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le laiffer plus long-tems dans les Païs-Bas, fans expofer les Provinces à de grands Troubles. Ils affuroient Sa Majefté, qu'ils ne regardoient point le Cardinal de Granvelle comme un Rival, dont ils vouluffent remplir la Place ; qu'ils n'avoient uniquement en vûë, que le repos & la tranquillité de fes Peuples. Ils fupplioient même le Roi, de les éloigner de la Cour, & du Confeil, pour peu que leurs intentions lui fuffent fufpectes: ils loüoient beaucoup la Sageffe, & la Moderation de la Gouvernante, & finiffoient par des proteftations de zele pour la Religion Catholique, & d'attachement pour le Service du Roi.

La Gouvernante qui étoit exactement avertie de tout ce qui fe pafloit,avoit déja prévenu la Cour d'Efpagne, fur l'envoi, & fur le contenu de cette Lettre. Le Com

te d'Egmont foupçonna le Comte d'Aremberg de lui en avoir fait le rapport. Celui-ci jura qu'il n'en avoit jamais parlé à perfonne, & ajoûta que fi la chose étoit venüe aux oreilles de la Gouvernante, le Comte d'Egmont ne devoit s'en prendre qu'à fon indifcretion, puifqu'il avoit fait

part de fon fecret à toute la Cour: & comme le Comte d'Egmont foûtenoit qu'il avoit appris l'infidelité du Comte d'Aremberg, par une perfonne fûre; le Comte d'Aremberg lui répondit, que "quiconque le lui avoit dit en avoit menti, qu'il n'avoit qu'à le nommer, & qu'il étoit prêt de lui en demander raison l'épée à la main.

La Gouvernante averti: le Roi de la querelle de ces deux Seigneurs, & fe plaignit amerement de la conduite du Comte d'Eg

mont.

pas

Le Roi ne laissa pas de lui adref fer une Lettre écrite de fa propre main, en reponse à la Lettre commune que le Comte avoit fignée, de concert avec le Prince d'Oran ge & le Comte de Horn. Philippe feur mandoit qu'il étoit content de leur zele, mais qu'il n'avoit coûtume de fe défaire de fes Miniftres, avant de s'être bien affùré qu'ils étoient coupables de quelque faute confiderable; qu'ainfi il falloit que quelqu'un 'd'eux, fe rendît en Efpagne pour lui expliquer plus en détail tous les fujets de plainte que le Cardinal pouvoit avoir donné, à moins qu'ils n'aimaffent mieux attendre qu'il vînt lui-même en Flan dre,pour prendre connoiffance de cet Affaire, & qu'il comptoit y retourner bien-tôt.

: Le Roi écrivit en même tems à la Gouvernante, d'affembler chés

elle ces trois Seigneurs, & lui marqua ce qu'elle devoit leurs dire de fa part. Il voulut auffi qu'elle prit le Comte d'Egmont en particulier, comme le plus ai fé à gagner, & qu'elle tâchât de Fappailer, & de l'engager à faire le voyage d'Espagne. Mais le Prin ce d'Orange l'avoit trop bien inftruit, pour qu'il donnât dans le piége. Le Comte d'Egmont refula conftamment d'y aller, & figna encore avec le Prince d'Oran ge, & le Comte de Horn une nou velle Lettre, dans la quelle ils reprefentoient au Roi, que leur prefence étoit neceffaire dans les Provinces ou ils avoient des Gouvernemens confiderables, pour maintenir les Peuples dans l'obéïffance, & pour tenir les Etats voifins en refpect; qu'ils croyoient que le Roi avoit affés bonne idée de leur fincerité & de leurs lu

mieres, pour compter fur leurs Lettres, comme fur leurs Difcours; qu'au refte il ne leur convenoit pas d'aller à la Cour, pour, y faire le Perfonnage d'Accufateurs, & qu'ils fe contentoient d'avertir Sa Majefté, de ce qui concernoit le Bien general des Provinces. Ils prioient enfuite le Roi de trouver bon, qu'ils s'abfentaffent déformais du Confeil, où le Cardinal de Granvelle étoit feul écouté, ajoutant que Sa Majefté ne devoit point être allarmée de cette réfolution, & qu'Elle trouveroit toûjours dans eux toute la fidelité & toute l'obéïflance qui lui étoit duë. Le Comte d'Egmont écrivit auffi au Roi une Lettre particuliere,pour le remercier de la bienveillance finguliere que la Gouvernante lui avoit témoigneé de la part.

Mais ce qui porta le dernier

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