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V.

XVI. Ferdinand I.

Révolution des

Pais-Bas.

Ce fut après cette Diete que Charles V. voïant que tout étoit calme dans l'Empire, executa le def- AN 1556. fein qu'il avoit pris de fe retiter dans la folitude pour y paffer tranquillement le refte d'une vie juf fuccede à Charles qu'alors fi agitée. Il remit à Ferdinand I. fon frere, les rênes de l'Empire, & ceda le trône d'Espagne à Philippe II. fon fils. Ce Prince ne fçût pas conferver le plus beau fleuron de fa Couronne. Une révolution inefperée détacha pour toujours les PaïsBas de la Monarchie Espagnole : révolution dont le Calvinisme d'un côté, & de l'autre la rigueur exceffive & indiscrete des Ministres Espagnols, furent la premiere occafion. L'ambition de quelques Grands donna bien-tôt à la révolte des Chefs qui la foutinrent par leur courage & leur habileté ; & enfin cet amour de la liberté, & cet efprit d'indépendance qui ont de tout temps rendu ces peuples incapables de plier fous le joug, l'ont perpetuée jusqu'à nos jours. J'aurai fouvent occafion de parler de ces mouvemens dans le cours de cette Hiftoire, puifqu'ils ne furent entierement appaifez, comme ccux d'Allemagne, que par la paix de Westphalie.

Calme de l'Em

nand I. & Maxi

Le regne de Ferdinand fut beaucoup plus paci- XVII. fique. Ce Prince voïant que les Proteftans refu- pire fous Ferdisoient opiniâtrement de reconnoître le Concile de milien II. Trente, n'entreprit point de les y forcer. Maximi-Heiss. hift. de lien II. fon fils qui lui fucceda, herita de lui cet ef. "Empire. prit de douceur & de moderation, & les Proteftans las de la guerre, ou contens d'avoir obligé les Empereurs à les menager & à les craindre, ne fongeoient qu'à jouir en paix des avantages qu'ils avoient obtenus pour leur parti. Il sembla que l'He

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réfie après avoir ainsi affermi son regne dans l'AlleAN 1556. magne, voulut lui donner quelque relache pour venir en France executer les deffeins qu'elle avoit formez depuis long-temps fur ce Roïaume. Elle y amena avec elle l'efprit de révolte, la difcorde, la guerre civile avec toutes les fureurs qui l'accompagnent, & fous les regnes de Charles IX. & de Henri III. elle livra cette Monarchie en proïe à une cruelle diffenfion dont on ne peut fe rappeller le fouvenir qu'avec horrcur.

XVIII.

Les troubles recommencent en

entre

Je m'écarterois de mon fujet & des regles de l'Hiftoire, fi je racontois ici comment ces affreux défordres finirent heureusement en France fous le regne de Henri IV. mais après avoir fait connoître par ce récit préliminaire & abregé la premiere origine des troubles de l'Empire, je vais commencer à raconter plus en détail comment après un affez long intervalle de tranquillité, les troubles recommencerent dans toute l'Allemagne, les fuites funeftes qu'ils eurent fous l'Empire de Ferdinand II. & de Ferdinand III. & la part qu'y prirent les autres Princes de l'Europe.

Il y avoit déjà quelque temps que les Princes Proteftans d'Allemagne, peu contens des avantages Allemagne par la qu'ils avoient obtenus dans les traitez que j'ai rapdivers prétendans portez, fongcoient à s'en procurer de nouveaux du Duc de Cleves lorfque la mort du Duc de Cleves leur fournit une & de Juliers. occafion de se réunir enfemble par une nouvelle Confederation beaucoup plus fatale à l'Empire,que toutes les précedentes. Jean-Guillaume Duc de Cleves, de Juliers & de Bergh étant mort fans enfans, fa fucceffion devoit, felon les Loix ordinaires,

Heiff. hift. de l'Empire.

appartenir à fes fœurs qui étoient au nombre de quatre, & à leurs heritiers. Mais fouvent dans ces AN 1609. occafions, l'interêt & l'ambition franchiffant les bornes de la juftice & de l'équité, ceux à qui les Loix ne donnent aucun droit, veulent du moins partager; & ceux que les Loix obligent de partager, paffim. veulent tout avoir. C'eft ce qui arriva dans ce fameux démêlé.

Les competiteurs furent Jean - Sigifmond Electeur de Brandebourg, qui étoit fils d'une fille unique de Marie-Eleonor, l'aînée des quatre sœurs : Wolfang-Guillaume Duc de Neubourg, fils d'Anne, la feconde des quatre: Jean II. Duc des Deux-Ponts, fils de la troifiéme : Charles d'Autriche, Marquis de Burgau, qui avoit époufé la quatrième : les Ducs de Saxe defcendant de Sibylle de Cleves, tante du feu Duc : le Duc de Nevers, & le Marquis de Maulevrier dont tous les titres étoient fondez fur ce qu'ils portoient l'un & l'autre le furnom & les armes, le premier de Cleves, & le fecond de la Mark. Si les cinq derniers prétendans avoient moins de droit que les deux premiers, ils eurent auffi plus de moderation; car ils fe contenterent de poursuivre leur droit par les voïes ordinaires : au lieu que l'Electeur de Brandebourg, & le Duc de Neubourg réfolurent de le faire valoir par les armes. Or le fond de la contestation confiftoit en ce que Charles V. aïant donné au pere du Duc de Juliers défunt un privilege qui portoit: qu'en cas qu'il n'eut point d'hoirs mâles, une de fes filles aïant des enfans mâles lui fuccederoit : le Duc de Neubourg prétendoit être feul heritier, comme enfant mâle de la feconde des

Daniel hift. de France, & alii

quatre fœurs, à l'exclufion de ceux qui n'étoient AN 1609. fils que de la troifiéme ou de la quatrième, & de l'Electeur de Brandebourg, qui ne descendoit de l'aînée que par une fille.

XIX.

Nouvelle Con

Les premiers mouvemens que cet évenement caufa dans l'Allemagne, réveillèrent l'attention de tous les Princes, & l'Electeur Palatin profita de l'occafion pour se mettre à la tête d'un grand parti, en ranimant les anciennes haines que le temps avoit un peu afsoupies. Il se voïoit pour ainsi dire bloqué au milieu de fes Etats par les Princes Catholiques qui l'environnoient de toutes parts. Devenu difciple de Calvin, après avoir été Lutherien, il craignoit qu'on n'entreprît de le priver de la liberté qu'on n'avoit accordée qu'à ceux qui profeffoient la Confefsion d'Aufbourg. Comme il tenoit le premier rang entre les Princes ennemis des Catholiques, il fe croïoit auffi plus obligé que les autres de pourvoir à la fûreté de fon parti. Il trouva des difpofitions favorables à son dessein dans les Proteftans, qui se plaignoient fans ceffe de la Chambre Imperiale de Spire & du Confeil Aulique. On fe faifoit déja de petites guerres dans les territoires de Strasbourg, de Paffau, & d'Aix-la-Chapelle. Ainfi l'Electeur n'eut pas de peine à perfuader à plufieurs Princes & Etats Proteftans, de s'unir enfemble pour leur défense commune, & il fit aisément paffer dans des efprits déja aigris,toutes les craintes & les défiances dont il étoit agité.

Ce fut ainfi que fe forma cette Confederation, federation entre qui fe donna le nom d'Union Evangelique. Le Duc de Wirtemberg, Maurice Lantgrave de Heffe-Caf

les Proteftans.

Suecicarum

fel, Joachim Erneft Marquis d'Onolfbach, ou d'Anfpach, Frideric Marquis de Bade-Dourlach, AN 1609. Christian Prince d'Anhalt, plufieurs autres Princes,,Pufendorf re& la plupart des Villes Imperiales y entrerent, & 1.1. Frideric V. Electeur Palatin en fut declaré le chef. La nouvelle de cette union donna l'allarme à tous

Heiff. Hift. de

Empire.

X X.
Ligue des Ca-

les Catholiques, qui fongerent auffi-tôt à fe liguer tholiques.
auffi de leur côté, pour s'oppofer aux deffeins des
Proteftans. Dans cette Confederation qu'on nomma
la Ligue Catholique, entrerent Maximilien Duc de
Baviere, qui en fut nommé le Chef fous l'autorité
de l'Empereur, les Electeurs de Maïence, de Co-
logne & de Treves, l'Archevêque de Saltzbourg,
les Evêques de Bamberg, de Wirtzbourg & d'Aichf-
tedt, les Archiducs d'Autriche, & plufieurs autres
Princes de l'Empire. Le Pape même, le Roi d'Efpa-
gne, & quelques-autres Princes étrangers voulurent
être admis. Elle fut encore fortifiée de deux
Princes Proteftans qui furent Jean-Georges Elec-
teur de Saxe, & le Lantgrave de Heffe-Darmstadt.
Le premier, jaloux du choix qu'on avoit fait de
l'Electeur Palatin pour être le Chef de l'Union,
après avoir inutilement fait tous fes efforts pour la
rompre, aima mieux fe jetter dans le parti Catho-
lique où il étoit d'ailleurs fortement attiré par l'ef-
perance dont on le flatoit de l'inveftiture des Du-
chez de Cleves & de Juliers. Le fecond efperoit auffi
se rendre l'Empereur favorable dans le grand procès
qu'il avoit avec le Lantgrave de Heffe-Caffel pour
la Seigneurie de Marpurg. Pour ce qui eft de l'Elec-
teur de Brandebourg, comme fes Etats fituez à l'ex-

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