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l'Ordre de faint Jerôme, crut avoir exprimé le grand nombre d'Ordres Religieux & Militaires, & les differentes Congregations, en donnant pour titre à fon Hiftoire des Ordres Religieux qu'il publia en 1648. celui de Troupes Romaines, ou Milices Ecclefiaftiques, & Religions Militaires & Clauftrales. Mais il auroit pû augmenter cette Milice, s'il n'avoit pas omis un grand nombre d'Ordres & de Congregations dont il ne parle point. Silveftre Maurolic auroit pû groffir fa Mer Oceane, s'il y avoit fait auffi entrer plufieurs Ordres dont il ne parle point; & Paul Morigia auroit pû donner avec plus de juftice à fon Livre le titre d'Hiftoire de toutes les Religions, s'il l'avoit augmenté de plus d'un tiers, en y ajoutant auffi plufieurs Ordres & plufieurs Congregations dont il ne parle point, tous Ordres neanmoins qui eftoient déja eftablis lorfque ces Auteurs ont efcrit. Je ne parle point d'Aubert le Mire, Doïen de l'Eglife d'Anvers, qui outre les Origi nes Monaftiques que nous avons de lui, a encore fait des Hiftoires & des Chroniques particulieres de quelques Ordres, fur lefquels il ne s'eft pas assez estendu; de Pierre le Gris, Chanoine Regulier de l'Abbaïe de faint Jean des Vignes; & de plufieurs autres Efcrivains qui ont escrit des Ordres Religieux & de leur Origine.

Comme ces Auteurs n'ont traité que de la Fondation de ces Ordres & de leurs progrès, ils n'ont parlé qu'en paffant des Vies de quelques-uns de leurs Fondateurs. Mais Annibal Canale de la Compagnie de Jefus entreprit une Histoire affez ample des Patriarches & des Fondateurs de Religions, dont il ne donna en 1623. que la premiere Decade qui commence à Jefus-Chrift,

& finit à faint Antoine, & qu'il auroit pû continuer plus avant, s'il n'avoit pas mis au nombre des Fondateurs d'Ordres, faint Pierre, faint Clet, faint Ignace Evefque d'Antioche, faint Crescenze, saint Polycarpe, & quelques-autres qui ne doivent pas eftre compris dans ce rang. Mais foit qu'il n'ait pas achevé fon Ouvrage avant que de mourir, foit pour quelques autres raifons, l'on n'a pas veu les neuf autres Decades.

Le Pere Louis Beurier, de l'Ordre des Celeftins, donna en 163 5. les Vies de ces Fondateurs d'Ordres, depuis faint Paul premier Ermite, jufqu'à faint François de Sales; mais il n'a pas efté affez exact pour qu'il ne lui en foit pas eschappé quelques-uns ; & quoiqu'il fe trouve auffi une Hiftoire fous ce Titre, compofée par le Pere Eftienne Binet de la Compagnie de Jefus, elle ne comprend neanmoins que les Vies de ceux qui font reprefentés dans les Tableaux que l'on voit dans le Chœur de la magnifique Abbaïe de Lieffies dans le

Hainaut.

L'intention de ces Auteurs & des autres Catholiques qui ont traité des Ordres Monaftiques, a efté de faire connoiftre aux Religieux la fainteté de leurs Peres, de leur propofer leurs vertus pour modele, afin qu'ils les imitassent; & de faire revivre dans leurs efprits cettę ferveur & ce zele dont ces faints Patriarches d'Ordres estoient animés lorsqu'ils les ont establis; & en defcrivant la maniere de vivre des Religieux pleine d'aufterités & de mortifications, ils ont voulu confondre les Mondains qui menent une vie toute sensuelle, & qui trouvent à redire ( comme remarque un fçavant Fleury, Efcrivain) à leur exterieur fi éloigné de celui des autres Chretiens. hommes & si distingué dans leurs veftemens, dans la pag. 323.

Mœurs des

nouriture, dans les heures du fommeil, dans leurs logemens,& mefme dans les chofes indifferentes;croïant qu'ils ont voulu par ces diftinctions s'attirer du refpect & des bienfaits. C'est ce que plufieurs difent & ce que Ibid. p.324. plufieurs penfent, parce qu'ils jugent temerairement faute de connoiftre l'antiquité, dit le mefme Auteur, qui, après avoir montré que ce font feulement des reftes des mœurs antiques que les Religieux ont confervés fidellement, tandis que le refte du monde a prodigieufement changé, conclut que c'est dans les Cloistres que

que la pureté de l'Evangile s'eft confervée, lorfqu'elle aefté fe corrompant de plus en plus dans le fiécle. La plufpart des Heretiques qui ont écrit fur le mefme fujet, ont eu une autre intention que les Efcrivains Catholiques, & encheriffant fur ce que penfent & difent les mondains fenfuels, ils n'ont écrit que pour rendre les Religieux odieux & meprifables, & ont cru pouvoir y reusfir par les impoftures dont leurs Ouvrages font remplis. Hospinianus entr'autres s'est montré fort éloquent en invectives, lorfqu'il a parlé des Religieux dans fon Hiftoire de l'origine des Moines & des Ordres Monaftiques, imprimée à Zurich pour la premiere fois l'an 1588. en quoi il a efté imité par Gilbert Pomerose, Miniftre de Bordeaux, dans le Traité qu'il a fait du vœu de Jacob, opposé aux vœux des Moines, qui fut imprimé à Bergerac l'an 1611. où il eft auffi parlé de l'origine & de la fondation des Ordres Religieux. Hofpinianus a fait neanmoins paroistre un peu plus de moderation, lorfqu'il eft entré dans le detail de la fondation de quelques Ordres. Mais comme s'il fe repentoit de n'avoir pas affez temoigné d'animofité contre les Religieux dans son Ouvrage, & de n'y

avoir pas affez avancé de faussetés, il a attaqué les Jefuites en particulier, en compofant l'Hiftoire de leur Societé; & l'on peut juger par le titre injurieux de ce Livre auffi imprimé à Zurich en 1619. quel eftoit l'efprit de l'Auteur,& ce que l'on doit penfer de fa bonne foi & de fa fincerité.

Il s'eft neanmoins trouvé des Proteftans qui ont favorablement parlé des Ordres Religieux. L'on ne peut ajoûter aux louanges que le Chevalier Marsham a données à l'Ordre Monastique, dans la Preface qui eft à la teste de l'Hiftoire des Monafteres d'Angleterre, compofée par Dodwold & Dugdalle, où il traite d'extravagans & de gens fans jugement, ceux qui difent que les Ordres Religieux font fortis du Puits de l'abisme, qui eft le langage ordinaire de plufieurs Heretiques. Il n'attribue cette invective qu'à la paffion dont ces fortes de perfonnes font preoccupées ; & quoiqu'il y ait des Ordres qui s'attribuent une origine chimerique, cependant il les excufe,& leur pardonne, dit-il, volontiers cette faute, en confiderant qu'il y a eu des peuples illuftres qui cherchant l'origine de certaines chofes obfcures, l'ont fait defcendre de leurs Dieux.

A l'imitation de Dodwold & de Dugdalle, à qui nous sommes redevables de l'Histoire Monaftique d'Angleterre,à laquelle neanmoins le Chevalier Marsham avoit eu beaucoup de part, d'autres fçavans Proteftans nous ont donné depuis quelques anneés des Annales & des Chroniques fideles de plufieurs Monafteres d'Allemagne, que l'herefie a enlevés aux Religieux qui les poffedoient; & nous avons obligation en particulier au fçavant Monfieur de Leibnitz de nous avoir donné plufieurs Recueils de differents titres, & de dif

ferens Hiftoriens où l'on trouve beaucoup de chofes favorables à l'Eftat Monaftique. Nous lui fommes mefme redevables par ce moïen de la connoiffance de quelques Ordres Ecclefiaftiques & Militaires qui estoient

inconnus.

C'eftoit ces Auteurs que Schoonebeck devoit confulter pluftoft qu'un Hofpinianus & d'autres auffi peu fideles, lorsqu'il a travaillé à son Histoire abregée des Ordres Religieux, imprimée à Amfterdam l'an 1688. avec des figures, où il a voulu representer les differens habillemens de ces Ordres ; qui a esté augmentée de plus de quatre-vingt figures dans une feconde Edition en 1700. Il n'y auroit pas fait tant de fautes, & ces figures representeroient mieux les habillemens des Religieux, qui la plufpart font fi peu reconnoiffables par ceux qu'il leur a donnés, que fans le nom qu'il a mis au bas, on n'auroit pû deviner de quel Ordre il auroit voulu parler, fi l'on en excepte neanmoins quelques Chanoines Reguliers qu'il a gravés fur les figures que le Pere du Moulinet, Chanoine Regulier de la Congregation de France, donna en 1666. dont Schoonebeck avoit omis la plus grande partie dans fa premiere Edition, & qu'il a ajoûtées dans la der

niere.

Il eft vrai que dans quelques-uns des autres habillemens,il a fuivi Odoart Fialetti Bolonois, qui en 1658. grava les habillemens des Ordres Religieux, affés conformes à la defcription qu'en avoit faite SilveftreMaurolic, qui parle auffi de plufieurs Ordres qui font fupprimés, & dont Schoonebeck fait mention comme s'ils fubfiftoient encore;mais depuis un fiecle que Maurolic a écrit, il s'y eft fait plufieurs changemens; il y en

a

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