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'Iffoudun fuffent rafées; mais quel- FRANÇOIS qués Seigneurs firent changer cet ar- JUNIUS rêt, principalement parce que Du Jon étoit fnfpect de Lutheranifme depuis plus de vingt-quatre ans.

Son fils François Du Jon, plus coti nu fous le nom de Junius, fut élevé avec beaucoup de peine; & plufieurs maladies qu'il eut dans fon enfance firent fouvent defefperer de fa vie. Lorfqu'il eut cinq ans, fon pere com mença lui-même à lui apprendre à li fe, & lui donna enfuite un Précep teur. A l'âge de douze, on l'envoya aux écoles publiques, où il fit bientôt de grands progrès. Malheureufement il eut à faire à des Maîtres bar bares & fans raifon, qui le maltrai toient continuellement; mais ce qui auroit dégoûté un autre, ne faifoie point d'impreffion fur lui; l'amour qu'il avoit pour les Lettres l'animant à fupporter avec patience leurs cruels

traitemens.

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Ses études Académiques finies, il s'apliqua à la Jurifprudence fous Fran çois Duaren, Hugues Doneau, Antoine Conte, & Louis Ruffard, pendant l'ef pace de deux années; au bout def

FRANÇOIS quelles ayant appris que le Roi de JUNIUS. France envoyoit une Ambaffade à Conftantinople, il voulut profiter de cette occafion pour faire ce voyage. Il fe rendit dans ce deffein à Lyon, mais. il y arriva trop tard, l'Ambaffadeur en étant déja parti. Ce contre-temps lui fit prendre le parti de demeurer dans cette ville, pour attendre une autre occafion plus favorable, & it s'appliqua en l'attendant, à l'étude & à la lecture avec une ardeur infatigable.

Il eut l'avantage de faire alors con noiffance avec Barthelemi Anneau fon compatriote, qui étoit Principal du College de cette Ville, & qui lui donna de bons confeils fur la maniere dont il devoit fe conduire dans fes études. Junius fe livrant au goût qu'il fe fentoit pour tout ce qui pouvoit fatisfaire fa curiofité, lifoit tous les livres qui lui tomboient fous la main, & fans fe fixer à aucune fcience en particulier, paffoit continuellement de l'une à l'autre; Annean lui reprefenta que c'étoit le moyen de ne fçavoir rien à fond, & qu'il falloit avoir dans fes études un but fixe au

quel on rapportât tour. Cet avis fit F. Juimpreflion fur Junius, qui en profita, NIUS. & s'en trouva bien dans la fuite.

Pendant fon féjour à Lyon il fe vit expofé à deux tentations bien differentes, à celle de l'amour, & à celle de l'impieté. Il refifta vigoureufement à la premiere, & toutes les follicitations de trois ou quatre filles, qui le tourmentoient fans ceffe, ne purent jamais donner atteinte à fa pudeur; il en vint même une fois juf qu'à appliquer un bon foufflet à l'une d'entre elles qui voulut le careffer. Il n'eut pas le même courage par rap port à la tentation d'impieté. Il avoit lû, par le confeil d'Annean, l'Ouvrage de Ciceron: De natura Deorum, & en avoit fait des extraits. Il y avoit remarqué le fentiment d'Epicure, qui rejette la Providence, fans cependant y donner: mais la rencontre qu'il fit d'un homme inconnu, qui le mit fur cette matiere, le perdit. Il lui allégua tant de raifons apparentes, pour appuyer ce fentiment, que Junius, fans fonger à celles que l'on y pouvoit oppofer, fe laiffa entraîner à l'impieté, qui heureufement

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FIUS.

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Mem. pour fervir à PHift.

- pour lui, n'eut pas le temps de jetter
dans fon efprit de profondes racines.
Un tumulte, qui s'éleva à Lyon,
dans ce temps-là, au fujet de la Re-
Tigion, l'ayant oblige de fortir de
cette Ville, pour fauver la vie, fon
pere ne l'eut pas plutôt appris, qu'il
le rappella à Bourges. Quelques en-
tretiens qu'ils eurent enfemble firent
fans peine découvrir au pere les mal-
-heureux fentimens aufquels fon fils
s'étoit laiffé feduire, & il n'oublia
Pien pour Fen retirer. It l'engagea à
s'appliquer à la lecture du Nouveau
Teftament, & cette lecture fut fi ef-
ficace, qu'il fut bien-tôt détrompé,
& qu'il fe dégoûta même de tout ce
qui n'avoit point de rapport à la
pieté.

Il renonça dès lors à la Jurifpru
dence, pour fe donner à l'étude de la
Theologie. Il alla pour cela à Geneve
au commencement des guerres civi-
fes de France. Comme il n'y avoit
porté que peu d'argent, & que les
troubles empêchoient fon
en faire tenir, il s'y vit bien-tôt réduir
à une extrême néceffité, & eut beau-
pere de lui
soup à fouffrir pendant plufieurs

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mois, au bout defquels il reçut enfin F. Jude quoi fe tirer de fa mifere, & de NIU S. quoi payer fes dettes.

Une autre difgrace encore plus fâcheufe lui furvint quelque temps après; ce fut la mort tragique de fon pere, qui lui ôtant toutes fortes de reffources, l'obligea à prendre le parti de gagner fa vie en inftruifant de jeunes gens.

Il fit ce métier à Geneve, jufquà Pan 1565. qu'il fut envoyé dans les Païs-Bas, pour y être Miniftre de l'Eglife Wallone d'Anvers. Il exerça cette charge au milieu de plufieurs périls; car quoiqu'il s'oppofât à la fureur de la populace, qui brifoit les Images, & pilloit les Eglifes, il paffa pour fon inftigateur; ce qui fut caufe qu'on tâcha plufieurs fois de l'arrêter; mais il eut toûjours le bonheur d'être averti affez à temps, pour éviter d'être pris.

Le Réglement qui fut fait alors à l'égard de l'Eglife Proteftante d'Anvers, qu'elle n'auroit dorénavant que deux Miniftres, qui feroient natifs du Païs, ayant exclus Junius du Miniftere de cette Ville; il fe retira à

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