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rides pour dix années, ouvrage favant, & d'un grand calcul aftronomique; l'impreffion en eft parfaite & paffe pour un chef-d'œuvre. Il feroit heureux que l'honneur qu'elle fait à M. Colombat excitât une forte d'émulation qui bannît la négligence que les étrangers reprochent depuis un tems à une profeffion fi fameufe à Paris. Un intérêt égal doit le faire fouhaiter au public & aux auteurs.

ARTICLE XXI.

L'Académie royale de peinture & de fculpture perdit au mois de décembre M. de La Foffe, ancien directeur (1). Il étoit fils d'un orfèvre de Paris. M. Chauveau (2) & M. Lebrun furent fes maîtres pour le deffin. S'étant mis à peindre, il travailla quelque tems fous ce dernier aux plafonds de la belle maifon de M. Lambert, dans l'île de Saint-Louis (3),

(1) Charles de La Foffe, né à Paris le 15 juin 1636, mort le 13 décembre 1716, fils d'Antoine de La Foffe, orfèvre, étoit le feptième enfant d'une mère qui en eut onze; l'un de fes frères, Antoine, exerça la profeffion paternelle.

(2) François Chauveau, né à Paris le 10 mai 1613, mort le 3 février 1676 & enterré à Saint-Côme. Voyez fa Vie, par J.-M. Papillon, réimprimée & annotée par MM. Th. Arnauldet, Paul Chéron & A. de Montaiglon. Paris, Jannet, Dumoulin & Rapilly, 1854, in-8°.

(3) Sa collaboration n'est pas mentionnée dans la préface

& à d'autres ouvrages & partit enfuite pour l'Italie. Il fit un affez long féjour à Rome durant lequel il étudia beaucoup & passa après à Venife. Il y fut charmé des ouvrages des anciens peintres vénitiens, fi fupérieurs pour le beau goût de couleur, ce qui le fit changer de manière. Après avoir demeuré plufieurs années à Venife, il revint en France par la Lombardie. A fon retour, il peignit à frefque la chapelle des mariages de l'églife de SaintEustache (1). On dit que M. Le Brun lui procura cet ouvrage par pique contre M. Mignard, qui y avoit fait la chapelle des fonts (2). M. de La Foffe ayant été agréé à l'Académie, il donna pour fon tableau de réception un Enlèvement de Proferpine qu'il avoit fait pour le duc de Richelieu (3). Il fut employé après dans les travaux du Roi, & changea de

de la Galerie du président Lambert, gravée par B. Picart & autres, & dédiée au marquis du Chaftelet (mari de la belle Émilie) par l'éditeur G. Duchange. Paris, 1750, in-folio maximo.

(1) Il y avoit représenté en deux tableaux la Salutation angélique.

(2) Il n'est pas trace de cette rivalité dans les Mémoires de Claude Nivelon fur Le Brun, analyfés par M. E. Miller, de l'Institut (Gazette des beaux-arts, t. XV, 1863), non plus que dans la Vie de Mignard de l'abbé de Monville.

(3) Ce tableau eft actuellement dépofé, faute de place, dans les combles de la bibliothèque de l'École des beaux

arts.

plus en plus fa manière, s'approchant de celle de Lombardie.

Le duc de Montague, fi connu par fon amour pour les fciences & pour les arts, faifoit bâtir dans ce tems-là fa magnifique maifon de Londres (1). M. de La Foffe y fut appelé pour y peindre le plafond du grand efcalier & celui du beau falon qui partage les appartemens, ouvrages achevés qui l'ont immortalifé en Angleterre. Il repaffa en France & il travailla à plufieurs grands morceaux de peinture & particulièrement à Trianon (2). Lorfque l'églife des Invalides fut bâtie, il peignit le dôme & les quatre angles (3), & le Roi fut fi content qu'il lui donna à faire le grand morceau de la chapelle de Versailles qui eft au-deffus de l'autel, représentant une Réfurrection (4).

(1) Achetée plus tard par le gouvernement anglois & où fut inftallé le premier Mufée Britannique. Les derniers débris ont difparu lors des reconstructions de 1823.

(2) La Foffe avoit peint à Trianon, dans la quatrième pièce de l'appartement du Roi, deux deffus de porte: Diane & fes nymphes, Clytie & le Soleil; & au-deffus de la cheminée: Apollon & Thétis; dans la feconde pièce de l'appartement du Dauphin, un Saint Marc (Dezallier d'Argenville, Voyage pittorefque des environs de Paris, nouvelle édition, 1762, p. 141 & 143).

(3) Ces compofitions font reproduites dans la Description de l'Hôtel royal des Invalides, par l'abbé Perau & C.-N. Cochin (pl. 34). Paris, 1756, in-folio maximo. (4) Elle exifte encore.

Quoiqu'il fût déjà fort âgé, il ne laiffoit pas de peindre toujours. Ses deux derniers tableaux, qui font une Nativité & une Adoration des rois, qu'on voit dans le chœur de Notre-Dame (1), ne font point inférieurs à ce qu'il a fait de plus achevé.

Au refte, comme la perfection n'est point donnée aux hommes, on ne nie pas qu'il y ait eu quelque chose à fouhaiter dans ce grand peintre, mais on lui doit cette louange que peu l'ont égalé dans la couleur; le plafond de la maifon du chevalier Crozat dans la rue de Richelieu (2), où il demeuroit, lui a fait auffi beaucoup d'honneur.

Il est mort à près de quatre-vingts ans, avec la réputation d'auffi honnête homme que d'habile peintre. Il eft enterré à SaintEustache.

(1) Ils faifoient partie, avec fix autres tableaux par Hallé, Jouvenet, L. de Boullongne & Ant. Coypel, d'un don de l'abbé de La Porte, chanoine jubilé de cette églife (D'Argenville, Voyage pittoresque de Paris, 1780, p. 11).

(2) Les Mémoires secrets, dits de Bachaumont, en décrivant ce plafond (24 décembre 1786), difent qu'on l'avoit enlevé par morceaux & remis fur toile & prétendent qu'on auroit pu réunir ces morceaux plus aifément encore qu'on ne les avoit détachés; cependant on ignore ce que l'enfemble eft devenu.

ARTICLE XXII.

La même Académie reçut le dernier jour de l'année M. Wleughels (1), peintre d'hiftoire, fils & neveu d'académicien, qui a été douze ou treize ans en Italie. Son tableau de réception repréfente Apelles qui fait le portrait de Campafpe, maîtreffe d'Alexandre.

(1) Nicolas Wleughels, fils de Philippe, né à Paris fans doute le 10 décembre 1668 (il fut baptifé à Saint-Sulpice le 11), obtint en 1694 le fecond prix de peinture pour un tableau repréfentant Loth & fes filles fortant de Sodome. Mort à Rome dans l'exercice de fes fonctions de directeur, le 6 décembre 1737, & non 1732, comme l'ont imprimé par erreur les Archives de l'art françois (Documens, V, 32) en reproduifant fon épitaphe, il fut enterré à Saint-Louis des François. Apelles peignant le portrait de Campaspe eft aujourd'hui au palais de Compiègne (Archives de l'art françois, Documens, II, 391).

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