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coup à l'Autorité du Cardinal' ce fut le Confeil que la Gouvernante elle-même donna au Roi de le rappeller.

Cette Princeffe fe degoûtoit de jour en jour, d'un Miniftre qui étoit devenu l'objet de l'execration publique, foit qu'elle craignît que la haine qu'on lui portoit ne retombât fur elle, foit que le Cardinal aigri par les efforts que les Ennemis faifoient pour le perdre, la preffant avec une efpece d'importunité, de le maintenir par des coups coups d'Autorité, & par &par des violences, elle travailla à Péloignement de Granvelle plus fortement & plus efficacement que perfonne.

Elle écrivit même au Roi, qu'el le s'appercevoit que ce Miniftre agiffoit fous-main, pour porter les Seigneurs à des éclats plus crimi nels que ceux qu'ils avoient fait

jufqu'alors, & qu'il cherchoit à décrediter fes ennemis en les rendant p us coupables..

Mais le Roi avoit une fi haute idée du merite de Granvelle, & une telle averfion pour les Flamans dont l'humeur libre ne lui convenoit pas, qu'il ne pouvoit pas fe refoudre à le leur facrifier. D'ailleurs ce Prince qui ne fe fioit jamais entierement à perfonne, étoit bien aife d'avoir en Flandre un Garant & un Efpion de la conduite de la Gouvernante.

Cette Princeffe qui regardoit l'éloignement du Cardinal comme la fin des troubles, entreprit de vaincre les répugnances du Roi.

Elle envoya exprès en Espagne Thomas Armentier, homme fur & intelligent, avec des Lettres de Créances & d'amples Memoires fur cette Affaire il avoit ordre. de lire au Roi une partie de ces Memoires

Memoires, & de referver le refte pour le répandre dans les converfations qu'il auroit avec lui,

La Gouvernante y rendoit compte de la conduite qu'elle avoit tenue dans les Provinces, depuis qu'elle avoit pris poffeffion du Gouvernement. Elle reprefentoit vivement le mécontentement des Seigneurs, & les fuites qu'il pourroit avoir. Elle difoit, que le Prince d'Orange & le Com te d'Egmont lui avoient declaré, qu'ils n'affifteroient plus au Confeil, parce qu'ils perdroient bientôt tout le credit qu'ils avoient fur l'efprit des Peuples, qui leur étoit cependant absolument neceffaire, pour les retenir dans le devoir, s'ils paroiffoient encore garder quelques mesures avec le Cardinal; elle ajoûtoit que le Comte d'Egmont, lui avoit dit, que fans lui, il y avoit déja long

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tems, que ce Miniftre feroit mort par la main d'un affaffin, que juf qu'alors il avoit arrêté les coups, mais qu'il en laifferoit déformais le foin au Roi & à son Alteffe.

Armentier fit fi bien valoir toutes les raifons qui étoient expofées dans les inftructions qu'on lui avoit donné, qu'il ébranla l'efprit de Philippe. Ce Prince lui donna plufieurs audiences, dont quelques unes durerent trois ou quatre heures; & le Prince d'Orange, le Comte d'Egmont & le Comte de Horn, pour achever de déterminer le Roi à éloigner le Cardinal, fortirent de Bruxelles au commencement de l'année 1564. & déclarerent à la Gouvernante en prenant congé d'elle, qu'ils ne paroîtroient plus à fa Cour, tant qu'elle auroit auprès d'elle le Cardinal de Granvelle.

Le 20° Fevrier de la même an

née, Armentier arriva d'Efpagne & apporta ordre au Cardinal de fortir de Flandre.

Il y avoit long-tems, que ce Miniftre prévoyoit ce coup, & pour ôter à ses Ennemis le plaifir qu'ils s'étoient promis, de le voir trifte & humilié, il affectoit de paroître plus gai qu'à l'ordinaire, & difoit publiquement qu'il commençoit à se laffer des affaires. Cependant il follicitoit vivement une place dans le Confeil de Madrid, & écrivoit au Duc d'Albe fon ancien ami, pour l'engager à obtenir cette grace du Roi. Le Duc d'Albe balança longtems entre la crainte de mettre dans le Confeil un ami, qui pouvoit devenir fon rival; & le defir de fe vanger des ennemis qu'il avoit dans la Nobleffe de Flandres, à qui il s'étoit rendu extrêmement odieux, par les confeils

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