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ainfi commencé à fe mouvoir,elle continuera de le faire éternellement, s'il n'y a quelque nou, velle caufe qui vienne l'arrêter;parce que cette boule étant d'elle-même indifferente au mouvement & au repos, & étant une fois déterminée au mouvement il eft impoffible qu'elle fe détermine elle-même à quitter ce mouvement pour prendre le repos. Ainfi il faut qu'elle demeure toujours dans ce mouvement s'il ne vient rien d'ailleurs qui l'en ôte.

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IV. Quelerepos n'eft pas une pure negation.

Je voi bien que nous fommes portez naturel lement à confiderer le repos comme une ceffa tion d'action, & le mouvement comme une action pofitive, laquelle nous experimentons en nous mêmes,quand nous nous mouvons,ou que nous voulons mouvoir un autre corps: au lieu que nous concevons qu'un corps demeure en refos dès lors que perfonne n'y touche,& qu'il n'y a aucune autre caufe qui lui imprime effectivement cette qualité ou cette action neceffaire pour le mouvement. Ainfi il femble qu'encore que le corps étant une fois en repos, y demeureéternellement il ne s'enfuit pas, que s'il eft une fois dans le mouvement y perfifte auffi éternellement, puifque pour fe mouvoir, il eft tefoin d'une action pofitive, & que le repos n'eft rien qu'une negation ou une ceffation d'ac tion ou de mouvement.

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V. Qu'ily a autant d'action pofitive dans , que dans le mouvement.

Le

repos

Mais fi la pefanteur de nos corps qu'il nous

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nous

faut porter, la roideur des membres qu'il nous faut plier, l'agitation des efprits qu'il nous faut employer, & beaucoup d'autres chofes, nous font experimenter quelque refiftance,. & nous obligent d'ufer de quelque violence pour furmonter ces empêchemens: on ne peut de là tirer aucune conféquence contre nôtre hypothefe, où nous fuppofons qu'il n'y a aucun empêchement, ni de gravité, ni d'inclination particuliere, ni de corps qui puiffe refif rer au dehors. En ce cas, il eft manifeste qu'il ne faut pas plus d'action pour le mouvement que pour le repos; & qu'afin qu'un corps fe repofe, il n'eft pas moins befoin qu'il ait été mis en repos qu'il eft neceffaire afin qu'il fe mouve, qu'il ait été mis dans le mouvement. Et en effet, fi nous confiderons bien la nature du repos ou du mouvement trouverons que le mouvement peut auffi bien être appellé Une ceffation de repos, que le repos eft appellé Une ceffation de mouvement; ou plûtôt nous trouverons que l'un & l'autre eft effectivement quelque chofe de pofitif, puis que le mouvement eft un état par lequel un corps correfpond fucceffivement à divers lieux;ou: bien une prefence paffagere, ou une fuite de diverfes prefences en divers endroits: comme le repos eft un état, par lequel un corps cor refpond toûjours à un même lieu bien une même prefence en un même endroit. De forte que le repos auffi bien que le mouvement, est un état, ou bien une prefence avec cette difference, que le repos eft un état de confiftance & une prefence conftante, qui eft toûjours confervée la même ; au lieu que le mouvement est un état changeant, &

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ane prefence paffagere. Or, de quelque façon que l'on confidere ces prefences conftantes ou paffageres s'il y a quelque action ou quelque fortes de caufe dans le corps, qui doive produire cette fuite de diverfes prefences dans le mouvement; il n'eft pas moins befoin d'action ou de force dans le repos pour conferver une même prefence; parce que conferver une chofe, c'eft la produire continuellement. Il eft. donc manifefte, qu'après que la prefence aura été produite par le corps dans le premier inftant, je parle dans le fens de ceux qui veulent qu'il y ait une veritable production de ces prefences ;) il faut qu'elle foit encore produite de nouveau dans l'inftant fuivant par le même corps, afin qu'il demeure en repos.. Or, il me femble qu'en cela il ya autant d'action, & autant de force, que pour produi re dans ce fecond inftant une feconde prefence, au lieu de reproduire la premiere ; & l'on peut en ce fens fervir. du vers d'un Ancien ::

Non minor eft virtus, quàm quarere, parta tueri.

Ainfi, foit qu'il faille produire à chaque inftant une nouvelle prefence pour le mouvement; foit qu'il faille auffi à chaque inftant. reproduire la même prefence pour le repos :: tela reviendra toûjours au même, & le corps. 'aura pas moins à faire pour fe conferver cette même prefence, & fe tenir en repos, que Pour produire de nouvelles prefences, & fe conferver dans le mouvement. D'où enfin il

faut conclure, que comme le corps, dès la

même qu'il a été déterminé une fois au repos, eft fuffifamment déterminé à fe conferver toûjours la même prefence: auffi dèslors qu'il a été une fois déterminé au moyvement, il eft fuffifamment déterminé à pro duire toûjours de nouvelles prefences, & à fe mouvoir ainfi fans ceffe.

VI. Objections.

Je ne veux pas m'amufer à repondre à toutes les difficultez chicaneufes, que l'on peut faire fur ce fujet, parce qu'il eft affez aisé de les refoudre. On dit par exemple, qu'une cause finie ne peut pas produire un effet infini, & que ce mouvement feroit infini, puifqu'il dureroit éternellement. On dit que celui qui meut un corps, lui imprime une certaine qualité, qui s'appelle Impetuofité, & que tandis que cette qualité dure, le mouvement dure auffi; mais que cette qualité venant à ceffer, le mouvement ceffe de même : & ils ajoûtent que cette qualité ne peut durer toû jours, étant de fa nature fi imparfaite, qu'el le n'exige point de durer long-tems. On dit encore que l'experience fait voir que tous les mouvemens ceffent peu peu comme l'on remarque dans une rouë qu'on aura agitée avec violence, dans une boule qu'on fait rou ler fur 1; billard, dans une bale fufpendue, & en d'autres corps, dont les mouvemens di minuent peu à peu, & s'éteignent enfin entie

rement.

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V11. Une caufe finie peut avoir un effet qui dure toûjours.

Je dis qu'il eft fort aifé de repondre à toutes ces difficultez, & à beaucoup d'autres femblables. Si l'on veut que ce mouvement soit un effet infini, parce qu'il dure éternellement ; 11 faut auffi dire le fera un effet infini

que repos s'il dure ainfi éternellement ; & que par confequent une caufe finie ne pouvant avoir un effet infini,il faudra dire qu'après qu'un homme aura mis un corps en repos, ce corps ne pourra pas demeurer éternellement dans ce repos,mais qu'il faudra enfin que ce repos ceffe, & que le corps commence à le mouvoir;ce qui n'eft pas raifonnable. Il y a grande difference entre un effet infini,& un effet qui dure éternellement : & s'il eft vrai qu'une caufe finie ne puiffe produire un effet infini; auffi eft-il veritable qu'une caufe, pour bornée qu'elle foit, peut produire un effet qui fubfifte éternellement, s'il n'eft détruit par quelque nouvelle caufe: car fi je fais une figure quarrée fur de la cire, cette figure durera toujours, fi rien ne vient à le gâter, ou à détruire la cire même. Ainfi il n'y a nul inconvenient de dire, que fi une fois le repos ou le mouvement font produits dans un corps, ce repos ou ce mouvement duieront fans fin, fi rien ne vient à les détruire.

VIII. Cette qualité qu'on appelle Impetuofité, dure toûjours.

Pour ce qui eft de cette qualité, que l'on pre tend être produite dans le corps, par celui qui

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