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re, & qui fucceda au Souverain Pontificat l'an foixante & dix huit, après la mort de faint Lin. Les Chanones Reguliers de l'Ordre du faint Sepulcre, pretendent que l'Apoftre faint Jacques le Mineur, premier Evefque de Jerufalem, a efté leur Inftituteur; & il y a d'autres Chanoines Reguliers, qui ne regardent faint Auguftin que comme le Restaurateur de leur Ordre, qui a commencé au tems des Apoftres, qui estoient, felon quelques-uns de leurs Efcrivains, Chanoines Reguliers, & avoient pour Abbé Jefus Chrift.

Enfin fi l'on vouloit examiner tous les Ordres en particulier,il y en a peu qui ne pretendent quelque prerogative au deffus des autres,&qui ne veuillent s'attribuer des Hommes Illuftres, ou qui n'ont jamais efté Religieux, ou qu'ils font fortir d'un autre Ordre le faire enpour trer dans le leur; quoique quelquefois il fe trouve que ces perfonnes foient mortes avant la naiffance des Órdres où on les veut faire entrer ; & mefme les Carmes mettent au nombre de leurs Confreres des Païens & des Idolatres, témoins les Thefes qui furent foufteJanning, Apologa nues dans leur Couvent de Beziers l'an 1682. dans un At SS. Chapitre Provincial, en prefence de M. Armand Jean Lad de Rotundis de Bifcaras, Evefque de cette ville, par le Pape broch. Pere Philippes Tellier Religieux de cet Ordre, qui Bad voulut prouver qu'il eftoit probable que Pythagore & S. Paulo fes Difciples eftoient Religieux Profés de l'Ordre du Mont-Carmel, auffi-bien que les anciens Druides des Et Delle, Gaules: mais ces Thefes furent cenfurées à Rome par nat. T. + un Decret du 2. Janvier 1684.

limin. pro

Act. apud Bol

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Refo f.

P. Sevaft à

AT. 16. n.

52.

Antiq. Mo

Chap. 1.

Comme ils mettent auffi au nombre de leurs Religieux, Bafilides qui eftoit un des Devins de l'Empereur Vefpafien, le Frere Paul de faint Sebastien, qui ne

veut

veut ceder en rien aux Carmes, a cru que puifque ces Bafilides & Pythagore ont efté, Religieux du MontCarmel, il pouvoit bien mettre au nombre des Religieux de fon Ordre, la Veuve de Sarepta, quoiqu'elle fuft du pais des Sidoniens qui eftoient Gentils ; & comme il y a un Ordre Militaire du Mont-Carmel, il en met un auffi de l'Ordre de faint Jean de Dieu, difant que Jofeph Gouverneur de l'Egypte eftoit Chevalier de cet Ordre: Ipfe autem Jofeph numquid non fuit Religiofus Militaris noftri Ordinis?

Si ce Religieux Hofpitalier s'eftoit contenté de faire remonter l'origine de fon Ordre jusqu'au tems du Patriarche Abraham, parce qu'il avoit exercé l'Hofpitalité; l'on ne s'en eftonneroit pas, il auroit en cela imité les Carmes, qui font remonter l'origine de leur Ordre jufqu'au tems du Prophete Elie; parce qu'il a demeuré fur le Mont-Carmel; & fi les Alexiens, dont le principal Institut eft d'enfevelir les morts, s'avifoient un jour de prendre pour Fondateur le faint homme Tobie de la Tribu de Nephtali, parce qu'il exerçoit la charité envers les morts en leur donnant la fepulture, l'on diroit que leurs pretentions feroient auffi-bien fondées que celles des Carmes & du Frere Paul de faint Sebastien, puifque les Carmes n'ont pour titre de leur antiquité que la demeure d'Elie fur le Mont-Carmel, & que le Frere Paul de faint Sebastien n'en a point aussi d'autres, que l'hofpitalité exercée par Abraham envers trois Anges qui s'apparurent à lui sous la figure de trois jeunes hommes. Mais lorsque le Frere Paul de S. Sebaitien regarde la Pifcine Probatique, les maisons de Lot, de Laban & de Tobe, pour des Hofpitaux de fon Ordre, & qu'il dit qu'Abraham en fonda aussi un Tome I.

d

dans les Limbes, pour y recevoir les enfans qui meurent fans Baptefme; on a de la peine à concevoir comment de telles pensées ont pû entrer dans l'esprit d'un homme de bon fens. J'aurois volontiers regardé la Lettre de ce Religieux, comme supposée; ou, selon le jugement qu'en a porté le Pere Papebroch, comme une Fable inventée par quelque efprit boufon, qui apparemment aïant pris le nom d'un Religieux de l'Ordre de faint Jean de Dieu, auroit fait remonter l'origine de cet Ordre jufqu'au Patriarche Abraham pour se moquer du procès que les Carmes intenterent aux Continuateurs des Actes des Saints du Pere Bollandus,parce qu'ils ne les avoient pas fait defcendre d'Elie. Mais lorfque je fais reflexion que plufieurs Hiftoires & plufieurs Annales de certains Ordres font remplies de quantité de Fables, qui ne font pas moins divertiffantes que la Lettre du Frere Paul de faint Sebastien, je n'ai pas de peine à croire que cette Lettre ne foit veritable, & que l'Auteur n'ait en effet conçu le deffein de travailler à une Histoire Patriarchale, pour oppofer à l'Hiftoire Prophetique des Carmes, en suivant la mesme methode que quelques Hiftoriens de cet Ordre ont fuivie ; c'est-à-dire, en y meflant quantité de Fables & de pensées ingenieufes plus propres à divertir le Lecteur qu'à l'édifier.

Car qui pourroit tenir fon ferieux en voïant l'Eftampe qui eft au commencement de la Vie du Prophete Elie, inferée par le Pere Daniel de la Vierge Marie, dans fon Miroir du Carmel imprimé à Anvers l'an 1680. où l'on voit une troupe de Prophetes habillés en Carmes, & mesme avec le Scapulaire; qui dans des differentes attitudes, font de profondes reverences au

petit Elie fortant du fein de fa mere, & l'un de ces Prophetes qui lui fait avaller une cuillerée de feu ?

Goff Viri

Joann. de

Specul.Hif

Cimento

Carmelit.

c. 6.

Ne femble-t-il pas que Jean le Gros l'un des Gene- Joann. raux de cet Ordre, & quelques autres Escrivains du dar.clau. 1. mefme Ordre, aïent voulu fe divertir eux-mefmes & Malinis, divertir le Lecteur; lorsqu'ils difent la raifon que pour tor. c. 9. laquelle les Carmes portoient anciennement des man. Joann. de teaux avec des barres blanches & tannées, ce qui leur specul. Ord. avoit fait donner le nom de Barrés; c'eft que le Prophete Elie aiant efté enlevé dans un Char de feu, & aïant jetté fon manteau qui eftoit blanc à son Disciple Elifée, ce qui toucha aux flammes devint roux, n'y aïant eu que ce qui eftoit caché dans les plis & qui ne toucha pas au fea qui refta blanc. Si l'on en veut croire Didace Coria, le Prophete Abdias eftoit du TiersOrdre des Carmes, auffi-bien que la Bifaïeule de Je-nual. delas fus-Christ, à laquelle il donne le nom de fainte Eme-herm. Terrentienne. Si l'on vouloit, l'on feroit un gros Recueil Ord. de de pareilles penfées, tirées des Hiftoires & des Anna- Carmelo: les de l'Ordre des Carmes.

Didac. Co.

ria Ma

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Beat. y

ceros dela

Mais ils ne font pas les feuls qui ont produit des Hiftoriens amateurs des Fables; l'Ordre de faint Dominique, fans parler de quelques autres, en a auffi produit, témoin le Pere Louis d'Ureta qui a donné en Espagnol un Roman pieux & divertiffant fous le titre, d'Hiftoire du facré Ordre des Freres Prefcheurs dans le Roïaume d'Ethiopie: car comment penfer autrement Hist. dela de cette Hiftoire, lorfque l'on voit que cet Auteur dit: Predicadoque le principal Couvent de cette Province eft celui de ", en la Plurimanos,qui a quatre ou cinq lieues de circuit : qu'il ya ordinairement dans ce Couvent neuf mille Religieux & trois mille Domestiques: que ces neuf mille

Orden de

res,

Etiopia.c.3.

Religieux mangent tous enfemble dans un mesme Refectoire : que ce Couvent contient quatre-vingts Dortoirs, autant de Cloiftres, autant d'Eglifes particulieres où les Religieux de chaque Dortoir disent l'Office tous les jours, excepté les Feftes & les Dimanches, qu'ils fetrouvent tous dans une grande Eglife commuIbid. c. 9. ne à laquelle chaque Dortoir répond : que le Fondateur de ce beau Couvent, eftoit un fi grand Saint, que quand il vouloit dire la Meffe, un Ange defcendoit du Ciel pour la lui fervir, qu'il lui preparoit le pain & alloit tirer le vin que ce Saint aïant chaffe un Diable du corps d'une femme, il ordonna pour penitence à ce Diable de fervir dans le Couvent pendant fept ans en qualité de valet: qu'on lui donna le nom de Malabeftia: que fon emploi eftoit de fonner les cloches pour appeller les Religieux à l'Office; ce qui n'eftoit pas une pe tite affaire, & il falloit eftre aufli adroit que Malabeftia, pour fonner en mefme tems les cloches dans qua tre-vingt Clochers; mais il ne faifoit pas paroiftre moins d'adreffe lorfqu'il falloit balaïer le Couvent, c'est-à-dire quatre-vingt Dortoirs, autant de Cloiftres, autant de Cours & neuf mille Cellules; car tout cela estoit balaïé en un inftanti tout ce qu'on lui comman doit eftoit executé fur le champ; mais il y eut une cho, fe à laquelle le Pere Louis d'Ureta dit, d'un grand fe ricux, que Malabeftia ne voulut point obeïr, c'eft qu'on ne put jamais l'obliger à balaïer leChapitre, à caufe que les Religieux y reconnoiffoient leurs fautes devant le Superieur. Enfin il propofe les Religieux de cet, té Province d'Ethiopie.comme des modeles d'humilité & de mortification; & il nous affure que du Couvent de Plurimanos, de celui d'Alleluia, où il y a sept millo

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