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Apr. J. C.

khan.

tous fes biens, on détruifit les monumens fur lefquels étoit L'an 1323. gravé fon éloge, & on le dépouilla de tous fes titres. En Chotepala même tems Paitchou, qui étoit de retour, fit remettre aux provinces les tailles & le tribut annuel, & de concert avec I'Empereur, il bannit de la Cour l'avarice, le luxe & la débauche. Tout annonçoit un regne heureux; mais Tieché, fils adoptif de Tiemoutiulh, qui ne cherchoit que les occafions de fe venger des traitemens faits à fon pere, fe for ma un parti confidérable de quelques mécontens, c'est-àdire, des parens & des amis de ceux que le Prince avoit fait punir à cause de leurs crimes. Ils avoient mis les Lamas dans leurs intérêts, & ceux-ci qui avoient accès auprès du Prince, le follicitoient de faire des facrifices à Fo, afin d'éviter les maux dont l'Empire étoit menacé. Paitchou renvoyoit ces Lamas, en leur reprochant de ne fonger qu'à ramaffer de l'argent & de ne protéger que des fcélérats. Quelques Miniftres qui leur étoient attachés, & qui redoutoient la probité, la vigilance & la valeur de Paitchou, délibérerent auffi-tôt entre eux fur les moyens de le prévenir, & peu de tems après Tieché, fuivi de plufieurs foldats, le fit affaffiner; il alla enfuite à la tente de l'Empereur, où il tua de fa propre main ce jeune Prince qui n'étoit âgé que

de 21 an.

Les Conjurés avoient effayé de mettre dans leur parti Efuntimour (a), petit-fils de Kublai, qui commandoit au Nord du Défert, en lui offrant le trône. Ils avoient rapporté à ce Prince que l'Empereur vouloit le faire mourir. Mais Efuntimour n'avoit pas été plutôt inftruit de leur projet, qu'il avoit envoyé plufieurs couriers à Pe-king pour en informer l'Empereur. Ceux-ci arriverent trop tard, & trouverent l'Empereur affaffiné. Dans cet événement malheureux deux Miniftres (b) fe faifirent du fceau de l'Empire & des habits impériaux, & fe rendirent auprès d'Efuntimour khan. qui fe fit proclamer grand Khan (c). La conduite de ce Prince fit voir que malgré les courriers qu'il avoit envoyés, Taiting il pouvoit avoir eu quelque part à l'affaffinat du feu Empe

Efunti

mour

ou

(4) Fils aîné du Prince Canmala.
(b) Gantipouhoa & Yefientimour.

(c) Les Chinois le nomment Tais ting

mour

reur, puifqu'il donna les premieres charges de l'Empire à Tieché & à fes complices; il fallut que Mainou lui repré- L'an 1323. Apr. J. C. fentât qu'il alloit fe perdre dans l'efprit des Mogols & des Efunti Chinois, & que la poftérité lui reprocheroit toujours d'avoir khan. trempé fes mains dans le fang de fon Souverain & dans celui d'un aussi grand Miniftre que Paitchou, aux ancêtres du quel les Mogols devoient l'établissement de leur Empire. Ĉe Prince fit auffi-tôt mourir ceux des complices qui étoient auprès de lui, & envoya à Pe-king faire arrêter Tieché & les autres qui furent également mis à mort. Toute leur famille fut détruite, & leurs biens confifqués; plufieurs Prin ces furent exilés. Efuntimour arrivé à Pe-king, rétablit la mé~ moire de plusieurs Miniftres que Tiemoutiulh avoit fait mourir injuftement.Enfuite par le confeil de Tchang-kouei, un des plus fermes & des plus fages Miniftres que les Mogols aient eus ce Prince nomma des Docteurs pour expliquer tous les jours dans le palais, les livres qui font le plus propres à former les Princes & les Grands au Gouvernement, & ordonna à fon fils & aux Princes de fa famille, d'aller écouter ces leçons publiques. Cette coutume s'obferve encore.

Dans le tems que ce Prince étoit à Chang-tou, un grand vent, une violente tempête, fuivis d'un tremblement de terre & d'une éclipfe totale de lune, cauferent de grandes allarmes dans cette Cour. Les Grands & les Lettrés Chinois, qui ne cherchoient que l'occafion de faire connoître à la poftérité quels étoient leurs fentimens fur l'attentat de Tieché, fur le culte de Fo, & fur plufieurs autres abus, dirent publiquement que le Ciel étoit irrité. L'Empereur faifi de crainte, ordonna qu'on lui préfentât un mémoire, dans le quel on expoferoit fincérement tout ce qu'on avoit à lui re~ ́ procher dans fa conduite. Tchang-kouei, qui fut nommé par les Miniftres, par les Grands & par tous les Docteurs, pour le dreffer, y demande d'abord une juftice entiere de l'horrible attentat commis par Tieché; fe plaint de ce qu'on a rendu les biens de Sonan, fils de Tiemoutiulh, & de ce que les fils de ce Sonan paroiffent encore à la Cour. Il veut que les Princes qui n'avoient été qu'exilés, & qui avoient eu part à l'affaffinat, foient punis de mort; qu'on dépouille de biens

L'an 1374

L'an 1324. Efunti

mour

khan.

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& de titres, ou au moins qu'on exile Toto, Gouverneur du Apr. J. C. Leao-tong, qui à la faveur des troubles dont l'Empire étoit agité, avoit ôté la vie à plufieurs Princes & Princeffes du fang. L'impunition de ces crimes, dit-il, fait craindre la ruine prochaine de l'Empire. Sous prétexte, ajoute-t-il, que la Cour fouhaite des pierreries, il s'en fait un commerce fordide, & on n'a pas honte de les faire payer à l'Empereur dix fois plus qu'elles n'ont été achetées. Pour faire fa cour en offrant de pareilles chofes qui ne font d'au- . cune utilité, on ne compte pour rien la ruine des familles » & des provinces. Un Prince ne doit penfer qu'à gouverner l'Empire en pere de fes fujets, & ne pas chercher à » être heureux par le fecours des Bonzes ou des Lamas. Ce n'eft que depuis que ces Bonzes font tant de facrifices & » de prieres à Fo, que le Ciel a donné des marques conti»nuelles de fa colere, & on ne doit s'attendre à être heu » reux qu'après qu'on aura détruit le culte de Fo, & qu'on » aura chaffé ces Bonzes. Pendant que le palais du Prince » eft rempli d'Eunuques, d'Aftrologues, de Médecins, de » femmes, & d'autres gens oififs, dont l'entretien monte à » des fommes exorbitantes, les peuples font plongés dans » une mifere extrême. L'Empire eft une famille dont l'Em » pereur eft le pere, il ne convient pas que parmi les eny en ait qui meurent faute de fecours & d'attention; & il convient encore moins qu'un Prince croie indigne de fa grandeur d'écouter les cris des miférables. Pen» dant le miniftere de Tiemoutiulh, plufieurs innocens ont été condamnés à mort; il faut aujourd'hui rechercher leurs familles défolées, les dédommager, vifiter les prisons, examiner l'état des villes & des campagnes, afin de fecou» rir des familles abandonnées & des innocens opprimés par les fcélérats que les mauvais Miniftres ont employés. Il »>faut encore envoyer des commiffaires fur les frontieres pour » examiner ce que les troupes ont fouffert, faire porter les corps morts dans les pays où font leurs parens, afin qu'ils puiffent leur donner la fépulture; fournir des fecours & des remedes aux pauvres malades, & défendre la pêche des perles dans la province de Canton. Trop de gens périffent

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pour aller chercher au fond de la mer des chofes fi peu

Apr. J. C.

L'an 1324

mour

L'an 13264

» utiles. » L'Empereur lut avec plaifir ce Mémoire, mais la crainte Efuntide révolter les Mogols l'empêcha d'abolir le culte de Fo; khan. il ne fit pas mourir ceux qui étoient accufés, & parut affez indifférent pour le refte. Tchang-kouei ne retira d'autre fruit que des éloges de la part des Grands, & on déplora des tems fi fâcheux. Cependant les provinces de Chan-tong & de Pe-tcheli ayant été affligées d'une grande famine, ce Prince suivit en tout les vûes de fon Miniftre pour le fecours des peuples, & réprima un peu l'infolence des Lamas qui avoient trop de crédit à fa Cour, & fur-tout auprès des Princeffes. Ces fortes de Religieux qui couroient fouvent les provinces avec le train & l'équipage d'un Prince, étoient à charge au peuple, obligé de leur fournir des chevaux & des provifions. Tous les Chinois portoient des plaintes de leur vie déréglée..

Efuntimour s'attira enfuite la haine de tous les Chinois, L'an 13279 par le refus qu'il fit d'aller en perfonne faire le facrifice au Ciel; il vouloit, fuivant une loi de Kublai, y envoyer une autre perfonne à fa place. Par-là il fe fit regarder comme un Prince peu exactà garder les devoirs de fon Etat, & l'on attribue à fa négligence tous les malheurs qui affligerent l'Empire, tels qu'une féchereffe, une famine, une inonda- L'an 1328, tion, l'éboulement de quelques montagnes, un tremblement de terre, & une éclipfe de Soleil. Ce Prince fe rendit enfuite de Pe-king à Chang-tou, laiffa la garde de la premiere de ces villes à Yentimour, qui étoit alors un de fes meilleurs Généraux, & envoya de Prince Daouatmour en exil dans le Hou-kouang; mais peu de tems après il mourut âgé de 36 ans, laiffant la Cour pleine de brigues & de factions. Efuntimour avoit fait traduire quelque tems auparavant en langue Mogole la grande Hiftoire de la Chine, compofée par Sema-kouang, un des meilleurs Hiftoriens de l'Empire, & diftribuer dans tous fes Etats des eftampes où étoit dépeint l'art d'élever les vers à foye, de travailler la foye, & la maniere de cultiver les terres, avec un imprimé qui contenoit des inftructions relatives à ce sujet,

Apr. J. C.

L'an 1328.
Efunti-

mour

khan,

Après la mort d'Efun-timour, l'Impératrice (a) envoya Oupetoula à Pe-king, pour se saisir au nom d'Afoukipa fon fils des fceaux de l'Empire, & engager le peuple à reconnoître ce Prince pour Empereur. Mais Yen-timour qui commandoit dans Pe-king, réfolu de mettre fur le trône l'un des deux enfans de l'Empereur Caifchan, c'eft-à-dire, Daouatmour qui étoit exilé dans le Hou-kouang, ou Coufchilai qui étoit en Tartarie, plaça des troupes dans tous les quartiers, s'empara des portes de la ville & du palais, & affembla dans une des falles de ce palais les Grands, auxquels il déclara qu'il feroit mourir ceux qui s'oppoferoient à fes deffeins. Il fit enfuite arrêter Oupetoula,& tous ceux qui lui étoient fufpects, nomma des Officiers, & donna plein-pouvoir au Général Tchaochi-yen. Alors il fit venir les Officiers fubalternes qui n'étoient inftruits de rien, & dans l'affemblée généra le des Généraux & des troupes, il leur ordonna de fe proftergenoux, le vifage tourné vers le Midi. On vit par-là que fon deffein étoit de proclamer Daouatmour, qui étoit dans le Hou-kouang, province Méridionale. En attendant les deux Princes qu'il avoit fait avertir, il étoit continuellement à cheval, & peu de gens fçavoient le lieu où il fe retiroit pendant la nuit. Bientôt il fit courir le bruit que ces deux Princes alloient arriver. Pe-yen, Gouverneur du Honan, inftruit de fes deffeins, s'efforça de les feconder en faifant mourir ceux qui étoient fufpects, & reconnoître Daouatmour par les troupes. Satun, frere d'Yen-timour s'empara du pofte important de Ku-yong-kouan, un autre de Koupekeou...

ner à

Pendant que Yen-timour fe donnoit tant de mouvemens dans Pe-king, Taolacha faifoit proclamer Empereur Afou kipa (b), fils d'Efun-timour, à qui, fuivant les Loix de la Chine, l'Empire appartenoit, ayant été déclaré Prince héritier; plufieurs Princes du fang fe joignirent à lui, & la plupart des Gouverneurs de Provinces, des Officiers & foldats Occidentaux étoient portés à le fuivre. La présence de Daouatmour à Pe-king ranima fon parti dans cette ville;

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