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I.

Baguette figne de la puiflance

donnée aux hommes.

Voyons fi l'on n'a point fait autrefois quelque ufage d'une Baguette qui vaille ceux dont nous avons parlé.

CHAPITRE VIL

Si les Baguettes ont été de quelque ufa-
ge dans les anciennes fuperftitions.
Effets prodigieux produits avec des
Baguettes. Ufage des Scythes, des
Perfes, des Medes, des Alains, des
Illyriens, des Efclavons, des anciens
Allemans, & de plufieurs autres Peu-
ples qui devinoient avec des Baguet-

tes.

UN Bâton ou une Baguette ont été de tout temps le figne le plus ordinaire de la puiffance donnée aux hommes. Le pouvoir de faire des miracles, que Dieu avoit donné à Moïfe, étoit ce femble attaché à la Baguette que fon Frere Aaron ou lui-même portoienr à la main; & le Démon, vrai finge de Dieu & de la nature, en a prefque toujours ufé de même à l'égard de ceux à qui il a fait opérer des prodiges. Il est peu d'opérations magiques attribuées aux

Divinités fabuleufes, ou les Poëtes ne faffent entrer des Baguettes.

II.

Si Pallas donne à Ulyffe a tantôt la Effets de la forme d'un jeune homme, & tantôt Baguette de Pallas, de celle de vieillard, c'est en le touchant Mercure & avec une Baguette. Mercure ne fait de Circé. fouffler les vents, n'excite des tem- a Hom. OdyЛf. 13. pêtes, n'envoie les ames aux enfers, 16. ou ne les en retire, que par la vertu b Odyff. 24de la verge d'orb; & fi la plus fa- Virg. Eneid. meufe des Sorcieres, la célebre Circé, change Picus en oifeauc, transforme en pourceaux les amis d'Ulyffe, d, rend à tous leur première forme, c'est toujours en les touchant avec une Verge enchantée.

Je n'examine point fi ces métamorphofes font des contes faits à plaifir, ou fi l'on peut les prendre à la lettre comme Saint Auguftin & plufieurs autres Savans l'ont cru. Vraies ou fauffes, elles font voir que c'est par une Baguette que fe faifoient les effets les plus furprenans de la Magie. Carles Poëtes n'ont fans doute exprimé de fi grandes chofes que par les pratiques les plus ordinaires des Magiciens.

L'Ecriture Sainte nous a apprend que les Magiciens d'Egypte fe fer

cOvid. Me. Virgil. Eneid.

tam, lib. 14.

lib. 7.

d Ibid.

a Exod.

III.

Baguette

voient de Baguettes. Strabon b nous dit les Brachmanes de Perfe ne

des Egyptiens que

manes.

& des Brach- faifoient leurs imprécations, confécrations ou divinations, qu'en teb Lib. 15. nant à la main de petites branches c Vita A. d'arbre ; & Philoftrate rapporre c que les Brachmanes des Indes n'étoient jamais fans bâton, & qu'ils s'en fervoient pour faire des opérations tout-à-fait prodigieufes.

poll. lib.3.

IV. Diverses efpeces de

bois em

ployées pour deviner.

Lib.

Les peuples qui étoient les plus verfés dans les divinations usoient d'une espece de bois qu'ils croyoient privilégié. Ceux de l'ifle fameufe de Metelin fe fervoient d'une Baguette de Tamaris, & croyoient qu'Apollon avoit donné à cette plante la vertu de deviner. Le Scholiaste de Nicandre dit que les Medes s'en fervoient dans cette perfuafion. Mais il y avoit des peuples qui choififfoient d'un autre espece de bois. Plufieurs fe fervoient indifféremment des branches d'un arbre fruitier.

Hérodote dit que parmi les Scythes il y avoit beaucoup de Devins qui avoient appris de leurs ancêtres l'art de deviner avec des Baguettes de faules. Le même Hiftorien ajoûte que les Scythes comptoient fi fort

fur la connoiffance que leurs Devins pouvoient avoir des chofes cachées, qu'ils leur faifoient découvrir fiquelqu'un avoit juré, & que fur leur té- te des parjumoignage on faifoir mourir les parjures.

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Découver

Les Alains, qui occupoient une partie de la Scythie, devinoient avec des Baguettes d'ofier. Ammien Marcellin dit qu'après les avoir difpofées avec de fecrets enchantemens,ils connoiffoient diftinctement l'avenir. C'eft apparement des Alains & des autres peuples de la Scythie que les Ellyriens leurs voifins apprirent à de- thes fe répanviner par quelque morceau de bois. dent dans la L'Auteur du Livre des fix cents treize préceptes, cité par le favant Drufius*, ** In c.4. feur attribue cette pratique.

Des Illyriens elle paffa aux Efclavons a qui leur ont fuccédé, & fe répandit enfin parmi tous les peuples de la Germanie. Nous apprenons de Tacite b qu'ils étoient fort adonnés

* Lib. 31. pag. 21. ex Henr. Val Futura miro præfagiunt modo. Nam rectiores virgas vimineas colligentes, eafque cum incantamentis quibufdam fecretis præftituto tempore difcernentes, apertè quid portendatur norunt.

a Grotius in 21. Ezech. b Aufpicia fortefque ut qui maximè obfervant. Sortium confuetudo fimplex: virgam frugiferam arbori decisam in furculos ampu

V. Les divinations des Scy

Germanic.

Ojca.

c Hift. Eccl.

c. 6.

'd Saxo Gramm. lib.

14.

VI. Pratiques des Frifons

triers.

aux Augures & au Sort, & que leur
maniere de deviner la plus ufitée
confiftoit à couper une Baguette d'un
arbre fruitier,à la divifer en plufieurs
parties, & à y faire quelques mar-
ques particulieres. Cette coutume s'eft.
confervée durant très - long-temps.
Adam de Brême, qui écrivoit dans
l'onzieme fiecle, la décrit toute cen-
tiere de la même maniere que Taci-
te. Elle a eu cours parmi les Ruffes.
d & les Frifons ; & lorfque tous ces
Peuples eurent embraffé le Chriftia-
nifme, ils ne firent qu'ajoûter quel-
ques cérémonies religieufes à leurs
anciennes manieres de deviner.

Le 14. Titre de la Loi des Frifons pour décou- Porte que, pour découvrir l'auteur vrit les meur d'un homicide, l'épreuve des Baguettes fe feroit dans l'Eglife, & qu'auprès même de l'Autel & des faintes Reliques on demanderoit à Dieu un figne évident qui feroit difcerner le vrai coupable d'avec ceux qu'on accufoit fauffement. * Cela tant, eofque notis quibufdam difcretos fuper candidam veftem temerè ac fortuitò fpargunt. Mox, fi publicè confulatur, facerdos civitatis; fin privatim, ipfe pater familias precatur Deos, cælumque fufpiciens ter fingulos tollit, fublatos fecundùm impreffam notam interpretatur. De moribus German.

* Saumaise croit que c'est de-là que vient l'ufage.

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