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favoir, que le Patriarche Foulcher entreprit le voyage de Rome contre les Templiers; que Jacques de Molai fut fait Grand-Maître par brigue; que Marshal, Comte de Pembrok, fut Chevalier du Temple, &c. Avec out cela, M. Godefroi prétend que fon édition est de aucoup fupérieure aux précédentes, &, pour en concre le public, il en annonce ainfi les avantages: '. dit-il : Elle eft divifée en chapitres. Plaisante idée! te de Dupuy ne contenant pas plus de foixanteze pages in-douze, il est très-indifférent au public voir par chapitres ou autrement. S'il étoit vrai e diftribution mit les faits & les preuves dans vidence plus grande, & procurât au lecteur plus goût & de facilité nos célebres Hiftoriens, les Fleuri, les d'Orléans, les Choifi n'auroient pas manqué de la fuivre.

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2o. On en a retranché tout ce qui étoit étranger à l'Hiftoire des Templiers, comme le Schifme d'Avignon, &c. Nous en faurions gré à l'Editeur, fi à la place de ces retranchemens il nous eût fait part de quelques nouvelles découvertes fur la discipline régulierę & militaire de cet Ordre, fur fon gouvernement, fur le bien ou le mal qu'on en a dit. Loin de là, M. Godefroi nous fait acheter bien cher de longs paffages, extraits des Hiftoires les plus communes, telles que font celles de l'Abbé Fleuri, de Nangis, de M. Baluze, qu'il fuffifoit d'indiquer, comme des fources auxquelles il eft libre à chacun de

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recourir. Le premier de ces extraits et tiré de l'Hif toire des Ordres Religieux, en dix-neuf colonnes, où l'on ne trouve qu'une ennuyeuse répétition de ce qui eft dans Dupuy, avec quelques faits contraires à la narration de cet Hiftorien & aux preuves de fon Editeur.

3°. En donnant le texte de M. Dupuy, on a cru qu'il demandoit des explications en quelques endroits, & on les a données en forme de notes. A la bonne heure, fi la plupart de ces notes n'étoient pas inutiles & défectueufes. Qu'importe à l'Hiftoire des Templiers & à la juftification de Philippe-le-Bel, qu'il y ait eu deux Berenger Fredoli; qu'un Evêque de Palestriné ait été nommé Taillefer; que Noftradamus foit Auteur d'une Hiftoire de Provence; que Chinon foit une jolie ville de Touraine; que tels & tels Evêques foient d'un tel pays ou morts en telle année? D'ailleurs, où M. Godefroi a-t-il trouvé que Roncelin ait jamais été Grand-Maître; que Thomas de Montaigu & Thomas Berault foient la même personne; que Hugues-des-Payens étoit issu du Royaume de Naples, tandis qu'il dit ailleurs qu'il étoit des environs. de Troyes en Champagne; qu'Amauri fut établi Gouverneur de Chipre par le Roi Henri, fon frere? Il faudroit du tems & de la patience plus que nous n'en avons, pour examiner toutes les notes de M. Godefroi, & pour vérifier ses citations, que nous voulons bien supposer plus exactes que celle qui fe trouve à la page 72. On pourroit, dit-il, ajouter ici le jugement des favans Auteurs des

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actes de Leipfick, lequel est tout-à-fait conforme à celui de M. Dupuy; leur témoignage fe trouve dans leurs acles du mois de Février 1700, page 57, où ils rapportent en raccourci tout ce que les Hiftoriens ont allégué pour & contre la condamnation des Templiers. Il n'y a pas un feul mot à l'endroit des Journaux indiqués, qui donne à entendre qu'on y penfe d'une maniere conforme au jugement de Dupuy on y rapporte encore moins tout ce que les Historiens ont allégué pour ou contre les Chevaliers. Les Journalistes y expofent fimplement le contenu d'une dissertation de M. Dupin fur cette matiere, où ce Critique rapporte, non le fentiment d'autrui,

mais le fien uniquement.

4o. On y a inféré, continue l'Editeur, la regle qui fut donnée aux Templiers, par les foins de S. Bernard; au Concile de Troyes. On ne prouvera jamais que S. Bernard ait donné une regle aux Templiers ni durant ni après le Concile de Troyes: on dit bien qu'il en fut chargé par cette affemblée en 1128, & par le Roi de Jérufalem deux ans auparavant, mais on doute avec raifon fi le faint Abbé s'acquitta de la commiffion, & si la regle dont il s'agit eft de lui. Nous verrons ailleurs qu'elle n'en peut pas venir, & qu'étant bien postérieure au Concile de Troyes, elle n'en peut être confidérée comme un acte. Cette piece, réimprimée tant de fois depuis l'édition d'Aubert le Mire, demandoit des éclairciffemens sur plusieurs endroits; toutefois M. Godefroi,

Si nos modernes, ceux même qui fe piquent d'exactitude, n'avoient fait que les confondre, tantôt avec les Hofpitaliers & les Teutoniques, tantôt avec les PorteCroix & ceux de Saint-Lazare; fi on s'étoit contenté de dire que S. Bernard fut leur premier Grand-Maître, qu'ils prirent leur origine des Hofpitaliers, qu'il y eut des Chevalieres du Temple, on négligeroit ces méprifes, comme chofes de peu de conféquence: on pourroit même ne confidérer que comme des exagérations outrées ces fauffes imputations, qu'ils furent les plus méchans de tous les Orientaux (1); qu'ils fe battirent auffi fouvent avec les Hofpitaliers qu'avec les Mufulmans (2); qu'ils fe livrerent totalement aux plaisirs de la table, de la chaffe & de la galanterie (3); que plufieurs abjurerent. leur religion pour embraffer le Mahométifme (4): mais avancer hautement que toutes les Hiftoires font pleines des trahifons qu'ils faifoient aux Princes Chrétiens, de concert avec les Infideles, des brigandages qu'ils exerçoient contre les peuples qu'ils devoient protéger par leur inftitut (5); mais les accufer d'intelligence avec Saladin contre les Francs, d'avoir caufé la captivité de S. Louis, livré la Palestine à l'ennemi du nom

(1) Le P. Daniel, Hift. de France. (2) M. de Voltaire, Annales de l'Em pire.

(4) Hermant, Hiftoire des Conciles, tom. 3, pag. 336.

(s) L'Abbé Vely, Hifloire de

(3) David Hume, Hiftoire d'An-France. 'gleterre fur l'an 1327.

Chrétien en 1291, & de s'être enfin ligués pour empêcher qu'on ne la restituât aux Occidentaux (6); imaginer qu'ils ont croupi pendant près de cent ans dans une corruption générale, qu'ils furent auteurs de toutes les pertes que firent les Chrétiens en Orient, qu'ils furent convaincus par une infinité de témoins (7), feindre qu'un certain Roger, prétendu Grand-Maître de l'Ordre, après avoir été chaffé de Syrie, ravagea Athenes, toute la Thrace & l'Hellefpont (8), enfin, que les pieces du procès qu'on leurs fit font fuppofées (9), c'est en impofer aux lecteurs, fe jouer de la crédulité des hommes, & faire voir jufqu'où peut aller l'impudence du menfonge. Il eft vrai qu'ils ont failli; hé ! qui sont ceux qui n'ont point commis de fautes? Pour qu'une société n'eût jamais manqué, il faudroit, comme on l'a dit tant de fois, qu'elle fût compofée d'hommes qui ne fuffent pas fujets à l'humanité. Mais comment voir d'un œil indif férent ces couleurs affreufes fi fouvent raffemblées pour faire de cet Ordre des portraits infamans, où l'on ne rougit pas de franchir les bornes de la vraifemblance?

« Les Templiers, dit-on, ainfi nommés parce qu'ils » fréquentoient fouvent les Eglifes, étoient des Héré»tiques, dont la fecte fe forma, vers 1030, à Jérufa

(6) Chroniques de S. Denis.

(8) Joan. Heroldus, cont. Tyrii,

(7) Dupuy, Condamnation des Tem-lib. 5, cap. 13. pliers. Gaufridi, Hiftoire de Provence, (9) Hiftoire du Droit Public Eccléliv. 5, pag. 195. Item, le P. Daniel.. fi aft ique François, tom. 2, pa 46.

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