Imágenes de páginas
PDF
EPUB

aureit dû naturellement fortir tout grillé de ce feu, & mourir prefque für le champ:peut-être queDieu ne le punit pas à caufe de fa fimplicité & de fa bonne foi. Mais il ne fut pas non plus tout-à-fait préfervé, de peur que le miracle complet n'eût fait paffer pour une vraie Relique la lance, qui peutêtre ne l'étoit pas. L'ambiguité dans laquelle tout le monde fe trouva après cette épreuve devoit apprendre qu'on y avoit recouru mal à propos : mais le monde ne fe détrompe pas fi facile

ment.

XVII.

bouillante in

* Epift.74.

Le fuccès de ces fortes d'épreuves Epreuves étoit admiré avec 'raifon : mais des du ter chaud merveilles fi étonnantes ne pouvoient & de l'eau pas faire approuver aux perfonnes terdites en éclairées les ulages de l'eau bouillan- Occident. te & du fer chaud, aufquels on recouroit fi fouvent pour toutes fortes de chofes, dont on abufoit vifiblement. On en revint enfin. * Yves de 205.252. Chartres, à la fin du onzieme fiecle, écrivit plufieurs Lettres contre ces ufages. Il montre qu'ils étoient abfolument interdits aux Eccléfiaftiques; que les Conciles & les Papes les condamnoient même généralement ; & cite ces paroles du Pape Etienne V. à

XVIII.

Lambert Evêque de Mayence: Ferri candentis, vel aqua ferventis examinatione confeffionem extorqueri à quolibet,facri non cenfuerunt canones ; & quod fanctorum Patrum documento fancitum non eft, fuperftitiofa adinventione non eft præsumendum. Spontanea enim confessione, vel teftium approbatione, publica delicta, babito pra oculis Dei timore, commiffa funt regimini judicare: occulta verò & incognita illius funt judicio relinquenda qui folus novit corda filiorum hominum.

Ces paroles font auffi rapportées dans le Decret de Gratien, où ces épreuves font condamnées. 2. parte cauf. 2.q. 5. & par Saint Thomas. 2. 2. q. 95. art. 8. ad 3.

Les Papes Celeftin III. Innocent III. & Honorius III. réitérerent les défenfes, comme on le voit au cinquieme Livre des Decrétales. Tit. 35. de purgatione vulgari. Toutes ces décifions firent ceffer ces ufages. Les Scholaftiques convinrent en même temps qu'on y tentoit Dieu visiblement; & tout le monde en parut enfin perfuadé.

C'eft auffi vers ce temps qu'on fe Epreuves détrompa des épreuves du fer chaud munes en O- en Orient. Jufqu'alors elles y avoient

du feu com.

rient.

à

c. 12. ex edit.

été affez communes. Pachymere, qui écrivoit au treizieme fiecle, fous le Regne de Michel Paleologue & d'An- Hift. Mich. dronic fon Fils, dit que l'Empereur Paleol. lib. 1. Michel étant attaqué d'un mal que les Rom. 1666. p. Medecins ne connoiffoient gueres, & 17. & 18. qui le rendoit fort inquiet, accufa comme auteurs de fon mal un grand nombre de perfonnes, qui ne pouvoient fe juftifier que par l'épreuve du fer rouge. La cérémonie fe faifoit peu près comme en Occident, fuivant la defcription qu'en fait Pachymere. Celui qui devoit faire l'épreuve jeûnoit trois jours, pendant lefquels on le gardoit à vûe, fa main enveloppée dans un linge fous le fceau de l'Empire, de peur qu'il ne fe fervît de quelque onguent contre la brûlu. re. Les trois jours paffés, on lui marquoit une efpace durant lequel il devoit marcher par trois fois, portant à la main le fer ardent. Pachymere ajoûte qu'étant jeune il avoit vû faire l'épreuve à plufieurs perfonnes qui ne fe brûlerent point, au grand étonnement des affiftans.

Georgius Logotheta,qui écrivoit dans Chronic.Com le même temps une Chronique du ftant. reizieme fiecle, nous fait entendre

XIX.

Sage défai

que tout le monde ne s'aveugloit pas fur ce point; car il parle d'un homme d'efprit, qui fut fort bien fe difpenfer de faire l'épreuve du fer chaud, à laquelle Michel Comnene vouloit l'engager. Il répondit qu'il n'étoit ni te d'un hom- Sorcier, ni Charlatan, & ne fe tira me d'efprit. pas mal d'affaire à l'égard de l'Archevêque qui lui faifoit quelque inftance. Il lui dit qu'il porteroit volontiers le fer ardent, pourvû que, revêtu de fon étole, il voulut avoir la bonté de le lui mettre entre les mains. L'Archevêque ne fe trouva pas difpofé à faire cette cérémonie : il convint que cer ufage venoit des Barbares, & qu'il ne falloit pas tenter Dieu.

Cela ne fervit pas peu à défabufer le peuple. Mais fur la fin du même fiecle treizieme, Andronic regnant après la mort de fon Pere Michel Paleologue, on eut encore lieu de fe détromper entierement, par l'épreuX X. ve téméraire d'un grand nombre d'EcDifiques cléfiaftiques, qui vouloient décider examinées par le feu plufieurs difputes Théolos'en détrom- giques. Comme prefque tout le Clergé étoit divifé, & qu'on ne s'accordoit point ni fur l'élection du Patriarche, ni fur plufieurs autres articles,

Théologiques

par le feu. On

[ocr errors]

On convint enfin, pour terminer tou tes chofes, que chaque parti écriroit toutes les raifons dans un cahier. qu'on jetteroit enfuite les deux cahiers dans le feu, & que le cahier qui ne se brûleroit pas donneroit gain de caufe au parti qui l'avoit écrit. La cérémonie fut faite fort exactement. On alluma du feu le Samedi Saint en préfence d'un grand peuple. Chaque parti s'attendoit à voir brûler le cahier des adverfaires, & préferver le fien. Mais la furprise des deux partis fuc égale. Les deux cahiers furent réduits én cendres ; & l'on fe moqua tant de ces Eccléfiaftiques, qu'ils n'eurent pas envie d'approuver jamais qu'on recourût à cette épreuve. Le fait eft 1.6. ex edit rapporté par Nicephore Gregoras, Au- Buf. pag. 78; teur contemporain, qui a été imprimé au Louvre avec une magnificence qui répond aux autres Volumes de l'Hiftoire Byzantine. Ce devroit être ici la fin de toutes ces épreuves en Orient & en Occident. Cependant on difputa de nouveau fur ce point plus de: deux cents après, comme on va le: voir au Chapitre suivant.

« AnteriorContinuar »