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PHILANDRE.

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Il ne faut pas les blâmer, ma femme, ils ont crû que j'étois le maître; & d'ailleurs ils m'ont affûré, qu'on les avoit tant effraïez de vôtre humeur, qu'ils trembloicnt à se présenter devant vous.

DURAMINTE.

Il faudra pourtant qu'ils y viennent, & l'on n'aura pas ma fille fans confentement. PHILANDRE.

C'eft auffi ce que je leur ai dit, & ils doivent tous le rendre icy dans ce jour.

DURAMINTE.

Et lequel de tous ces gens-là voudriezvous accepter pour gendre?

PHILANDRE.

En verité ils m'ont paru tous fi raifonnables, que je voudrois n'en refufer aucun. Monfieur Clinquant le Poëte, & Me. Babiole le Muficien, ont compofé là-bas un là-bas un petit divertiffement fur les divers caracteres de tous ces prétendans, ils viendront tantôt vous le faire entendre.

DURAMINTE.

Je croy que cela fera fort beau ; un divera tiffement de la compofition de Clinquant & de Babiole, dont on a fiflé le dernier Opera? PHLAND.RE.

Il eft vray qu'il n'a pas été du goût de tout le monde; mais je n'en eftime pas moins ces Meffieurs, Sçavez-vous bien qu'il faut beau?

coup

coup d'efprit pour faire un Ouvrage médiocre, & même un mauvais ; & l'on devroit toûjours fçavoir gré aux gens qui travaillent pour nous plaire. Quoique le plus fouvent ils n'y réuffiffent pas.

DURAMINTE.

Fort bien mais il n'eft pas queftion de cela maintenant, & j'ay de jolies nouvelles à vous apprendre. La douceur avec laquelle vous traitez vos domeftiques nous a caufé de belles affaires pendant vôtre abfence.

PHILANDRE..

Que feroit ce? Vous voulez toujours m'effraïer fur un rien.

DURAMINTE.

Eh!oüyouy, fur un rien. Vous n'avez qu'à commencer à chercher mille écus; vôtre butor de Limofin a caffé la glace de vôtre grand PHILANDRE.

miroir.

Helas! Le pauvre Garçon ne l'a pas fait par malice.

DURAMINTE

Vrayment je le crois bien, mais la glace n'en eft pas moins caffée.

PHILANDRE.

Il doit en être bien mortifié. Croyez-moi, n'ajoûtez point au chagrin qu'il en a, celuy d'être accablé de vos reproches.

DURAMINTE.

i

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PHILANDRE.

Et pourquoy, le chaffer s'il vous fert bien 'd'ailleurs, & s'il eft fidele? vous devez estre prefqu'affûrée, que ce Valet ne caffera plus de glaces de miroir, ou du moins qu'il aura plus d'attention à l'éviter qu'un autre que vous prendriez qui n'en auroit point encore caffées.

DURAMINTE..

Le beau raisonnement! Oh bien fi vous faites grace à celui-là, faites donc pendre vôtre fripon de Falaise qu'on a furpris dérobant vôtre vaiffelle d'argent.

PHILAND RE.

Il ne l'a pas emportée.

DURAMINTE.

Non, mais ce n'eft pas fa faute, car il a été pris fut le fait, & j'attendois vôtre retour pour voir ce que vous prétendez faire de ce voleur.

PHILANDRE.

Oh pour celui-là, mon sentiment est.. qu'on luy paye fes gages & qu'on le renvoie. DURAM INT E.

Comment donc lui payer fes gages? Emploïons les plûtôt à le faire pendre.

PHILANDRE.

Ah ma Femme, ne faifons pendre perfonne, plaignons plûtôt ce malheureux, & rendons grace au Ciel d'être nez dans un certain état, & avec de certaines inclinations.

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DURAMINTE.

Que voulez-vous dire par-là ?
PHILANDRE.

Je veux dire que fouvent tel eft fuperbe de fa fageffe & de fa probité, qui peut-êtrè ne vaudroit pas mieux que ceux qu'il condamne '& qu'il détefte, s'il fe trouvoit dans les mêmes circonftances. Puifque la volonté de ce miferable n'a point eu d'effet, demeurons en

repos.

DURAMINTE

Allez, vous mériteriez qu'il vous eût emporté tout vôtre bien. Mais voicy vôtre Cocher dans un joli état, excufez encore fon y vrognerie.

SCENE VII. PHILANDRE, DURAMINTE,

Q

L'ETRILLE.

PHILANDRE.

U'est-ce qu'il y a, mon pauvre l'Etril

lei

L'ETRILLE.

7

T

Oh pal fembleu, Monfieur, il n'y a plus moïen de vivre avec vos chevaux, ils n'entendent ni rime ni raifon.

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I

PHILANDRE.

Il a quelque fois des expreffions auffi plai-`

fantes.

DURAMINTE.

Oui, tout-à-fait récreatives.

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Je les conduifois avec vôtre carroffe où vous m'aviez dit, & me repofois fur ce qu'ils étoient souvent retifs; mais il leur a pris tout d'un coup un caprice & des transports Croiriez-vous bien qu'ils ont eu l'infolence de me renverfer de deffus mon fiége.

DURAMINTE.

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C'est bien plûtôt le vin qui t'a renversé, yvrogne que tu es.

L'ETRILLE.

Le vin me renverfer moy, au contraire c'eft ordinairement ce qui me foûtient.

DURAMINTE.

Et où eft mon carroffe?

L'ETRILLE.

Vôtre Carroffe, Madame ? je crois que vous n'en avez plus, vos chevaux l'ont mis en pieces, & cependant foy de Cocher, ils n'ont bû d'aujourd'huy que de l'eau.

DURAMINTE.

Et que font-ils devenus enfin ?

L'ETRILLE.

On les a arrêtés.

PHILANDRE.

Ah heureusement il n'y a que demy mal;

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