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ment. Quand le corps avoit été ainsi embaûmé, on le rendoit aux parens,. qui l'enfermoient dans une efpece d'armoire ouverte, faite fur la mesure du mort: puis ils le plaçoient debout: & droit contre la muraille foit dans leurs tombeaux, s'ils en avoient, foit dans leurs maisons.. C'eft ce qu'on appelle momies. Il en vient encore tous les jours d'Egypte, & plufieurs curieux en confervent dans leurs ca-binets.. On voit par là quel foin les Egyptiens prenoient des corps morts.. Leur reconnoiffance envers leurs parens étoit immortelle. Les enfans, en voiant les corps de leurs ancêtres, fe fouvenoient de leurs vertus que le pu blic avoit reconnues, & s'excitoient à aimer les loix qu'ils leur avoient laiffées.. On reconnoit, dans les fu-nérailles de Jofeph en Egypte, une partie des cérémonies dont je viens de parler.

J'ai dit que le public avoit reconntı: les vertus des morts, parce qu'avant que d'être admis dans l'afyle facré des. tombeaux, il faloit qu'ils fubiffent: un jugement folennel. Et cette circonftance des funérailles chez les Egyptiens, eft une des chofes des plus

remarquables qui fe trouvent dans l'hiftoire ancienne.

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C'est une confolation en mourant de laiffer fon nom en eftime parmi les hommes, & de tous les biens humains c'eft le feul que la mort ne nous peut ravir. Mais il n'étoit pas permis en Egypte de louer indifféremment tous les morts: il faloit avoir cet honneur par un jugement public. L'affemblée des Juges fe tenoit au dela d'un lac, qu'ils paffoient dans une barque. Celui qui la conduifoit s'appelloit en lan gue égyptienne Charon; & c'eft fur cela que les Grecs, inftruits par Orphée qui avoit été en Egypte, ont inventé leur fable de la barque de Charon. Auffitôt qu'un homme étoit mort, on l'amenoit en jugement. L'accufateur public étoit écouté. S'il prouvoit que la conduite du mort eût été mauvaise, on en condannoit la mémoire, & il étoit privé de la fepulture. Le peuple admiroit le pouvoir des loix, qui s'étendoit jufqu'après la mort, & chacun, touché de l'exemple, craignoir de deshonorer famémoire & fa famille. Que fi le mort n'étoit convaincu d'aucune faute, on l'enfeveliffoit honorablement.

ils n'étoient

Ce qu'il y avoit de plus étonnant dans cette enquête publique établie contre les morts, c'eft que le trone même n'en mettoit pas à couvert. Les rois étoient épargnés pendant leur vie, le repos public le vouloit ainfi : mais pas exemts du jugement qu'il faloit fubir après la mort, & quelques-uns ont été privés de la fépulture. Cette coutume paffa chez les Ifraelites. Nous voions dans l'Ecriture que les mechans rois n'étoient point enfevelis dans les tombeaux de leurs ancêtres. Par là ils apprenoient, que fi leur majefté les met pendant leur vie au deffus des jugemens humains, ils y reviennent enfin quand la mort les a égalés aux autres hommes.

Lors donc que le jugement qui avoit été prononcé se trouvoit favorable au mort, on procédoit aux cérémonies de l'inhumation. On faifoit fon panégyrique, mais fans y rien mêler de fa naiffance: toute l'Egypte étoit cenfée noble. On ne comptoit pour louanges folides & véritables que celles qui étoient rendues au mérite perfonnel du mort. On le louoit de ce que dans fa jeuneffe il avoit eu une excellente éducation, & de ce que dans un âge

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plus avancé il avoit cultivé la pieté à l'égard des dieux, la juftice envers les hommes, la douceur, la modeftie, retenue & toutes les autres vertus qui font l'homme de bien. Alors toute l'affemblée prioit les cieux de recevoir le mort dans la compagnie des juftes, & de l'affocier à leur bonheur éternel.

EN FINISSANT l'article qui regarde les cérémonies des funérailles, il n'eft pas hors de propos de faire remarquer aux jeunes gens les maniéres différentes dont en ufoient les anciens à l'égard des corps morts. Les uns, comme nous l'avons dit des Egyptiens, après les avoir embaûmés les expofoient en vûe, & en confervoient le fpectacle. D'autres les bruloient fur un bucher: & cette coutume étoit en ufage chez les Romains.. D'autres enfin les dépofoient dans la terre.

Le foin de conferver les corps fans les cacher dans les tombeaux, paroit injurieux à l'humanité en général, & aux perfonnes en particulier que l'on prétend ainfi refpecter, parce qu'il rend leur humiliation & leur diffor mité vifibles, &, quelque foin qu'on en puiffe prendre, n'offre aux fpecta,

teurs que de triftes & d'affreux reftes de leurs vifages. La coutume de bruler les morts a quelque chofe de cruel & de barbare, en fe hâtant de détruire ce qui refte des perfonnes les plus cheres. Celle d'enterrer les morts eft certainement la plus ancienne & la plus religieufe. Elle remet à la terre ce qui en a été tiré, & nous prépare à croire que le corps qui en a été formé une première fois, pourra bien en être tiré une feconde..

CHAPITRE TROISIEME.

Des Soldats & de la Guerre.

LA

A PROFESSION militaire étoit en grand honneur dans l'Egypte. Après les familles Sacerdotales, celles qu'on eftimoit les plus illuftres, étoient, comme parmi nous, les familles deftinées aux armes. On ne fe contentoit pas de les honorer, on les récompenfoit libéralement. Les foldats avoient douze Arures exemtes de tout tribut & de toute impofition. L'Arure étoit une portion de terre labourable, qui répondoit à peu près à la moitié d'un de nos arpens.. Outre

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