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gement en matiere de Religion, qu'il fatisferoit aux prétentions du Duc de Nevers & du Marquis de AN. 1611. Burgau, & qu'il païeroit les frais que l'Empereur & l'Archiduc Leopold avoient faits dans cette guerre. Frivole inveftiture, qui n'empêcha pas que les deux Princes ne demeuraffent en poffeffion d'un heritage qui étoit devenu leur conquête.

XXV.

Défordres com

troupes de l'Ar

Merc. Franc.

L'Archiduc Leopold fit cependant quelques tentatives pour fecourir Juliers lorfqu'on l'afficgcoit; mis à Paffau & cu mais le contre-coup de cette entreprise retomba fur Boheme, par es d'autres Provinces par un effet de cette confufion chiduc Leopold. generale où étoient toutes les affaires de l'Empire, par la foibleffe & la nonchalance du Chef. Les premiers défordres commencerent dans le territoire de Paffau, où l'armée affemblée fous le commandement de l'Archiduc, ne recevant point de païe, fe dédommagea par les violences & par la désolation de la campagne. De-là paffant jufqu'à la Capitale de Boheme, après avoir forcé & pillé quelques Villes fur fon paffage, elle furprit la petite Prague, qui n'eft feparée de la neuve & de la vieille Prague, que par la Molde. Elle y commit une infinité de défordres que les troupes prétendoient justifier par le défaut de païe, & que Leopold autorifoit par le prétexte de maintenir l'autorité de l'Empereur.

Il y avoit en effet plufieurs années que le peuple & les Grands du Roïaume, également irritez des infractions continuelles qu'ils prétendoient qu'on faifoit à leurs privileges, & du peu de liberté qu'on accordoit aux Proteftans, rongcoient avec dépit le frein qui les retenoit. L'Empereur n'avoit ni assez d'habileté, ni assez de force pour les dompter, &

ils étoient eux-mêmes trop foibles pour fecoüer enAN 1611. tierement le joug. De-là naiffoit une oppofition continuelle entre les fujets & le Souverain; fource féconde d'aigreurs & de murmures, de plaintes & de feditions. On crut que ce fut Rodolphe luimême qui attira les troupes de Leopold dans le Roïaume pour châtier les peuples & s'en faire craindre; mais ce châtiment mal entendu qu'il n'ofa point avouer, & qui étoit en effet un vrai brigan dage plûtôt qu'une execution de juftice fouveraine, ne servit qu'à irriter les peuples, & à rendre l'Empereur plus méprisable.

XXVI. L'Archiduc Ma

Dans la neuve Prague, les Proteftans aïant pris les armes pour s'opposer aux troupes de Leopold, les tournerent auffi-tôt contre les Eglifes & les Monafteres. Ils affommerent impitoïablement tous les Religieux, ils pillerent les vafes facrez, foulerent aux pieds les Reliques, & traînerent ignominieusement dans les ruës les images des Saints, tandis que l'Empereur spectateur prefque oifif de ces défordres, paffoit les journées entieres dans fon château avec des Peintres, des Tourneurs & des Chymiftes. Dans la vieille Prague, les Magiftrats moins violens où plus refpectez, continrent la fureur du peuple; mais leur autorité n'auroit pas tenu long-temps contre l'emportement d'une populace mutinée, fi l'Archiduc Mathias qui étoit alors en Hongrie, n'étoit accouru promptement avec une armée, pour délivrer la Ville, & y rétablir le calme.

Ce Prince qui vouloit mettre encore fur la tête thias délivre Pra- la Couronne de Boheme, avec celle de Hongric qu'il avoit déja enlevée à Rodolphe, prenoit hau

gue,

tement dans toutes les occafions la protection de

Mercure Fran

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ces peuples contre leur Souverain. A fon approche, AN 1612. l'Empereur furpris de la promptitude de fa marche Heiss. & du grand nombre de fes troupes, & appréhendant les fuites funeftes du choc de deux armées dans une même Ville, fe hâta de congedier les troupes de Leopold. Elles firent encore de grands ravages dans leur retraite, & porterent dans les Provinces le carnage, les incendies & la défolation. Mais enfin Mathias après avoir pacifié la Capitale, vint à bout de faire fortir du Roïaume cette armée de bandits, qui laiffa cependant par-tout après elle les plus triftes marques de fa cruauté.

XXVII que

Jamais fervice ne fut mieux païé que celui Mathias rendit en cette occafion à un peuple opprimé. La Couronne de Boheme depuis long-temps l'objet de fon ambition, fut le prix de fon zele. Rodolphe auffi peu capable de la conferver, qu'il étoit peu digne de la porter, fe laiffa pour la feconde fois dépouiller prefque fans résistance; & étant mort quelques mois après, Mathias déja fi puiffant par l'acquifition de deux Roïaumes, cut encore le crédit de fe faire élire Empereur, réüniffant ainfi dans sa personne toute la dépouille de son

frere.

Alors fon ambition n'aïant plus rien à défirer, fit place auffi-tôt au zele de la Religion. Il ceffa de diffimuler avec les Proteftans, & après les avoir menagez pour devenir leur maître, il voulut leur faire fentir qu'il l'étoit. Mais il ne fut pas longtemps à s'appercevoir que fon changement les irri

Mathias eft

couronné Roi de fuite Empereur.

Boheme, & en

AN 1613.

XXVIII.

L'Electeur de

treprend fur les

Le fait Catholique.

fon indulgence. Car dans deux Dietes qu'il convoqua à Ratisbonne & à Lintz pour obtenir des fecours contre Betlem - Gabor Prince de Tranfilvanie qui faifoit de fréquentes irruptions dans la Hongrie, les Proteftans eurent l'adrefle d'éluder toutes fes propofitions, & de rendre ces deux Dietes inutiles. La conteftation fur la fucceffion de Cleves & de Brandebourg en- Juliers, étoit alors plus animée que jamais. L'Elecdis du Duc de teur de Brandebourg ennuïé de partager la possesNeubourg, lequel fion de ces Etats, fit faire par fes Officiers quelques entreprises contraires aux droits du Duc de Neubourg. Ce Prince après avoir fait inutilement fes plaintes & fes oppofitions, ufa de repréfailles, & infenfiblement les chofes s'aigrirent à un tel point, que fans en venir cependant à une guerre déclarée, chacun des deux Princes emploïa fes armes & celles de fes Alliez à fe fortifier dans les Places qu'il occupoit, & à furprendre celles de fon adversaire. L'Electeur de Saxe faisant auffi valoir de fon côté l'inveftiture qu'il avoit requë de l'Empereur Rodolphe, obtint de l'Archiduc Albert Gouverneur des PaïsBas pour le Roi d'Espagne, la poffeffion de l'Hôtel de Cleves dans la ville de Bruxelles, & de tous les Fiefs dépendans du Comté de Ravenftein. L'Electeur de Brandebourg voulut furprendre Duffeldorp; mais il manqua fon coup. Les Provinces - Unics s'emparerent de Juliers fous prétexte de tenir cette Place en fequeftre, & en effet pour l'assurer à l'Electeur de Brandebourg. Le Duc de Neubourg fe faifit de fon côté de plufieurs Places dans le Duché de Bergh; & comme fon competiteur avoit mis dans fes interêts la République des Provinces-Unies,

il

il chercha aussi un appui dans l'alliance qu'il fit avec la Maifon de Baviere, en époufant la Princeffe AN. 1613. Madelaine, fœur du Duc Maximilien & de l'Electeur de Cologne. Il fit plus quelques mois après; car il abjura le Lutheranifme, & rentra dans l'obéïffance de l'Eglife Romaine. Par-là il s'assura le secours de la ligue Catholique, la protection de l'Empereur, & fur-tout l'appui de la Couronne d'Efpagne qui le fervit efficacement.

L'Espagne & les

dans la guerre de

Juliers.

Les Espagnols & les Hollandois avoient par des XXIX. vûës tout oppofées un interêt égal à fe rendre maî- Provinces Unies, tres de quelques Places fortes dans les Duchez de prennent parti Cleves & de Juliers: les premiers pour conserver la liberté du paffage aux fecours qui leur venoient d'Allemagne, les feconds pour mettre de ce côté-là une barriere entr'eux & la Maifon d'Autriche. La treve de douze ans concluë entre l'Espagne & la République depuis 1609. aïant suspendu toutes les hoftilitez dans les Païs-Bas, les deux partis eurent la liberté de porter leurs armes dans ces Provinces voifincs. D'un côté le Marquis de Spinola & de l'autre le Prince d'Orange Henri-Frideric se saifirent de plufieurs Places, l'un fous le nom du Duc de Neubourg, l'autre fous celui de l'Electeur de Brandebourg. Ils firent ainsi sentir aux peuples tous les maux de la guerre fous prétexte de leur donner la paix, & dépouillerent les deux Princes en affectant de vouloir les rétablir: trifte condition des peuples dont la Souveraineté eft en litige, & des Princes qui font obligez d'avoir recours à des protecteurs trop puiffans.

Comme ces mouvemens ne fe faifoient fentir

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