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SCENE XVIII

PHILANDRE, DURAMINTE,

C

CLARINE.

PHILANDRE.

Larine, en refusant cet homme-là, ma femme, ne fçait ce qu'elle refufe. CLARIN E.

Et que refufe-t-elle après tout? Rien.

DURAMINTE.

Quoy, je ne pourrai pas trouver un mary raifonnable pour ma fille! C'en eft fait, je ne veux plus écouter perfonne.

CLARIN E.

Ah de grace, Madame,écoutez encore celui-ci.

SCENE XIX

PHILANDRE, DURAMINTE, LISIMON, CLARINE.

CLARINE, bas à Lifimon

SOngez à bien jouer vôtre Rôle.

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LISIMON, bas à Clarine. Ne t'en mets point en peine.

A Philandre.

Monfieur, c'eft vôtre réputation qui vous attire aujourd'huy ma vifite; il y a long-tems que je cherche un veritablement honnête homme, un homme fans défauts, & l'on m'a affûré que je le trouverois en vous. J'avois autant d'ardeur de rencontrer une femme fincere, & Madame vôtre Epouse a, dit-on, cette qualité fur toute autre.

DUR AMINTE.

Eh bien, Monfieur, fuppofé que vous trouvaffiez tout cela ici, de quel avantage ce la pourroit-il eftre pour vous ?

LISIMON.

De quel avantage, Madame? J'ay du bien, & je ferois tout mon bonheur de le partager avec une aimable perfonne qui devroit fa naissance & son éducation à des parens d'un mérite auffi rare.

DURAMINTE.

C'est-à-dire, que vous venez nous demander nôtre fille en mariage.

LISIMON.

Oüy, Madame, c'eft ce qui m'amene; & l'efpoir de l'obtenir eft la feule chofe qui m'a détourné du deffein que j'avois de me retirer pour jamais dans le defert le plus affreux pour me Téparer du refte des hommes.

PHILANDRE.

Et pourquoi, Monfieur ?

LISIMON.

C'eft que je les haï's tous; jamais je ne les at trouvé fi méchans & fi perfides qu'ils le font aujourd'huy; la Nature femble être à fon dernier degré de corruption.

PHILANDRE.

Vous avez là pour un jeune homme des fentimens bien cruels.

LISIMON.

Oh je ne puis affez vous les exprimer ; mais fi je haïs les méchans, je haïs encore plus ceux qui les excufent dans leurs vices;ces gens qui trouvent tout bon, & qui n'ont pas la force de hair perfonne.

CLARIN E.

Madame, voicy juftement ce qu'il vous falloit pour faire enrager vôtre mary. PHILANDRE.

Et pourquoi, Monfieur, voulez vous haïr quelqu'un? La peine eft toute du coté de ce lui qui hait. Et pourquoi voulez-vous vous faire de la peine parce que vous ne croirez pas les autres raisonnables? Mon caractere eft bien different du vôtre; je ne cherche tous les jours qu'à me faire des amis, &.

LISIMON.

Qu'entens-je ! Des amis; & y en a-t-il dans le monde ? chacun s'aime & n'aime que foy. Tout le réduit là: l'amitié n'eft qu'une chimere, ou plûtôt une espece de tréve, que les hommes font entr'eux, à la haine qu'ils

ont

ont naturellement les uns pour les autres. PHILANDRE.

Ah, Monfieur, puifque vous penfez de la forte, allez plûtôt vous renfermer dans vôtre defert, vous ne méritez pas de vivre avec les hommes & moins avec moy qu'avec tout autre, & ma fille n'eft pas pour vous.

LISIMO N.

Ah, j'y renonce de bon cœur, il fuffit qu'elle vous appartienne. Je reconnois qu'on m'a trompé dans l'idée qu'on m'a donné de vous, & je vais fuivre mon premier dessein. DURAMINTE..

Arrêtez, Monfieur; mon mary vous refufe, & moi je vous accepte, vous cherchiez un homme fans défauts& une femme fincere; vous ne trouvez que la moitié de ce que vous cherchiez, il faut vous contenter. LISIMON.

Ah, Madame, comment pourrois-je vivre avec un esprit de fa forte ?

DURAMINTE.

J'y vis bien moy, Monfieur, allez, allez, quand nous ferons deux à le combattre, nous le mettrons bien à la raison.

LISIMON.

Je voy tant de rapport de vôtre humeur à la mienne, Madame, que je crois ne pouvoir mieux faire que de facrifier le repos de mes jours à ce qui vous fera plaifir, & me voilà réfolu d'époufer Mademoiselle vôtre fille

D

זי

DURAMINTE.

Ah je fuis au comble de mes vœux ! Venez hje Monfieur, je vais vous préfenter à elle, & mon Mari dût-il en enrager, vous l'épouferez dès ce foir. Allons que l'on prépare tout pour le divertiffement.

CLARINE.

J'ai déja entendu des violons là-dedans qui commencent à s'accorder.

SCENE DERNIER E.

PHILANDRE,CLARINE.

A

CLARIN E.

La fin, Monfieur, vous voilà donc forti de vôtre caractere.

PHILANDRE.

fait

Moy? point du tout ; & ce que j'en ay n'étoit que pour donner un Epoux à ma fille. Je ne blâme point la maniere de penser de ce jeune homme quoiqu'elle foit fort differente de la mienne.

CLARIN E.

Eh bien, s'il eft ainfi, apprenez qu'il pense tout autrement qu'il ne vous a parle, & que tout cecy n'étoit qu'un ftratagême amoureux concerté entre vôtre Fille, luy & moy, pour faire donner vôtre femme dans le panneau.

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