plus beaux Vaiffeaux du monde.

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Le Dimanche 25, fur les dix heures du matin, le Maire manda chez luy les Commiflaires pour le Confeil: où fut oliy le Sieur Genneteau, envoyé audit Maire de la part des Deputez en l'Armée Angloise, qui apporta des Lettres de leur part, pour avoir permifion de donner leur Creance par écrit, comme le Duc de Buckinghant la leur avoit demandée. Ils envoyoient aufli Copie de ce qu'ils en avoient arrété & dreffé entr'eux deux. Le Confeil eftima qu'on ne le pouvoit refufer, puis même que l'on avoit requis en même forme celle du Sieur Becher, qui l'a

voit fignée de fa main. On envoya donc ce Iv11. Pouvoir aufdits Sieurs Des Herbiers & 1627. Goyer, & une Recommandation particuliere, pour ftipuler la liberté de l'entrée & iffuë de la Ville à toutes fortes de Marchands.

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Ce même jour l'Armée Angloife commenşa de marcher en Bataille. Il y avoit huic Bataillons de vingt-cinq hommes de front & foixante de tile, & ils pouvoient être quelque neuf mille hommes de combat au plus fans le Regiment retranché à Sablanceau; ils laifferent le Fort de la Prée, & le mépriferent, ce que le Sieur de Thoiras ne croyoit &ne defiroit pas, d'autant qu'il eût bien voulu avoir le lorir de travailler à sa Citadelle. Ils firent un grand détour vers Sainte Marie, & vinrent camper tout contre le Bourg de la Flotte. Aucun des Soldats ne fe débanda, & ils demeurerent tous dans le Camp fans entrer audit Bourg,,par le bon ordre qu'on y mit. Seulement le Duc de Buckinghant, 3 Monfieur de Soubife, & le Sieur de Loudrieres, y eurent des Logis marquez; mais ils coucherent tous dans leur Camp avec les Soldats.

Ileft icy à confiderer, touchant ledit Fort de la Prée & la Citadelle, que plufieurs re marquerent que ledit Duc de Buckinghanty fit deux fi grandes & fi importantes fautes, qu'elles furent la cause de fa ruine. La premiere, En ce qu'auffi-toft apres fa defcente an ladite Ifle, & la défaite du Sieur de Thoiras, & fa retraite à la Citadelle, il ne l'y avoit pas poursuivy vivement; veu qu'infail

IVIL. liblement il l'eût enlevée ; d'autant que de 1627. vant être compofée de quatre grands Bastions, avec trois Demy-lunes au devant de fes Courtines, la quatriéme fe perdant dans la Mer, & de quatre grands pieces à cornes au devant de ses Baftions, de grands Foflez à fond de cuve taillez dans le roc, de Faufles Brayes dans tous les Corps, & un Chemincouvert bien flanqué fervant de Contr'efcarpe tout autour, Elle n'avoit d'élevé, lors qu'il arriva dans ladite Ifle, que les quatre Baftions à demy revétus, & les trois Demylunes qui étoient devant fes Courtines, & qui en quelques endroits n'étoient que tracées: & les Foffez, en plufieurs lieux, n'étoient que d'environ une toife; & la porte n'étant pas parachevée, étoit fi ouverte, que dix ou douze hommes y pouvoient entrer de front. D'ailleurs elle étoit mal fournie de vivres & des autres chofes neceffaires, lef quelles, durant ce delay, on y porta jour & nuit, tandis qu'auffi on travailloit à rempater & fortifier les lieux foibles. La feconde faute qu'il fit, fut de n'avoir pas en paflänt pris ledit Fort de la Prée, comme il luy étoit fort facile, parce qu'il n'avoit que quatre petites Tenailles imparfaites; veu que d'ice luy, dans la fuite, luy vint tout fon mal, & la delivrance de la Citadelle,par les Troupes du Roy, qui defcendirent là à plufieurs fois, comme il fera dit cy-deffous.

Il eft auffi à noter que le Sieur le Chantre, Pafteur dudit Bourg de la Flotte, haranguant le Duc de Buckinghant,& luy parlant

avec quelque affectation, en faveur des Ca- I vIL. tholiques Romains, le Duc luy répondit, 16276 Qu'il ne faifoit point de diftinction de Religion; Que le Roy fon Maitre l'avoit envoyé pour fau ver ceux de la Religion, & non pour perdre les Catholiques.

En ce même temps il fut propofé au Con feil, par quelques particuliers de la Rochel le, & quelques Marchands de Marans, qu'à leurs perils & fortunes ils feroient venir nombre de vins & de bleds dans la Rochelle; aux conditions,.qu'en cas que la Ville n'en eût pas affaire pour le public, il leur fût permis de les diftribuer aux particuliers à prix taifonnable; & avenant que les uns & les au tres n'en euflent pas befoin, & qu'il fe fift une Faix, ils pûffent les tranfporter en tels lieux qu'ils aviferoient, Cette propofition fut fort goûtée par la plus grande part du Confeil, & jugée fort utile pour le bien de la Ville & du public: Mais quelques-uns des principaux àqui l'intereft particulier touchoit plus que celuy du general, dautant qu'ils avoient quelques vins à vendre, & efperoiét une bon ne vendange, s'y oppoferent fortement pour ce qui étoit des vins, difant que ce feroit enfraindre les Privileges que leurs peres avoient gardez fi religieufement de pere en fils, & par ce moyen rendre les vignes du Gouvernement inutiles; & ainfi concluoient qu'on n'admit point leurs offres, finon au re-gard des bleds. Les autres remontrerent fur cela, que deux raifons empéchoient qu'ils Ellent ce party pour les bleds feuls; Pune,

IvIL. qu'ils y perdroient, & n'auroient esperance 1627. de fe recompenfer que fur les vins'; Pautre,

qué s'ils enlevoient les bleds fans acheter des vins, la chofe feroit fujette à foupçon ; veu qu'en Hollande, pour laquelle ils feindroient charger, on a plus befoin de vin que de bleds; Qu'au fond, pour def-interreffer la Ville ils offroient un écu pour l'entrée de chaque tonneau. Nonobftant ce qu'ils purent dire, les intereffez prévalurent, reprefentans la puiffance de l'Anglois, qui étant proche d'eux, à toute heure qu'ils voudroient leur envoyeroit des bleds, vins. & autres provifions & commoditez plus qu'il n'en faudroit. Ce mauvais Confeil coûra bien cher enfuite.

Le Lundy 26, le Confeil fut tenu au Logis du Duc de Buckinghant, & les. Deputez y ayant eté dépêchez, s'en retournerent à la Rochelle. L'Armée marcha l'apres-dînée, & alla camper à la portée du canon de la Citadelle, fans qu'on fift aucune fortie, dont on difoit que le Sieur de Thoiras s'étoit neante moins fort vanté.

Les fufdits Deputez de retour à dix heures du foir, le Mardy 27 au matin, ils firent leur rapport avec grande fatisfaction de tous. Quant à la liberté du trafic & la delivrance des Navires arrétez, ils dirent Que ledit Duc de Buckinghant leur avoit dit,

il deferoit leur faire tout plaifir, & leur donner plus mêm mes qu'ils ne fcauroient demander: Mais qu'ils étoient fur le commencement d'une grande affaire, ayant encore l'Ennemy fur les

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