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la guerre au Roi qui n'étoit pas encore né lorsqu'elle

AN. 1644. avoit commencé.

LXVII. Contestation fur

& l'Ambaffadeur

de Venife.

Les Imperiaux & les Efpagnols furent auffi de le cerémonial en- leur côté parfaitement fatisfaits des civilitez du tre le C. d'Avaux Comte d'Avaux. Il n'en fut pas de même de M. Contarini. Le Comte defcendit cinq marches de l'escalier pour le recevoir, & après la vifite faite le reconduifit jufqu'au bas de l'efcalier croïant même exceder en cela les bornes du cerémonial avec les Ambaffadeurs de Venife. Contarini cependant en penfoit bien differemment ; car il prétendit que le Comte devoit encore defcendre un perron de quatre marches qui étoit au bas de l'efcalier, pour le reconduire jufqu'au caroffe & le voir partir. Les Imperiaux & les Espagnols en avoient ainfi ufé avec lui, & le Comte en eût fans doute fait autant s'il n'eût été retenu par une espece de reglement dont on étoit convenu, qui étoit qu'on fuivroit à Munster le même ceremonial qui s'observoit à Rome. Or c'étoit alors l'ufage à Rome que les Ambaffadeurs François ne reçussent & ne reconduififfent ceux de la République de Venife que jufques au haut de l'efcalier. Il eft vrai que les Venitiens en ufoient de la même maniere avec les François, comme par repréfailles; mais leur conduite en cela étoit regardée plûtôt comme un effet de leur dépit, que comme un cerémonial bien mefuré. Contarini repliquoit que Meffieurs de Baffompierre & de Châteauneuf l'avoient reconduit en Angleterre jufques au caroffe, & qu'il ne fe feroit jamais attendu à recevoir une pareille mortification de la part d'un homme autant aimé de la République que l'étoit le Comte d'Avaux: à

quoi le Comte répondoit que les exemples ne l'autorifoient point à paffer les bornes que fon devoir AN. 1644. lui prefcrivoit; qu'il ne lui étoit pas permis de s'acquitter envers la République aux dépens des droits de fon Maître ; & qu'il écriroit lui-même à la Cour pour obtenir la permission de le fatisfaire.

Il paroiffoit important d'établir quelque difference dans le cerémonial entre la France & la République de Venife, pour ne pas fe mettre dans la neceffité d'accorder dans la fuite la même égalité aux Députez de Hollande qui juftifioient leurs prétentions par l'exemple des Venitiens. Contarini avoit d'ailleurs un moïen facile de mettre à couvert le droit prétendu de fa République en ne rendant au Comte d'Avaux que ce qu'il en avoit reçû, comme il fe pratiquoit à Rome. Le Comte d'Avaux lui en donna même l'occafion dans le compliment qu'il lui fit lorfqu'il l'alla voir; mais Contarini aima mieux profiter d'une conjoncture qui paroiffoit fi favorable pour pourfuivre fes droits à la Cour de France. Ainfi il reconduifit le Comte d'Avaux jufqu'à fon caroffe, & continua cependant à témoigner fon mécontentement, en affectant de paffer tous les jours deux ou trois heures chez les Imperiaux & les Efpagnols fans aller chez le Comte.

LXVHF. La Cour de

Il est probable que dans d'autres circonstances la Cour de France n'auroit pas manqué de foutenir la France fe relâche conduite de fon Ambaffadeur; mais il étoit d'une en faveur de la République de extrême conféquence pour le fuccès de la négocia- Venife. tion de ne pas choquer un Médiateur qui pouvoit être fort utile, ou nuire beaucoup aux interêts des

potentiaires à M. de Brienne, le 23. Avril 1644.

ordre aux deux Plenipotentiaires François d'accorder AN. 1644. à Contarini tous les honneurs qu'il demandoit. Avant que cet ordre fût venu,les Efpagnols à cette occafion, Lettre des Pleni- donnerent une fcene à laquelle on ne s'attendoit pas; car faifant femblant d'être fâchez de la mauvaise intelligence que ce démêlé pouvoit caufer entre les Ambaffadeurs de France & ceux de la République, ils offrirent au Comte d'Avaux leur médiation pour l'accommoder avec Contarini. Ils lui firent repréfenter que quelque confiance qu'il dût avoir en M. Chigi, il ne devoit pas moins ménager M. Contarini dont la médiation étoit abfolument neceffaire. Il ne fut pas difficile au Comte d'Avaux d'appercevoir la malignité de cette propofition, qui étoit d'ail leurs ridicule en ce qu'elle fuppofoit que les François feroient affez bons pour rendre les Espagnols arbitres de leurs interêts, & pour les laiffer acquerir auprès de Contarini aux dépens de la France même le merite de lui avoir procuré les honneurs qu'il demandoit. Le Comte d'Avaux les remercia comme il devoit, & cependant il executa avec M. de Servien qui étoit arrivé depuis peu de jours, l'ordre qu'il avoit reçû de la Cour de fatisfaire M. Contarini. Ce Seigneur en eut une extrême joïe, & ce petit differend ne fervit qu'à augmenter la bonne intelligence.

LXIX.

potentiaires Efpa

Munster,

Sur ces entrefaites le Comte Zapata de Valtierra, Un des Pleni- fecond Plenipotentiaire d'Espagne mourut à Munf gnols meurt à ter. Il n'avoit jamais eu d'autre emploi que celui de tenir compagnie au Comte de Naffau à Cologne, où l'Empereur & le Roi d'Efpagne firent faire à l'un & à l'autre pendant plufieurs années le perfonnage d'Ambaffadeurs,

d'Ambafladeurs, pour amufer les peuples, & fi le caractere que le Comte d'Avaux en fit à la Cour de AN. 1644. France eft vrai, cet Ambassadeur n'étoit capable à Munster que d'étudier & de copier le Confeiller Brun, qui étoit le troifiéme de l'Ambaffade d'Efpagne. Le Marquis de Caftel Rodrigue étoit, difoit-on, deftiné à remplir la place vacante, & on attendoit fon

arrivée.

LXX. Prieres publiques

verture des Con

Cependant le Nonce ne voïant plus d'obstacle à la négociation, voulut la commencer par trois jours ordonnées par le de prieres publiques qu'il ordonna pour demander Nonce, pour l'onà Dieu qu'il éclairât le zele des Médiateurs & des ferences. Plenipotentiaires, & qu'il accordât aux peuples ce don précieux de la paix qui ne peut jamais être l'ouvrage des hommes. Pendant tout ce temps-là toute la Ville fut en prieres. Le troifiéme jour on devoit terminer les dévotions par une Proceffion generale autour de la Ville, fuivie d'une Meffe folennelle. Mais comme tous les Plenipotentiaires devoient af sister à cette cerémonie il fallut prévenir les contestations & les querelles.

LXXI.

Contestations

Le Nonce en auroit caufée une lui-même s'il avoit été moins moderé. Il avoit fait préparer pour lui dans fur le ceremonial, l'Eglife un dais, afin d'y affifter à l'office qui devoit fe faire après la Proceffion. Les Plenipotentiaires François en aïant été avertis, lui firent dire que s'il vouloit officier en habits Pontificaux, il étoit jufte qu'il eût un dais : finon, qu'il falloit qu'il le fît ôter & qu'il fe contentât d'être affis à la tête des premiers Ambaffadeurs du Monde Chrétien. Le Nonce y confentit fans peine, & après avoir porté le faint Sacrement jufqu'à une Eglife, il le donna au Suffragant,

reprit fes habits ordinaires,& s'affit à la tête des AmAN. 1644. baffadeurs.

Les Imperiaux avoient auffi fait placer leurs chaises dans l'Eglise un peu au dessus de celles des François. Ceux-ci firent encore réformer cet arrangement. Les chaifes des uns & des autres toutes égales, furent placées fur une même ligne à main gauche du chœur : la premiere pour le Nonce, les deux fuivantes dans la même ligne pour les deux Plenipotentiaires de l'Empereur : les deux autres encore dans la même ligne pour les deux Plenipotentiaires François, & la derniere pour Monfieur Contarini. Il ne fut pas fi aifé de regler la marche de la Proceffion. Car les Imperiaux vouloient marcher les premiers, le Comte de Naffau d'un côté de la ruë, & le Docteur Volmar de l'autre. Mais les Plenipotentiaires de France s'y oppoferent encore & prétendirent que le premier d'entre eux devoit marcher à côté du premier des Imperiaux, & le second enfuite à côté du fecond. Le Nonce eut beaucoup de peine à vaincre l'obftination des Imperiaux. Enfin ils cederent, & la chofe fut ainfi executée, de maniere que le Comte d'Avaux marcha à côté du Comte de Naffau, & après eux le Comte de Servien à côté de Volmar, ce qui fut regardé comme une grande victoire pour les François, quoique dans le fond, on Ouverture des ne leur cedât que ce qui leur étoit dû. Pour ce qui est des Efpagnols, comme ils étoient bien informez de la réfolution où étoient les Ambaffadeurs de France de défendre leur rang, ils prirent le parti de leur ceder la place en demeurant chez eux. Contarini s'absenta auffi de la Proceffion, parce qu'il avoit eu

LXXII.

Conferences.

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