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AN. 1637.

LIV.

Le Duc de Parme

pagnols.

que

Duc de Rohan voulut en vain s'y opposer. On lui fit entendre s'il ne fe retiroit avec les troupes, les Grifons fe joindroient aux Efpagnols pour l'y contraindre. Il fallut ceder à la neceflité, & les Efpagnols remporterent ainfi par leur adresse une victoire que la force ouverte ne leur auroit peut-être jamais donnée. Le second Allié que la France perdit traite avec les Ef- fut le Duc de Parme. Depuis la déclaration de guerre les Espagnols l'incommodoient beaucoup en prenant des quartiers d'hiver dans fes Etats où ils s'étoient faifis de Rivalte. Il craignoit même qu'ils ne fiffent bien-tôt de plus grands progrès, & l'éloi gnement de la France ne lui permettoit pas d'en tirer les fecours neceffaires. Il ne voulut cependant pas abandonner le parti de la France en déferteur. İl demanda au Roi fon confentement pour traiter avec les Espagnols, & il l'obtint. Par le traité il promit de demeurer neutre en livrant aux Espagnols la forteresse de Sabionette pour sûreté de fa parole.

LV.

Mort des Ducs

Mantouë.

La France fit encore une autre perte en Italie par de Savoie & de la mort des Ducs de Savoïe & de Mantouë, tous deux fideles Alliez de la France, le premier par politique, le fecond par reconnoiffance autant que par éducation. Tous deux laifferent en mourant leurs Etats à deux enfans en bas âge, fous la régence & la tutelle de deux femmes. La Ducheffe de Savoie mere du jeune Duc François-Hiacinthe, étoit fœur de Louis XIII. & n'eut garde d'abandonner le plan que fon époux lui avoit tracé, qui étoit de demeurer toujours étroitement uni avec la France. Mais fa fidelité lui attira de temps en temps de grands chagrins de la part des deux Princes fes beaux-freres,.

LV E.

Mort du Lant

grave

Cafiel.

de Hefe

tous deux attachez à l'Espagne, & dont l'un commandoit alors les armées Espagnoles en Flandre, & AN. 1637. l'autre qui étoit l'aîné & Cardinal, avoit renoncé au titre de Protecteur de France, pour prendre la protection des Païs heréditaires de la Maison d'Autriche. J'aurai occafion d'en parler ailleurs. La Ducheffe de Mantoue, mere du jeune Prince petit-fils du feu Duc, étoit au contraire toute dévouée à l'Efpagne. Elle fe vit pourtant obligée de diffimuler, parce que les François étoient maîtres de Cafal; mais elle ne put pas toujours fi bien déguiser ses fentimens, qu'elle ne laiflât échapper quelques traits de fon averfion pour la France. Enfin le Lantgrave de Heffe-Caffel autre Allié, mourut encore cette année en Allemagne, & laiffa pareillement le gouvernement de fes Etats à la Princeffe Amelie-Elizabeth de Hanau fon épouse, & mere du jeune Lantgrave. Il eft vrai que le parti ne perdit rien à ce changement; car cette Princeffe qui avoit un efprit & un courage au deffus de fon fexe, demeura toujours fidele aux engagemens que fon époux avoit pris ; & après s'être maintenue dans la régence & la tutelle de fon fils contre les entreprises du Lantgrave de Darmstadt, elle fçût encore par fa conftance & fon habileté éluder les artifices, & repouffer la force que la Maison d'Autriche emploïa tour à tour pour la féduire ou pour l'opprimer.

LVII.

Les Espagnols

portent la guerre

dans le Langue

Cependant la guerre commença cette année à se faire fentir dans une des frontieres de France, qui avoit été jufqu'alors affez tranquile, quoique voifine doc. de l'ennemi. Ce fut dans le Languedoc où le Roi d'Espagne voïant les armées Françoifes occupées ail

Merc. Franc.

leurs entreprit de faire des conquêtes. Le Comte de AN. 1637. Serbellon fut chargé de cette expedition, & il la commença par inveftir Leucate; mais il la finit auffi par cette entreprise. Car la Ville s'étant défenduë affez long-temps pour donner au Duc d'Halluin le loifir d'affembler les Communes & la Nobleffe de la Province avec quelques troupes reglées, ce Duc vint attaquer les lignes des Efpagnols & les contraignit de fe retirer pendant la nuit en abandonnant leurs bagages & leur canon. Le bruit de cette défaite communiqua la terreur à l'autre extrémité de la frontiere, où les ennemis abandonnerent au Duc de la Valette Saint Jean de Luz & les autres petites Places dont ils s'étoient rendus maîtres l'année précedente. Ce fuccès avoit été précedé de la reprife des Illes que les Espagnols avoient prifes fur les côtes de Provence. L'Archevêque de Bourdeaux & le Comte d'Harcourt qui commandoient enfemble une nombreufe flotte fur la Mediterranée, après une defcente inutile & mal concertée en Sardaigne, vinrent attaquer les ifles de Sainte Marguerite & de Saint Honorat. Les François y defcendirent en plein jour & après avoir battu les ennemis à leur defcente, les forcerent dans leurs remparts par autant de fieges qu'il y avoit de forts. Le Duc de Longueville qui com- · mandoit l'armée Françoife en Franche-Comté, prir auffi plufieurs petites Places dans cette Province. En Allemagne le Duc Bernard ne fit rien de memorable, & toute la campagne du Rhin fe borna cette année à quelques efcarmouches, & à de petites entreprifes part & d'autre. Mais les Suedois firent fur l'Elbe quelque chofe de plus glorieux.

de

Exploits du Ge

La faifon d'hiver fi rude fur les bords de l'Elbe & de la Mer Baltique, ne rallentiffoit point l'ardeur AN. 1637. des troupes qui faifoient la guerre dans la Thuringe, LVIII. la Saxe & la Pomeranie. Dès le mois de Janvier de neral Banier danscette année, Banier profitant de fa derniere victoire la haute- Saxe. avoit pris Torgaw dans la haute-Saxe, dont toute la garnifon qui étoit nombreuse avoit racheté fa liberté en s'enrôlant dans les troupes de Suede. Après cette expedition il avoit afficgé Leipfick, fe flattant de l'emporter avant l'arrivée des Imperiaux qui s'approchoient fous la conduite de Gallas. Il hâta les travaux, & fit aux habitans les plus terribles menaces pour les obliger à fe rendre. Mais lorsque tout étoit déja prêt pour l'affaut, l'arrivée des Imperiaux l'obligea de lever le fiege pour ne fe voir pas lui-même afficgé dans fes lignes par une armée beaucoup fuperieure à la fienne. On ne voit gueres dans l'Hiftoire de plus belle retraite que celle que fit ce General dans cette occafion.

Hift. du Maré

Pufendorf. l. 10,

Banier n'avoit que quatorze mille hommes à oppofer à une armée de plus de quarante mille. Cependant il paffe l'Elbe en plein jour à la vue des en- chal de Guebriant nemis, fans abandonner même fon artillerie. Trois 4.4.c.1 jours après il paffe l'Oder avec le même fuccès, & fe met en marche pour fe rendre à Landfberg. Mais il avoit encore la Warte à traverfer, & ce fut là qu'il commença à fentir les plus cruelles inquietudes. Il avoit cru que Wrangel l'attendroit à l'issuë des marais de Cuftrin, & qu'il en défendroit le paffage à l'armée Imperiale, comme il étoit en effet très-aifé de le défendre, ces marais étant fort longs, & y aïant

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LIX

Il est enfermé

máis Wrangel s'étoit pofté de l'autre côté vers SteAN. 1637. tin, & avoit laiffé le paffage des marais libre aux Imperiaux. Ceux-ci les avoient traversez avec une par les Imperiaux. diligence incroïable, & paroifsoient à la vûë de Banier poftez devant Landsberg, ne doutant pas qu'ils ne dûffent avoir bien-tôt toutes les troupes Suedoifes à difcretion avec leur brave General, & on le crut par-tout fur la foi de leurs Lettres. Dans cette extrémité Banier ne put s'empêcher de décharger une partie de fon chagrin fur Beauregard qui réfidoit à l'armée de Suede de la part du Roi de France. Il lui reprocha que le Roi l'avoit trompé : que fi les François avoient fait la diverfion qu'ils avoient promise sur le Rhin, il ne se verroit pas accablé comme il l'étoit, de toutes les forces de l'Empire; & il ajouta dans fa colere, que fi les Suedois & les Allemands. s'uniffoient un jour contre la France, ils ne feroient pas fi lents à paffer le Rhin. Beauregard répondit avec fermeté & juftifia le Roi ; mais ces éclairciffemens étoient hors de faifon. Banier avoit en tête unc armée qu'il eût été temeraire d'attaquer. Il avoit à gauche l'Oder dont le paffage étoit défendu par un corps de fix mille hommes bien retranchez, & à droite la Pologne où il n'ofoit pas s'engager. Il ne pouvoit fe tirer d'un fi mauvais pas que par quelque heureux ftratageme.Voici celui dont il fe fervit. Il pu blia qu'il alloit gagner la Pomeranie par la Pologne, & pour rendre la chofe plus vrai-femblable, il donna des ordres feveres pour empêcher les foldats de faire le moindre dégât dans leur marche ; il fit prendre les devants à fa femme & à fes équipages. Il feignit de vouloir corrompre un prifonnier Allemand à qui

LX.

Il fait une belle retraite.

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