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a imprimé, pour ainfi dire, à toutes fes Oeuvres la marque de SON INFINITÉ, & il n'en eft aucune dont nous puiffions efpérer d'atteindre le fond.

CCXLIV. Expériences de l'Auteur fur la reproduction des Vers de terre.

UN Ver de terre partagé tranfverfalement en deux ou plufieurs portions, ne meurt pas; mais fi l'on a foin de tenir chaque portion dans un lieu convenable, elle s'y régénérera au bout d'un tems plus ou moins long. Souvent néanmoins il arrivera que toutes, ou prefque toutes périront fans avoir donné aucune preuve de régénération; c'eft ce que j'éprouvai en 1742. Je fus plus heureux en 1743; & fi je ne vis pas alors tout ce que je defirois de voir, j'en vis au moins affez pour être très-fûr, que le Ver de terre fe reproduit de bouture.

UN 'Ver de cette efpece que j'avois partagé tranfverfalement par le milieu du corps le 27 de Juillet, commença le 15 d'Août à fatisfaire ma curiofité. Du bout poftérieur de la partie antérieure, de celle où tenoit la tête de l'Infecte, fortoit un appendice vermiforme, fort

délié, long de huit à neuf lignes, & d'une couleur plus claire que le refte du corps. Obfervé de plus près, il paroiffoit être un petit Ver qui pouffoit à l'extrémité du grand, & fur la même ligne. Je puis affurer que cette comparaifon eft exacte, & ceux qui répéteront cette expérience, en conviendront facilement. Cet appendice, ou pour m'exprimer plus exactement, cette nouvelle partie poftérieure étoit très- organifée. Elle étoit formée d'une fuite d'anneaux fort ferrés, & fur les côtés defquels on appercevoit les ouvertures deftinées à la respiration, & qu'on a nommées des figmates (1). On fait qu'à chacun de ces ftigmates,

(1) tt Je me fuis exprimé ici d'une maniere plus pofitive que je n'avois fait dans le Traité d'Infectologie; (Part. II, Obf. XXXV, Oeuvres, Tom. I.) & pourtant je n'avois pas fait de nouvelles recherches fur la ftructure du Ver de terre, lorfque je compofois les Confidérations fur les Corps organisés. Je m'étois borné à dire dans le premier Ouvrage : J'ai cru voir de plus dans cette queue nouvellement formée, des ouvertures ou ftigmates qui fervent à la respiration, & qui m'ont paru être au nombre de deux pour chaque anneau. Ces mots j'ai cru voir, indiquoient affez que je n'étois pas fûr d'avoir bien vu. J'aurois donc dû dire encore dans les Confidérations, j'ai cru voir, ou l'on croyoit appercevoir. J'ignore ce qui m'avoit trompé tandis que je faifois ces obfervations: mais M. SPALLANZANI, qui a beaucoup plus approfondi l'organisation du Ver de terre qu'elle ne l'avoit encore été, m'écrivoit le 21 de Septembre 1766: qu'il n'étoit point parvenu à découvrir de ftigmates au Ver de terre, quelque foin qu'il eût apporté

cette recherche. Il me communiquoit en même temps di

répond un paquet de trachées qui imitent parfaitement celles des plantes dont j'ai parlé dans l'Article CCXX. La régénération des ftigmates fuppofe donc celle des trachées & de leurs ramifications. Mais, ce que la production de cette nouvelle partie poftérieure m'offrit de plus

verfes expériences qu'il avoit tentées pour s'inftruire de la maniere dont la refpiration s'opére dans cette efpece de Ver. En voici le précis.

Les Vers de terre ont befoin d'un air qui fe renouvelle. Renfermés dans des phioles de verre fcellées hermétiquement, & de différentes capacités, ils y ont toujours péri, les uns plus tôt, les autres plus tard, dans le rapport à la capacité des phioles; c'est-à-dire, qu'ils ont vécu plus long-temps dans les phioles dont la capacité étoit plus grande. Il a été bien prouvé, qu'ils n'y avoient point péri de faim, ni par le defféchement.

Les Vers de terre mis en expérience dans le vuide, y périffent au bout de deux jours. Plufieurs fe raniment par l'introduction de l'air.

Si l'on enduit d'huile les côtés du Ver, il n'en fouffrira point. M. SPALLANZANI a plongé en entier dans l'huile des Vers de terre; il les y a laiffés pendant dix-neuf heures ; & après les en avoir retirés, il les a placés dans une terre humide ils s'y font ranimés, & ont paru très-vivans.

Quand l'Obfervateur les a plongés dans l'eau, il n'a rien apperçu qui reffemblât à ce que j'ai raconté des Chenilles: (Recherches fur la respiration des Chenilles: Sav. Etrang. Tome V, Oeuvres, Tome III.) Il a bien vu fortir beaucoup de bulles d'air; mais c'a été principalement de la bouche & de l'anus. Il a obfervé les mêmes chofes dans le vuide.

Il femble donc qu'il foit bien conftaté par ces expériences, que la refpiration ne s'opére pas chez le Ver de terre, Somme dans les Chenilles & quantité d'autres Infectes.

intéreffant, fut la grande artere, ou ce vaiffeau qui tient lieu de cœur aux Infectes. Il régnoit d'un bout à l'autre de cette nouvelle partie, & fes mouvemens alternatifs de fyftole & de dyaftole étoient extrêmement fenfibles. Il paroiffoit fe contracter & fe dilater fur une plus grande partie de fon étendue, que ne le fait la principale artere des Vers d'eau douce, que j'ai multipliés de bouture (1). Dans ceux-ci l'artere paroît fe contracter & fe dilater, d'anneau en anneau. On diroit que chaque anneau renferme un petit cœur qui a fes fyftoles & fes dyaftoles, & que toute l'artere n'eft ainfi qu'une fuite de petits cœurs mis bout à bout, & qui fe tranfmettent le fang fucceffivement. On voit quelque chofe d'analogue dans l'artere du Ver à foie, & c'est ce qui avoit fait croire à MALPIGHI qu'elle étoit une chaîne de cœurs (2). Mais quand l'injection de ce vaiffeau n'auroit pas prouvé le contraire à M. de REAUMUR (3), l'artere de nos Vers de terre fuffiroit pour nous convaincre de fon unité; chaque fyftole &

(1) Voyez l'Article CXCII, & mon Traité d'Infectologie, Obf. I, de la feconde Partie.

(2) Differt. de Bombyce.

(3) Mém. pour fervir à l'Hiftoire des Infectes, Tome I, Mém. III.

chaque dyaftole n'étoient point renfermées dans la longueur d'un anneau; elles paroiffoient manifeftement en embraffer plufieurs. La circulation du fang fe faifoit dans cette nouvelle production, comme dans le refte du corps, de l'extrémité poftérieure vers l'antérieure (1). Le fang de la plupart des Infectes eft une liqueur transparente, prefque fans couleur, & qui fans être fpiritueufe peut dans quelques efpeces, résister à un froid fupérieur à celui de

(1) Cette direction conftante du cours du fang & ces mouvemens alternatifs de systole & de dyastole, n'avoient pas été apperçus par les Auteurs qui avoient parlé avant moi du Ver de terre. M. SPALLANZANI a confirmé mon obfervation, & a. vu comme moi, le fang dirigé conftamment de la queue vers la tête, foit dans des Vers entiers, foit dans des portions plus ou moins courtes de Vers coupés tranfverfalement. Il a même obfervé cette direction dans des portions qui n'avoient qu'une ligne de longueur. Ceci revient à ce que j'avois obfervé fur les Vers d'eau douce qui multiplient de bouture (Infectol. Part. II, Obf. XV. ). Mais la diffection a appris bien d'autres particularités à notre Obfervateur. Elle lui a montré des ramifications dans la grande artere, & lui a découvert le principal tronc des veines, placé le long du ventre, à l'oppofite de la grande artere. Il eft parvenu encore à découvrir l'abouchement de l'artere & de la veine du côté de la tête; mais il n'a pu le faifir près de la queue, parce que les vaiffeaux y font trop déliés. Enfin, il s'eft affuré que le fang du Ver de terre n'est point compofé de globules, semblables à ceux que préfente le fang des grands Animaux: auffi la liqueur rouge qui circule dans les vaiffeaux du Ver, ne doit-elle pas être regardée comine un véritable fang.

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