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LA DÉVOTION

RÉCONCILIÉE AVEC L'ESPRIT,

PAR

LEFRANC DE POMPIGNAN,

ARCHEVÊQUE DE VIENNE.

NOUVELLE ÉDITION,
Augmentée de deux chapitres et d'un volume d'exemples,

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YUUMAND - 0

LA DEVOTION

RECONCILIÉE

AVEC L'ESPRIT.

INTRODUCTION.

De toutes les persécutions que la piété chrétienne éprouve de la part des hommes, la plus dangereuse est le mépris et la dérision. La vertu condamne le monde, et le monde cherche à ravaler la vertu. Si ceprojet pouvait réussir, il n'en faudrait pas davantage pour anéantir la piété; car elle ne serait plus digne de nos vœux et de nos recherches, dès qu'elle aurait cessé de mériter notre estime; et puisqu'il faut l'acquérir par de pénibles travaux, qui voudrait acheter à ce prix l'opprobre et l'avilissement?

Les hommes dégradent ce qu'ils méprisent, jusque dans les noms qu'ils lui don

T. I

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nent. La science est pédanterie pour les partisans de l'ignorance; la philosophie, qui aime le loisir d'une vie solitaire, est misanthropie pour les personnes livrées sans réserve aux plaisirs, aux affaires, au commerce du monde; et la piété, pour ses ennemis, n'est que dévotion. Qu'entendent-ils par ce terme, et quelle idée se forment-ils des dévots? Ils leur reprochent des vices dans le cœur, et des défauts dans l'esprit. J'abandonne aux prédicateurs l'examen du premier de ces reproches, et la réfutation des vaines conséquences qu'on tire contre la piété chrétienne, des faiblesses, vraies ou prétendues, de ceux qui portent le nom de dévots. Je me renferme dans les défauts de l'esprit ; et en adoptant le langage du monde, j'entreprends de venger la dévotion de l'injuste mépris de ses censeurs,

L'esprit tient le premier rang parmi les dons de la nature. Il n'en est point dont la possession flatte plus agréablement

l'amour-propre, ni dont la privation fut fût plus humiliante pour lui, si l'amour-propre pouvait renoncer de bonne foi à toute prétention sur les avantages de l'esprit. C'est

par une suite de cette admiration pour l'esprit, dans laquelle il y a sans doute beaucoup d'excès, que les ennemis de la dévotion ont cru la rendre souverainement méprisable, en l'accusant de rétrécir, d'abaisser et d'éteindre même l'esprit. Pour juger de cette accusation, et pour traiter aussi cette matière avec ordre, il faut parcourir successivement les différentes espèces d'esprit. Il n'en est aucune où la dévotion, si l'on écoute nos adver saires, n'ait des torts essentiels. Quand on voudrait les leur avouer, leur dégoût pour elle en serait-il mieux fondé? Il suffit à la dévotion de marquer à l'homme ses devoirs, de le rapprocher de Dieu, de lui frayer le chemin du véritable bonheur. Avec de telles prérogatives elle peut se passer de toutes les autres. Mais il est

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