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Apr. J. C.
L'an 1219.

Aboulfedha

Aboulfaradge. Pétis.

befoin actuel, & abandonna tout le refte au pillage. Ce Prince arriva (a) enfin devant Bokhara (b), une des Genghiz- plus célèbres villes de ce pays, tant par fa grandeur, par khan. le nombre de fes habitans, que par fon Université où les Musulmans venoient apprendre les Sciences. Le Sulthan Mohammed y avoit laiffé une garnifon de vingt mille homHift.géné. mes fous les ordres de Kouk khan, de Siundge khan & des Tatars. de Kefchlouk khan. Avec une fi nombreuse garnifon, plufieurs des principaux habitans efpéroient que les Mogols feroient obligés de lever le fiége, plufieurs fe préparoient déja à une vigoureuse défense; d'autres propofoient qu'on se soumît. Les trois Commandans firent une fortie à la faveur de la nuit avec toutes leurs troupes ; mais ils furent repouffés & cet échec leur ayant fait perdre courage, ils rentrerent dans la ville pour en fortir auffi-tôt par une porte oppofée avec tous leurs gens, dans le deffein de fe retirer dans le Kharizme, Genghizkhan les fit pourfuivre par un détachement de fa cavalerie, & ils furent taillés en pieces au bord de l'Amou ou de l'Oxus. Les habitans ainfi abandonnés par les troupes, ne fongerent plus qu'à capituler. Tout y étoit dans le trouble & dans la confufion, les cruautés que les Mogols exerçoient fur les vaincus faifoient craindre un pareil traitement, & alors on n'écoutoit plus que le défespoir, on vouloit prendre les armes pour fe défendre jufqu'à l'extrémité, & vendre cherement fa vie. Enfin tout fe calma , les principaux habitans, précédés de gens de Loi & des Sçavans, ouvrirent les portes, & vinrent présenter à Genghizkhan les clefs de la ville.

Genghizkhan en entrant dans Bokhara, paffa dans une rue où il vit un grand bâtiment qu'on lui dit être une Mosquée, il defcendit auffi-tôt de cheval, monta fur la tribune, & en arraché l'Alcoran, il le jetta fous les pieds des chevaux. Cette action fit murmurer quelques Mufulmans; mais la crainte où l'on étoit impofa filence. Les foldats Mogols fans respect pour ce lieu,y commirent plufieurs excès. Enfuite Gen

ayant

(a) Le premier de Rabi elakher de (b) Les Chinois la nomment Pou-hoa l'an 616 de l'Hegire. Aboulfaradge ou Pou-hoa-ulh,

met en 617.

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ghizkhan fe rendit dans l'endroit où les Mufulmans s'affenbloient aux grandes Fêtes, monta de rechef fur la tribune Apr. J. C. en présence des habitans, leur rapporta dans un difcours Genghi qu'il fit, la perfidie du Sulthan Mohammed, & fur-tout le khan. maffacre des Ambaffadeurs Mogols à Otrar, il ajouta que Dieu l'avoit envoyé pour venger fur eux les crimes de leur Maître, & il exigea qu'ils lui remiffent toutes les richeffes qu'ils tenoient cachées, en les menaçant que s'ils n’obéiffoient pas il fçauroit les y contraindre par les tourmens. Il établit à cet effet des Bureaux dans tous les quartiers de la ville, & défendit à fes foldats de maltraiter perfonne. Pendant le tems que ces malheureux habitans s'empreffoient d'exécuter fes ordres, Genghizkhan apprit que quelques foldats Kharizmiens fe tenoient cachés dans un endroit de la ville, il fit mettre le feu dans ce quartier, & comme toutes les maisons de Bokhara n'étoient que de bois, toute la ville fut réduite en cendres, & les habitans obligés de fe difperfer dans le Khorafan.

Pendant que Genghizkhan étoit occupé du fiége de Bokhara, fes deux enfans Oktai & Zagatai étoient devant Otrar, dont Ghaïrkhan, auteur du maffacre des Ambaffadeurs, étoit Gouverneur. Le Sulthan de Kharizme avoit eu la précaution d'y envoyer quinze mille hommes, dont dix mille étoient commandés par Caradgia hadgib (a) & le refte par Ghaïrkhan; celui-ci qui campoit hors de la ville y étoit rentré auffi-tôt qu'il eût été informé de la marche des Mogols, & s'étoit préparé à faire une vigoureusfe réfiftance. Il fit plufieurs forties fur les Travailleurs, & les incommoda beaucoup. Les Mogols qui étoient depuis cinq mois devant cette ville, commençoient à fe rebuter; ils fe difpofoient même à convertir le fiége en blocus; mais les ordres de Genghizkhan qui vouloit abfolument que l'on s'en rendît maître, leur firent faire de nouveaux efforts. Alors Caradgia had- Pétis. gib, défefpérant de pouvoir réfifter plus long-tems, & crai- Hift. géné. gnant que fi l'on différoit encore de fe rendre, les Mogols Aboulja ne vouluffent point écouter aucune propofition, confeilla radge.

(a) D'autres le nomment Carajacas,

des Tatarse

khan.

à Ghaïrkhan de capituler. Celui-ci qui avoit tout à cram Apr. J. C. dre L'an 1219. pour fa perfonne s'il tomboit entre les mains des MoGenghiz gols, rejetta cette propofition, & réfolut de fe défendre jufqu'à la derniere extrémité. Ce parti détermina Caradgia hadgib qui voyoit qu'il étoit devenu fufpect à Ghairkhan, de fe retirer pendant la nuit avec fes gens & fes amis par la porte appellée Darvafeifofi dont il avoit la garde. Il passa dans l'armée Mogole où il éprouva les malheurs qu'il vouloit éviter. Son action parut trop noire aux yeux de Zagatai & d'Oktai, qui, après avoir tiré de lui les informations néceffaires fur l'état de la ville, le firent égorger comme un traître avec tous fes gens. Ghaïrkhan ne perdit point courage, & n'en devint que plus animé contre les Mogols. Mais comme ceux-ci étoient inftruits des endroits les plus foibles, ils pénétrerent par-là dans la ville l'épée à la main, & il périt beaucoup de monde dans ce premier affaut. Ghaïrkhan voyant que la ville étoit prife, fe retira dans le château avec vingt mille hommes; mais s'y trouvant trop refferré, il fit faire plufieurs forties dans lefquelles il perdoit du monde; c'étoit pour lui un avantage d'autant plus grand, qu'en se mettant plus à l'aife il fatiguoit fans ceffe les Mogols. Ceuxci furent encore long-tems fans pouvoir fe rendre maîtres du château, plus ils redoubloient leurs efforts, plus les Affiégés fe défendoient. On vouloit prendre vif Ghaïrkhan, & les Mogols obligés de diriger leurs coups perdoient beaucoup de foldats; enfin le château fut emporté, & la garnifon paffée fous le fabre. Ghairkhan s'étoit fortifié avec deux hommes dans fon appartement, où il se défendit jusqu'à ce que fes deux compagnons euffent été tués à fes côtés, alors fa femme lui fournit des pierres qu'il jettoit fur ceux qui approchoient; enfin ne pouvant plus réfifter à la multitude, il fut fait prifonnier & conduit aux Mogols qui le chargerent de chaînes, & le renfermerent dans une étroite prifon en attendant les ordres de Genghizkhan. Ils les reçurent à Kouk-ferai comme ils alloient rejoindre ce Prince vers Bokhara, & ils firent mourir Gaïrkhan. Après la prife d'Otrar on répara les murailles de cette ville, mais on rafa le château, on laiffa dans la ville une garnison, & les habi

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tans qui avoient été chaffés auparavant, eurent la permission d'y rentrer.

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khan.

Toufchi ne fut pas moins heureux que fes freres dans Genghizl'expédition qu'il fut chargé de faire lorfque fon pere se rendit à Bokhara. Il commença par le fiége de Saganac; comme il avoit ordre de ne pas ufer de violence, auffi-tôt qu'il fut proche de cette ville, il envoya un Mufulman nommé Haffan-hadgi, pour fommer les habitans de fe foumettre s'ils vouloient éviter la fureur du foldat. Les habitans loin d'écouter ces propofitions firent mourir l'Envoyé. Alors Toufchi animé d'une jufte indignation, attaqua la ville & l'emporta d'affaut. Il périt dans ce maffacre plus de dix mille hommes, Saganac fut mife au pillage, & perfonne ne fut épargné. Toufchi y laiffa le fils d'Haffan-hadgi, & marcha vers Uzkend ou Fergana. Les habitans de celle-ci effrayés du fort de ceux de Saganac, envoyerent des Députés à Toufchi avec des préfens, & fe foumirent de bonne volonté. Ce Prince leur laiffa la liberté & leurs biens, & fe rendit enfuite vers Schafch, fituée auprès du Jaxartes ou Sihon. Cette ville qui ofa faire quelque réfiftance fut prife, & les Mogols firent main-baffe fur la plus grande partie de fes habitans. La ville de Nadgiande ou Jonde ne perdit point courage à la vûe des ennemis, & fes habitans avec la garnifon, prirent la réfolution de fe défendre. Toufchi leur envoya un de ses Officiers nommé Gitmour, qui penfa courir le même danger qu'Haffan-hadgi avoit couru à Saganac Il fut obligé de fe fauver, ayant été fecouru dans cette occafion par quelques habitans qui étoient d'avis qu'on fe rendît. Alors Toufchi contraint d'employer la force, commenles attaques, & fit élever un grand nombre de beliers & de catapultes. A la faveur de ces attaques qui occupoient la garnifon d'un côté, Gitmour avec plufieurs foldats choifis, fit jetter ailleurs quelques ponts fur les foffés, parvint au pied des murailles, entra dans la ville par efcalade, & fe faifit d'une porte par laquelle l'armée Mogole pénétra dans Jonde. On punit d'abord ceux qui avoient eu quelque à la violence faite à cet Officier, enfuite on fit fortir tous part les habitans, & la ville fut livrée au pillage. Après qu'il

са

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khan.

fut ceffé, Toufchi permit aux habitans de rentrer, & y laiffa une nombreuse garnifon, fous les ordres d'Aly Khodgia GefGenghiz divoni. Il prit encore Yegnikond (a) & quelques autres places. Les autres Généraux de Genghizkhan avoient pareillement exécuté fes ordres avec un égal fuccès. Alan-novian & Suktu bougha avec les cinquante mille hommes que ce Prince leur donna, marcherent vers Khojende, place inportante du Maouarennahar; mais avant que d'entreprendre ce fiége qui devoit être long, ils crurent devoir foumettre les places voifines, afin d'être maîtres de la campagne; tn conféquence, ils allerent camper devant Toncat, que l'on appelle encore Phenak et ou Pharnacande. Quoique cette place ne fût pas propre pour faire une défenfe, & qu'elle ne fût plutôt qu'un lieu de plaifirs, les habitans avec le Gouverneur nommé Ilenco melik ne voulurent point ouvrir leurs portes à la fommation que les Mogols leur en firent, ils foutinrent avec vigueur quelques attaques; mais au troisieme jour la ville fut emportée, la garnifon paffée au fil de l'épée, & les habitans emmenés prifonniers. Alors les Mogols allerent camper devant Khojende. Cette ville étoit en état de faire une vigoureufe réfiftance, le Gouverneur nommé Timour melik qui paffoit pour le plus brave homme de fon tems, étoit d'une intrépidité fans exemple. Il difpofa toutes fes machines fur les murailles, affigna par-tout des poftes à fes Officiers, & régla les fonctions de tous ceux qui étoient dans la ville. Il alla enfuite fe pofter avec mille hommes de troupes choifies dans le Château qui étoit fitué dans une Isle voifine. Il avoit fait conftruire quatre bateaux couverts, dont il fe fervit avantageufement pour tirer de-là fur les Mogols. Les Généraux de Genghizkan, à la vûe de tant de préparatifs, & après plufieurs attaques inutiles fe trouverent fort embarraffés, ils craignoient déjà d'être obligés de lever le fiége. Malgré la difficulté de l'entreprife, ils réfolurent de faire une grande jettée de groffes pierres dans la riviere pour en former un pont, & ils employerent à ce travail les prifonniers qu'ils avoient faits à Toncat. Timour melik s'y oppofa de

(a) Les Chinois la nomment Yangi-kan. Ils parlent de la ville de Pa

uhl-tching, que je ne connois paș.

toutes

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