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A l'âge de près de foixante ans, il commença à fe douter qu'il pouvoit devenir Auteur; exemple rare dans un fiecle, où l'on n'attend pas fi long-temps à fe croire en droit d'affommer le Public par fes écrits. Le fruit de cette inspiration tardive a été de deux Hiftoires particulieres; l'une du Chevalier Bayard, l'autre du Connétable du Guefclin. On a lieu de penfer que s'il eût commencé plutôt, il auroit pu donner à son style plus de correction, plus de noblesse, plus de chaleur, & fe guérir fur-tout d'une diffufion affommante, défaut ordinaire aux vieux Ecrivains, & fur-tout à ceux qui n'ont pas travaillé de bonne heure à s'en garantir. Ces deux Ouvrages, qui, malgré leurs défauts, n'ont pas laiffé d'avoir du débit, viennent d'être réimprimés avec des corrections & des fuppreffions qui en rendent la lecture plus fupportable.

Au refte, le nom de cet Auteur peut augmenter -la lifte des Ecrivains infortunés. Il eft mort à Bicêtre, où da mifere l'avoit forcé de fe retirer, & où la Mufe de l'Hiftoire ne devroit pas conduire fes Eleves, fi de fiecle avoit autant d'humanité tréelle, qu'il fe flatte d'avoir de politeffe & de philofophie.

BEZE, [ Théodore DE] célebre Apoftat, andà

Vezelai eu Bourgogne en 1519, mort à Geneve en 1605.

Il s'attacha dans fa jeuneffe à la Poésie, & fir beaucoup de vers latins, qui, quoi qu'en difent les Cafaubon, les Scaliger, & autres Critiques de cette force, ne font guere recommandables que par le libertinage qu'ils refpirent. Ils font imprimés fous le titre de Juvenilia, & n'en méritent pas d'autre. Ses Ouvrages en profe pou voient avoir quelque valeur, dans un temps où le raisonnement & le goût étoient fi loin de leur perfection; mais en qualité de Poëte, Beze eft-il digne de figurer dans la belle édition des Auteurs claffiques, imprimés chez Barbou? Les Œuvres d'un Verfificateur de cette trempe ne peuvent que: déshonorer cette Collection. Quelle différence entre les vers de Beze & la noble Poéfie de Coffart, d'Huet, de Santeuil, de Vaniere, &c. !

BIGNICOURT, [ Simon DE ] ancien Confeiller au Préfidial de Rheims, fa patrie, né en 1709, mort à Paris en 1775.

La plus longue de fes Poéfies, foit Latines, foit Françoifes, n'a pas plus de vingt vers. C'est un mérite d'être court, & quand cet Auteur n'auroit que celui-là, on devroit lui en favoir gré. Il ne faut cependant pas réduire son éloge à celui

de la brièveté; plufieurs de fes Poéfies Latines ont été comparées, par des Journalistes, à celles de Catulle; nous ajouterons que la plupart de fes Epigrammes Françoises font tout-à-fait dans le genre de celles du Chevalier de Cailli. Mais ce n'est pas fur ces bagatelles que M. de Bignicourt fonde fa réputation.

Il s'est exercé dans un genre plus propre à lui faire un nom, & qui n'eft pas moins agréable aux yeux de ceux qui connoiffent le prix & le charme de la variété: fes Penfées & Réflexions philofophiques le placent à côté de nos Penseurs les plus fins & les plus délicats. Il en a donné, quelque temps avant fa mort, une nouvelle édition, augmentée de près des trois quarts, & intitulée, on ne fait trop pourquoi, l'Homme du Monde & l'Homme de Lettres. Quelques-unes des réflexions qu'il a ajoutées, manquent de jufteffe, & plufieurs ne font pas affez développées. Cette maniere d'écrire par phrases, en prétendant donner une pensée, ne plaît qu'autant que ceux qui l'adoptent favent fixer quelque temps l'attention du Lecteur sur un même objet, c'est-à-dire, qu'il faut que, de penfée en pensée', ils développent un sujet, afin que les traits de lumiere fuppléent au défaut de liaison dans le ftyle. Les Maximes ou Réflexions de M. de la Rochefoucault ne feroient plus lues aujourd'hui,

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s'il fe fut contenté de dire une vérité en peu de mots, fans en amener, par des tours différens, de nouvelles qui rendent la premiere plus fenfible.

BIGNON, [Jérôme ] Avocat Général du Parlement de Paris, fa patrie, Bibliothécaire du Roi, né en 1590, mort en 1656, protégea les Lettres avec plus de fuccès qu'il ne les cultiva. Auffi fon nom eft-il devenu autant recommandable dans la Littérature, par le zele qu'il témoigna toujours pour fes progrès, que dans la Magiftrature, par les qualités qui le placent parmi les meilleurs Magiftrats.

Jean-Paul Bignon, Abbé de St. Quentin, de l'Académie Françoife, de celle des Sciences & de celle des Infcriptions, mort en 1744, âgé de 81 ans, de la même famille que le précédent, fut, comme lui, Bibliothécaire du Roi, & a juftement mérité la même réputation.

BIGOT, Guillaume ] Docteur en Médecine, pé à Laval en 1592, mort vers l'an 1560.

Bayle a jugé à propos de confacrer à cet Auteur obfcur un article affez long dans fon Dictionnaire critique. On auroit pu le passer d'apprendre qu'il naquit avec deux dents, & qu'on ne trouva pas de nourrice pour l'allaiter. Les Mers Latins, & les autres Quvrages de Bigat

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ne valoient pas la peine qu'on s'attachât fi fort aux Anecdotes de fa vie.

BITAUBÉ, [ Paul-Jérémie ] de l'Académie de Berlin, né en Gascogne en 17..

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Cet Auteur que nous avions, par erreur annoncé pour mort, dans la précédente édition de cet Ouvrage, eft depuis long-temps établi en Allemagne, où il cultive avec fuccès la Littérature Françoife. Ses premiers pas dans la carriere n'ont pas été heureux: il y a débuté par des Poéfies froides & profaïques, & par un Poëme en profe, intitulé Jofeph, dont l'effet le plus sûr eft de procurer le fommeil ou l'ennui. Ce n'eft pas qu'on ne rencontre dans ce dernier Ouvrage quelques morceaux pleins d'élégance, de naturel & de pathétique ; mais ils font en trop petit nombre pour faire pardonner les longueurs, les inutilités & les défaus de correction & de goût qu'on y remarque.

Sa Traduction de l'Iliade parut d'abord, en 1760, fous le titre d'Effai, & fut fuivie, deux ans après, de ce que l'Auteur appelle une Traduction libre, & qu'on peut regarder plutôt comme un bizarre travestissement; Homere y eft défiguré d'un bout à l'autre, plus qu'il ne l'a jamais été par la Mothe. L'Auteur l'accompagna d'un. Difcours préliminaire, où il traitoit fans

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