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ra vindicatie-
ne deor. pag.

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& de manger de la chair de chiens.
Mais ils revinrent bientôt à leur génie, Plut. de fe-
puifque du tems de Xerxès, qui fuc-
céda à Darius, Gélon tyran de Syra-
cufe, aiant remporté en Sicile une vi-
toire confidérable fur les Carthagi-
nois, parmi les conditions de paix
qu'il leur prefcrivit y inféra celle-ci,
qu'ils n'immoleroient plus de victi-
mes humaines à Saturne. Et fans doute
que ce qui l'obligea à prendre cette
précaution, fut ce qui avoit été mis en
pratique dans cette occafion-là même
par les Carthaginois. Car pendant tout Herod. lib.
le combat, qui dura depuis le matin 7. cap. 167,
jufqu'au foir, Amilcar fils d'Hannom
leur Général ne ceffa point de facrifi-
ces aux dieux des hommes tout vivans,
& en grand nombre, en les faifant
jetter dans un bucher ardent : " &
voiant que les troupes étoient mifes en
fuite & en déroute, il s'y précipita
lui-même pour ne point furvivre à fa
honte, &, comme le dit S. Ambroife
en raportant cette action, pour étein-
dre par fon propre fang ce feu facrilege
qu'il voioit ne lui avoir fervi de rien.

a In ipfos, quos adolebat, fe fe præcipitavit ignes ut eos vel cruo.

a

re fuo extingueret, quos
fibi nihil profuiffe cogno
verat. S. Ambrof.

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Lib. 20. p.

756.

* Dans des tems de pefte ils facri fioient à leurs dieux un grand nombre d'enfans, fans pitié pour un âge qui excite la compaffion des ennemis les plus cruels, cherchant un remede à leurs maux dans le crime, & ufant de barbarie pour attendrir les dieux.

Diodore raporte un exemple de cette cruauté qui fait frémir. Dans le tems qu'Agathocle étoit près de mettre le fiege devant Carthage, les habi tans de cette ville fe voiant réduits à la derniére extrémité, imputerent leur malheur à la jufte colere de Saturne contre eux, parce qu'au lieu des enfans de la premiere qualité qu'on avoit coutume de lui facrifier, on avoit mis frauduleusement à leur place des enfans d'esclaves & d'étrangers. Pour réparer cette faute ils immolerent à Saturne deux cens enfans des meilleures maifons de Carthage ; & outre cela, plus de trois cens citoiens, qui fe fentoient coupables de ce prétendu crime, s'offrirent volontairement en facrifice.

a Cùm pefte laborarent, | diam provocat) aris adcruenta facrorum religio-movebant, pacem deone & fcelere pro remedio rum fanguine eorum exufi funt. Quippe homines pofcentes, pro quorum ut victimas immolabant, vita dii maximè rogari & impuberes (quæ ætas folent. Fußin, l. 18. 6. 6+ etiam hoftiam mifericor.

Id. in Ca mil. p. 132.

Diodore ajoute qu'il y avoit une ftatue d'airain de Saturne, dont les mains étoient panchées vers la terre de telle forte que l'enfant qu'on pofoit fur ces mains tomboit auffi-tôt dans une ouverture & une fournaife pleine de feu. Eft-ce là, dit Plutarque, adorer les Plut.de f dieux? Eft-ce avoir d'eux une idée qui perft.. p. 169Jeur faffe beaucoup d'honneur, que de les fuppofer avides de carnage, altérés du fang humain,&capables d'exiger & d'agréer de telles victimes? La religion, dit cet Auteur fenfé, eft environnée de deux écueils, également dangereux à l'homme, également injurieux à la divinité: favoir, de l'impiété & de la fuperftition. L'une, par affectation d'efprit fort, ne croit rien: l'autre, par une aveugle foibleffe, croit tout. L'impieté, pour secouer un joug & une crainte qui la gêne, nie qu'il y ait des dieux: la fuperftition, pour calmer auffi fes fraieurs, fe forge des dieux felon fon caprice, non feulement amis mais protecteurs & modéles du crime. Ne valoit-il pas mieux, Defuperfi dit-il encore, que Carthage dès le commencement prêt pour Légiflateurs un Critias, un Diagoras, athées reconnus & fe donnant pour tels, que

d'adopter une fi étrange & fi perverse religion? Les Typhons, les Géans, ennemis déclarés des dieux, s'ils avoient triomphé du ciel, auroient-ils pu établir fur la terre des facrifices plus abominables?

Voila ce que pensoit un payen du culte Carthaginois tel que nous l'avons raporté. En effet on ne croiroit pas le genre humain fufceptible d'un tel excès de fureur & de phrénéfie. Les hommes ne portent point communément dans leur propre fonds un renversement fi univerfel de tout ce que la nature a de plus facré. Immoler, égorger foi-même fes propres enfans, & les jetter de fang froid dans un bra fier ardent! Des fentimens fi dénaturés, fi barbares, adoptés cependant par

des nations entieres, & des nations très policées; par les Phéniciens, les Carthaginois, les Gaulois, les Scythes, les Grecs même & les Romains, & confacrés par une pratique conftante de plufieurs fiecles, ne peuvent avoir été infpirés que par celui qui a été homicide dès le commencement, & qui ne prend plaifir qu'à la dégradation, à la mifere, & à la perte de l'homme.

§. III. FORME DU GOUVERNEMENT de Carthage.

LE GOUVERNEMENT de Carthage étoit fondé fur des principes d'une profonde fageffe, & ce n'eft point fans raifon qu'Ariftote met cette Républi- Arift.lib. que au nombre de celles qui étoient de Rep les plus eftimées dans l'antiquité, & qui pouvoient fervir de modéles aux autres. Il appuie d'abord ce sentiment fur une réflexion qui fait beaucoup d'honneur à Carthage, en marquant que jufques à fon tems, c'est-à-dire depuis plus de cinq cens ans, il n'y avoit eu ni aucune fédition confidérable qui en eût troublé le repos, ni aucuntyran quien eût opprimé la liberté. En effet c'eft un double inconvénient des gouvernemens mixtes, tel qu'étoit celui de Carthage, où le pouvoir eft partagé entre le peuple & les Grands, de dégénérer ou en abus de la liberté par les féditions du côté du peuple, comme cela étoit ordinaire à Athénes & dans toutes les républiques grecques; ou en oppreffion de la liberté publique du côté des Grands par tyrannie, comme cela arriva à Athé nes, à Syracuse, à Corinthe, à Thèbes,

la

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