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PRÉFACE.

n'est presque point douteux que Paris ne foit la plus grande ville de l'Europe; au moins eft-il fûr que l'on n'en connoit aucune où les conditions & les profeffions foient fi variées, où les fciences & les arts foient plus cultivés, où les amusemens foient plus nombreux, où les modes s'établiffent plus defpotiquement & paffent plus vite, enfin où paroiffe davantage le caractère d'une nation que toutes les autres veulent imiter.

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Une ville faite de cette forte mérite une place confidérable dans l'hiftoire; il ne s'y paffe rien d'indifférent, parce que les traits les plus fimples peuvent fervir à faire connoître la nation.

Il est vrai que les journaux publient les nouveautés dans les fciences, que les gazettes s'attachent à certains faits & que d'autres écrits en parlent auffi dans l'occasion: mais il refte beaucoup à glaner. On pourroit même dire que ce vafte champ n'eft pas moiffonné partout; c'eft de ce qu'on y laiffe que cette Hiftoire journalière fera compofée.

Si nous avions un détail contemporain des occupations particulières des Romains, de leurs coutumes, de leurs ufages, de leurs divertiffemens domeftiques, des lois & des privilèges de chaque profeffion, des arts où ils excelloient, de leurs académies, ne faurions-nous pas fûrement leur hif

toire, & leurs auteurs ne feroient-ils pas intelligibles partout?

Une nation telle que la françoife a plus befoin qu'aucune autre d'une Histoire journalière. Ses ufages font peu conftans, fes goûts ne font pas longtems les mêmes, fes modes changent fouvent, elle eft méconnoiffable à elle-même; au bout de quelques années les habits de nos pères nous paroiffent des déguisemens, les mœurs des comédies de Molière ne font déjà plus les nôtres : les œuvres d'un grand poète mort depuis peu viennent de paroître avec un commentaire pour expliquer les chofes de fon tems (1).

Voilà ce qui a fait concevoir le deffein de donner tous les trois mois une espèce de relation de Paris où l'on recueillera autant qu'il fera poffible

(1) Allusion à l'édition des Œuvres complètes de Boileau, “ illustrées d'éclaircissemens historiques donnés par lui-même », que venoit de publier Broffette; Genève, Fabri & Barillot, 1716, 2 vol. in-4o.

tout ce qui ne fe trouve point dans les ouvrages périodiques qui font mention de ce qui s'y fait, mais on tâchera de parler des choses moins en journaliste qu'en historien, pour en donner une connoiffance plus étendue. L'architecture, la peinture, la fculpture, la gravure, les médailles qui fe frappent, les machines nouvelles, les manufactures, les fpectacles, les modes entrent dans le plan de cette relation.

On y trouvera les noms des habiles gens dans tous les genres, avec les particularités de leur vie, qui auront rapport à leur profeffion. On n'omettra aucun événement curieux; & comme le Roi fait fa demeure à Paris, on fera exact à publier les nouveautés que le féjour de Sa Majefté y introduira. On n'oubliera point les difputes entre les favans, mais on les expofera toujours d'une manière impartiale. Enfin l'amour de la vérité rendra attentif à ne mettre dans cette

Hiftoire journalière que des chofes dont on fera fûr. On marquera en italique ou avec des guillemets ce qui ne fera point de l'auteur.

Le deffein de cette forte de relation, conçu depuis peu, fa forme ni fon titre ne demandoient pas qu'on remontât plus haut que le mois de janvier de cette année, mais il a paru quelque chofe de plus exact de la faire commencer par une époque particulière à la ville de Paris. Le commencement de la réfidence du Roi dans cette capitale du royaume en est une auffi remarquable qu'honorable pour elle, & l'on a cru du devoir d'un auteur qui fe déclare l'hiftorien de Paris de s'y attacher. Cependant, pour ne point demeurer en arrière, on a feulement recueilli les principaux faits qui fe font paffés depuis, afin de les joindre à ceux des trois premiers mois de cette année, ce qui compofe ce premier volume qu'on prie de ne regarder

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