Colalte entreprirent de furprendre la Place par cet endroit, & leur tentative fut fi heureufe, que tous AN. 1630. les efforts que purent faire dans une telle extrémité le Duc de Mantouë & le Maréchal d'Eftrées, furent inutiles. Cette malheureuse Ville fut abandonnée à l'avarice & à l'infolence des foldats. Le pillage dura trois jours pendant lefquels les Imperiaux dont quelques-uns étoient Lutheriens, commirent tout ce qu'on peut imaginer de brutalitez, de violences & d'impietez. Le Duc de Mantouë après s'être fauvé dans le château où il ne put pas tenir long-temps, fe retira dans l'Etat Ecclefiaftique n'efperant prefque plus de rétablir fes affaires que par quelque traité favorable.

LXXI. Mort du Duc

Autant que cette conquête donna de joïe aux Imperiaux & aux Espagnols, autant caufa-t-elle de Savoie. d'inquietude au Duc de Savoïe. Ce Prince voïant les Imperiaux maîtres du Mantoüan & les Espagnols dans le Montferrat, commença à redouter le voifinage de la Maison d'Autriche, tandis que d'un autre côté tous les Etats étoient en proïe aux armées Françoises. Il mourut fur ces entrefaites, & on prétend que ce fut de chagrin. Il est vrai que Charles Emmanuel qui paffoit pour un des plus fins politiques de fon temps parut oublier dans cette occafion les regles de la prudence. Car au lieu de traiter à l'amiable de fes prétentions avec le Duc de Mantouë, ce qu'il pouvoit faire avec fuccès & à peu de frais, il fe joignit aux Espagnols qui lui avoient toujours jufqu'alors contefté fes droits, & qui dans le deffein qu'ils avoient d'affer vir l'Italie, n'auroient

pas manqué après qu'ils fe feroient rendus maîtres AN. 1630. du Montferrat, de l'en chaffer lui-même.

fai.

LXXII. Négociation

La mort du Duc de Savoïe fut bien-tôt fuivic de du Seigneur Ma- celle du Marquis de Spinola, que la longue résistance zarini devant Ca- de Cafal & les mauvais offices qu'on lui rendoit à la Cour de Madrit chagrinerent auffi extrêmement. Quelques jours avant sa mort le Seigneur Mazarini avoit ménagé une convention entre les Efpagnols devant Cafal & les affiegez. Ceux-ci confentirent à rendre la Ville & le Château aux affiegeans, lefquels s'obligerent de leur côté à fournir des vivres aux François, & à leur remettre la Ville avec le Château en cas que la Citadelle fût fecourue dans un certain temps. Les Efpagnols s'applaudirent de ce traité parce qu'il mettoit leur honneur un peu à couvert, & les François y trouverent leur compte, parce qu'ils étoient dans une extrême difette de vivres. Ce fut-là la premiere négociation du Cardinal Mazarin qui n'étoit alors que fimple Cavalier emploïé par le Pape & la Maifon Barberine, & qui fe préparoit ainfi les voïes à devenir un jour un des plus grands Miniftres de l'Europe.

LXXIII.

tifbonne.

Mais à peine cet accord cut-il été reglé qu'on apTraité de Ra- prit la nouvelle du traité de Ratisbonne, qui fembloit devoir terminer les affaires d'Italie, & qui ne le fit cependant pas. Par ce traité l'Empereur & le Roi de France promettoient réciproquement de ne traitez de paix. donner aucune affiftance à leurs ennemis. Le Duc. de Savoïe devoit avoir dans le Montferrat la ville de Trin & d'autres terres de la valeur de dix-huit fur les traitez des mille écus de rente. Le Duc de Guaftalle devoit

Recueil des

Vittorio Siri vol. 6.

Amelot obferv.

Princes.

avoir fix mille écus de rente en fond de terre avec tous les droits de jurifdiction & de fuperiorité. Le AN. 1630. Duc de Mantouë devoit faire une foumiffion à Sa Majesté Imperiale, fuivant une formule dont on étoit convenu, moïennant quoi il devoit recevoir l'inveftiture du Duché de Mantouë & du Marquifat de Montferrat. Après cela les François d'une part devoient abandonner la Savoïe, & de l'autre les Imperiaux & les Espagnols devoient évacuer le Mantoüan, le Montferrat, le Païs des Grifons, la Valteline, & rendre aux Venitiens ce qu'ils avoient pris fur leur République. Mais il parut que le Cardinal de Richelieu en envoïant des Ambaffadeurs François à la Diete de Ratisbonne, avoit eu beaucoup moins en vûë de traiter, que d'empêcher l'Empereur de faire élire dans la Diete fon fils Ferdinand déja Roi de Boheme & de Hongrie pour Roi des Romains. En effet le celebre Pere Jofeph Capucin, qui fut chargé de cette négociation avec Monfieur de Sillery, eut l'adreffe de faire differer cette élection.

Quant au traité le Cardinal de Richelieu prétendit que les négociateurs François avoient paflé leurs pouvoirs. Le Roi refufa de le ratifier, fur-tout à caufe de l'article qui lui ôtoit la liberté de fecourir fes Alliez, c'eft-à-dire, le Roi de Suede qui fe préparoit alors à defcendre en Allemagne, & avec qui la France étoit déja cn négociation. Les Espagnols de leur côté refuferent de figner le traité qu'ils ne trouvoient pas affez favorable aux deffeins qu'ils avoient fur l'Italie. Enfin ce traité auroit obligé les troupes Françoifes de refter encore en Italie pendant deux mois pour en attendre l'execution, &

- une fi longue inaction auroit ruiné l'armée. Ainfi AN. 1639. les Generaux François ne laifferent pas de s'avancer jufqu'à Cafal, réfolus de donner bataille aux ennemis. Ils étoient déja prêts d'attaquer les lignes des Efpagnols, lorfque le Seigneur Mazarini après beaucoup de voïages d'une armée à l'autre persuada enfin aux deux partis de confentir à un nouvel accommodement. Cafal refta au pouvoir des François : les hoftilitez cefferent, & le traité de Ratisbonne fut en partie executé pour ce qui regardoit l'Italie. Les chofes demeurerent en cet état jufqu'aux traitez de Querafque qui fe firent l'année fuivante. Par le prcmier de ces traitez, le Duc de Savoïc Victor-Amedée qui avoit fuccedé à Charles Emmanuel, ceda au Roi de France Pignerol pour être uni à perpetuité à la Couronne de France, & par le fecond il fe fit un accommodement entre l'Empereur, le Roi de France & le Roi d'Efpagne, par lequel il fut reglé que toutes les troupes fortiroient en même temps du Mantoüan & du Montferrat, dont l'Empereur donneroit l'inveftiture au Duc Charles de Mantouë excepté de la partie du Montferrat qui eft en deçà du Pô & au de-là du Taner, laquelle feroit cedée au Duc de Savoïe. Ce traité dura peu d'années, comme je raconterai après que j'aurai repris la fuite des af-faires d'Allemagne.

Fin du fecond Livre,

DU

L'

SOMMAIRE

TROISIEME LIVRE.

'Empereur entreprend d'obliger les Proteftans à reftituer les biens Ecclefiaftiques. 11. Publication de l'Edit de Reftitution. III. Execution de l'Edit. IV. Diete de Ratifbonne, & dépofition de Valftein. v. L'Electeur de Saxe refufe de fe foumettre à l'Edit. vi. Confederation des Proteftans à Leipfick. VII. Gustave Adolphe Roi de Suede entreprend de faire la guerre à l'Empereur. VIII. Difpofitions de la France par rapport à cette entreprise. IX. Difpofitions des Provinces-Unies. X. De l'Angleterre. X. Des Rois de Pologne & de Dannemark. XII. Des Princes d'Italie. XII. Arrivée du Roi de Suede en Allemagne. XIV. Ses premiers fuccès. xv. Le Duc de Pomeranie traite avec lui. xvi. Magdebourg reçoit garnison Suedoife. XVII. Mauvais état de l'armée Imperiale. XV111. Progrès du Roi de Suede. XIX. Irréfolutions des Princes d'Allemagne. xx. La France traite avec le Roi de Suede. XXI. Ses vûës dans ce traité. XXII. Suite des progrès du Roi de Suede. XXIII. Le Comte de Tilly marche contre les Suedois, & prend Nievvbrandebourg. XXIV. Guftave prend Francfort fur l'Oder & Landf berg. xxv. L'Electeur de Brandebourg reçoit les Suedois dans fes Places. XXVI. Le Comte de Tilly emporte d'affaut la ville de Magdebourg. XXVII. Il marche contre le Lantgrave de Heffe& revient contre Gustave. XXVIII. Les Ducs de Mekelbourg fe remettent en poffeffion de leurs Etats. XXIX. Le Comte de Tilly fait la guerre à l'Electeur de Saxe. xxx. L'Electeur traite avec Guftave. XXXI. Le Roi de Suede marche contre le Comte de Tilly. XXXII. Bataille de Leipfick. XXXIII. Suites de la victoire des Suedois. XXXIV. Marche de Gustave jusqu'au Rhin. XXXV. Progrès des Suedois dans les autres parties de l'Allemagne