CHAPITRE III, JESUS-CHRIST crucifié est notre confolation dans les fouffrances, & une preffante exhortation à nous foumettre avec patience à celles que l'attachement à nos devoirs nous attire, ou que la divine Providence nous envoye. S. I. JESUS-CHRIST en fouffrant pour nous, a voulu nous montrer avec quelle bonté il s'interesse à ce que nous endurons pour lui, & combien l'expérience qu'il a faite de nos douleurs le rend tendre & compatissant. *C 'EST une fuite néceffaire de ce que JESUS-CHRIST Cruci fié eft notre exemple & notre modéle, qu'il foit auffi notre confolation dans les fouffrances, & une preffante ex hortation à nous foumettre avec pa- CHAP. III tience à celles que l'attachement à nos devoirs nous attire, ou que la divine Providence nous envoye. Car en le voyant cloué fur le bois, & raffafié d'opprobres, non pour fon interêt, mais pour le nôtre, qui oseroit fe plaindre d'avoir quelque part à fon calice, & qui ne fent pas diminuer fes propres peines en confiderant celles qu'il fouffre, & avec quelle charité il les fouffre, fur-tout quand on fçait avec quelle bonté il s'intereffe à ce que nous endurons pour lui demeurer fidéles, & combien l'expérience qu'il a faite de nos douleurs le rend tendre & compatiffant. 2. 19 Nous n'avons pas, dit faint Hebr. 4. 14 Paul, un Pontife qui ne foit pas « capable de compatir à nos infirmi- « tés & à nos foibleffes: " Qui non poffit compati infirmitatibus noftris. Car il a été tenté comme nous par toutes fortes d'épreuves à l'exclusion du pé: tentatum per omnia, pro fimilitu dine abfque peccato. Il a voulu nous devenir femblable en tout excepté dans ce qui étoit incompatible avec ché › CHAP. III. fa fainteté. Il a voulu tout éprouver , 3. Comme fils de l'homme, il devoit être exemt de douleur, puifqu'elle n'eft dûë qu'au péché : mais. comme Fils de Dieu, il en devoit être: Heb. 5. 8. encore infiniment plus éloigné. Et » néanmoins, tout Fils de Dieu qu'il » étoit, il a voulu fouffrir, & ap. prendre à obéir par fes fouffrances. Et quidem, cum effet Filius Dei, didicit ex eis que paffus eft obedientiam. Paroles étonnantes, & qui méritent bien d'être approfondies. C'étoit au Fils de Dieu à commander : il s'eft abbaiffé jufqu'à obéir. Il pouvoit n'obéir à fon Pere que dans des chofes dignes de fon état, ou glorieufes, ou! faciles., دو در faciles: il a voulu lui obéir jufqu'à la CHAP III. mort de la cro x. Et pourquoi l'a-t-il voulu Son motif eft encore plus admirable que fon obéiffance. C'a été afin d'apprendre par lui-même ce qu'il en coutoit aux fens & à la nature pour obéir 3. pour le mettre à la place de fes ferviteurs, à qui une femblable obéiffante feroit prefcrite; pour juger du prix de leur foumifhon; pour examiner jufqu'où penetrent les pointes d'une douleur, quand elle eft vive & continuelle; pour fçavoir jufqu'où des hommes foibles peuvent être tentés, & combien le Tecours dont ils ont befoin doit être promt, & fuperieur aux fentimens naturels; enfin pour leur commander avec bonté, pour mesurer la tentation fur les forces qu'il leur prépare, & pour les en faire fortir avec fuccès & avec avantage. Et quidem cum effet Filius Dei, didicit ex iis, qua paffus est, obedientiam. СНАР. III. S. II. La confolation dans les fouffrances eft plus grande de penfer que celui qui a fouffert pour nous, eft Dieu. En quel fens on peut dire que Dieu a fouffert. I. S'IL avoit été poffible que JESUS-CHRIST fût le Sauveur des hommes fans être Dieu, la confolation de ceux qui fouffrent feroit beaucoup moindre, & elle feroit fur eux beaucoup moins d'impreffion, parce que l'extrême distance de Dieu jusqu'à eux, & l'immuable félicité dont il jouit, affoibliroient extrêmement P'idée de fa compaffion par rapport à eux. Ils le regarderoient avec raison comme l'unique ou la principale caufe du vif fentiment qui les pénetreroit. Car il n'y a que fa main qui puifle enfoncer la pointe de la douleur dans l'intime de l'ame: lui feul peut la tourmenter, & la rendre malheureuse; & lui feul peut l'humilier, & la brifer fous fes coups |