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vefte d'étoffe une perruque qui n'avoit rien de ridicule, & fon chapeau fur la tête. Loin d'outrer ce rôle, il en diminuoit la charge, que Moliere lui a donnée, autant qu'il lui étoit poflible. Dufrefne jouant le rôle d'Horace, dans l'Ecole des Femmes, & Baron celui d'Arnolphe, attirèrent tout Paris à cette représentation.

Baron n'entroit jamais fur la Scène, qu'après s'être mis dans l'efprit & dans le mouvement de fon rôle. Il y avoit telle Piece où , au fond du Théâtre, & derriere les couliffes, il fe battoit, pour aini dire, les flancs, pour fe paffionner. Iĺ apoftrophoit, avec aigreur & injurieufement, tout ce qui fe trouvoit fous fa main, de Valets & même de camarades de l'un & de l'autre fexe, jufqu'à ne point ménager les termes ; & il appelloit cela refpecter le Parterre. Il ne fe montroit en effet à lui, qu'avec je ne fçais quelle altération de fes traits, & avec ces expreffions muettes, qui étoient comme l'ébauche du caractère de fes différens Perfonnages.

On reprochoit à Baron, que, déclamant fur le Théâtre, il tournoit quelquefois le dos au Parterre; mais cela ne lui arrivoit que lorfqu'il entendoit parler haut derriere lui: alors il fe tournoit vers les perfonnes, leur déclamoit les vers qu'il avoit à dire, & par-là leur impofoit filence. Lorfqu'il vouloit faire honneur à des gens de dinftinction ou de mérite, il choififfoit un des plus beaux endroits de la Piece, & le déclamoit en les regardant.

Dans le Diable Boiteux, Roman de le Sage, il y a un trait contre ce fameux Comédien, qui eftimoit fa profeffion plus qu'elle ne vaut. Le Sage fait dire au démon: « J'apperçois un Hiftrion qui » goûte, dans un profond fommeil, la douceur d'un fonge qui le flatte agréablement. Cet Acteur est fi vieux, qu'il n'y a tête d'homme à Madrid, qui >> puiffe

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BAR

BAR puiffe dire l'avoir vu débuter. Il y a fi long tems qu'il paroit fur le Théâtre, qu'il eft, pour ainfi » dire, théâtrifié. Il a du talent; & il en eft fi fier » & fi vain, qu'il s'imagine qu'un Perfonnage tel » que lui eft au-deffus d'un homme. Sçavez-vous » ce que fait ce fuperbe Héros de coulife? Il rêve » qu'il fe meurt, & qu'il voit toutes les divinités » de l'Olympe affemblées pour décider de ce qu'elles » doivent faire d'un mortel de fon importance. Il » entend Mercure qui expofe au Confeil des Dieux, » que ce fameux Comédien, après avoir eu l'hon»neur de repréfenter fi fouvent, fur la Scène,Jupiter » & les autres principaux immortels, ne doit pas » être affujetti au fort commun à tous les humains, » & qu'il mérite d'être reçu dans la Troupe céleste. » Momus applaudit au fentiment de Mercure; mais » quelques autres Dieux & quelques Déeffes fe ré»voltent contre la propofition d'une apothéofe fi nouvelle ; & Jupiter, pour les mettre tous d'ac>> cord, change le vieux Comédien en une figure » de décoration ».

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Le Portrait de Baron a été gravé ; & voici quatre vers que le grand Rouffeau fit pour être mis au bas :

Da vrai,
De fon art enchanteur l'illufion divine

du pathétique il a fixé le ton.

Prêtoit un nouveau luftre aux beautés de Racine,
Un voile aux défauts de Pradon.

BARRAN, (Henri de ) a donné l'Homme juftifié par la Foi, Tragi-Comédie.

BARTHE, M.) né à Marfeille, de l'Académie des Belles-Lettres de la même ville, connu par plufieurs ouvrages de Poëfie fort eftimés, & par trois Comédies, qui font l'Amateur, les Faules Infidélités, & la Mere jaloufe, où l'on trouve de l'efprit, de la gaieté, des Scènes d'un bon Comique, avec beaucoup de facilité & de précision dans le Dialogue.

Tome 111.

C

BAU

BAS BASSECOUR, ( Claude) natif de Ham en Hainault, a fait une Tragi-Comédie Pastorale, intitulée Milas.

BASTIDE, (Jean-François de ) né à Marseille en 1724, petit neveu de l'Abbé Pellegrin, connu par beaucoup de Romans a fait pour le Théâtre le Défenchantement inefpéré, le Jeune homme, les Deux talens, l'Epreuve de la probité, les Caractères de la Mufique, les Etrennes, Géfoncour & Clémentine.

BATISTIN, Jean-Baptifte Stux) Muficien, Allemand d'origine, né à Florence, a fait les Opéra de Méléagre, de Manto la Fée & de Polydore.

BAUGE, (Daniel-Paul Chapufeau de) né à Lyon, étoit fils d'un Miniftre de la Religion prétendue réformée, & avoit même été Proteftant. En abjurant les erreurs de Calvin, il prit le petit collet, dans l'efpérance d'obtenir quelque bénéfice; mais cette route lui paroiffant longue & incertaine, il abandonna l'habit Eccléfiaftique & les Muses, fe maria; & par le crédit de la famille de fa femme, il fut admis dans plufieurs fous-Fermes, qui lui produifirent une fortune affez confidérable, pour lui faciliter l'acquifition d'une Charge de Secrétaire du Roi. Il eft Auteur de l'Opéra de Coronis, & mourut vers l'an 1739.

BAURANS, né à Toulouse, mort en 1764, âgé d'environ 54 ans, a compofé fur des airs Italiens, la Servante Maitreffe & le Maître de Mufique.

BAUSSAIS, (le Chevalier de ) a donné la Cydipe.

BAUVIN, M. Jean-Grégoire) Avocat, ancien Profeffeur à l'Ecole Royale Militaire de la Société Littéraire d'Arras, fa Patrie né en 1714, a travaillé à l'Obfervateur avec M. Marmontel

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BEA

BEA Mercure, &c. Il n'a fait, pour le Théâtre, que la Tragédie des Chérufques.

BEAUBOURG, (M. Pierre Tronchon de ) avoit époufé la fille de la Demoifelle Beauval, grande Comédienne. Il fuccéda à Baron, quand celui-ci fe retira en 1691, & fut goûté du Public, quoique fujet à confondre les plus beaux endroits d'une Piece avec les moindres qu'il déclamoit avec un égal enthousiasme: ce qu'il corrigeoit cependant par beaucoup d'ame. Il quitta le Théâtre en 1718, & mourut à Paris, âgé de foixante-trois ans, dans de grands fentimens de piété. Sa femme, qui s'étoit retirée dans le même tems que lui, jouoit les Confidentes Tragiques.

BEAUBREUIL (Jean de ) étoit Avocat au Présidial de Limoges, & a fait des Poéfies Latines & Françoifes. Nous avons auffi de lui une Tragédie de Régulus.

BEAUCHAMP, Pierre-François-Godard de né à Paris, mourut dans cette ville, en 1761, âgé de 72 ans. On a de lui les Amours d'Ifméne & Ifménias, traduction libre du Roman grec d'Euftatius, excellent Grammairien & Auteur des fameux Commentaires grecs fur Homere. Dans fes Recherches fur les Théâtres de France, Beauchamp ne s'eft pas borné à compiler les titres des Pieces; il y a joint des particularités fur la vie de quelques Comédiens François ; mais il a oublié plufieurs Anecdotes intéreffantes, dont il auroit pa orner fon ouvrage. On auroit fouhaité qu'il eût développé le goût de nos ancêtres pour les Spectacles, l'art & les progrès des Théâtres Tragique & Comique depuis Jodelle; le génie de nos Poètes & leurs manieres d'imiter les anciens. Ses Pieces de Théâtre font le Parvenu, la Soubrette, Arlequin amoureux par enchantement, le Jaloux, le Portrait, les Effets du dépit,

BEA

BEA les Amans réunis, le Braffelet, la Mere rivale Fauffe inconftance, le Ballet des Tuileries.

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BEAUCHATEAU, ancien Comédien de l'Hotel de Bourgogne, entendant un jour la Meffe à NotreDame, vit une femme toute en pleurs auprès d'un pilier de l'Eglife. Il lui demanda le fujet de fon chagrin; elle fit d'abord quelques difficultés de lui répondre; mais fur les inftances du,Comédien, elle lui apprit qu'elle étoit venue à Paris pour le jugement d'un procès qui avoit duré beaucoup plus de tems qu'elle ne l'avoit prévu, & que ne pouvant avoir des nouvelles de fon pays, il ne lui reftoit aucune reflource; qu'elle n'ofoit retourner dans la chambre qu elle avoit louée, parce qu'il lui étoit impoffible de payer le terme qu'elle devoit. Beauchâteau, touché de ce récit, la retira dans fa maifon, lui donna un lit & fa table. Un pareil traitement engagea cette femme à fe faire connoître de plus en plus à fon bienfaiteur. Elle dit, entr'autres chofes, qu'elle avoit eu une fœur qui étoit morte dans un Couvent, où elle avoit expié, par une pénitence auftére, le malheur de s'être rendue à la paffion d'un Préfident; qu'elle en avoit eu une fille; mais qu'on ne fçavoit ce que cet enfant étoit devenu. La femme de Beauchâteau, qui étoit préfente, fe fentit touté émue à ce difcours; fes yeux fe remplirent de larmes; & cédant aux mouvemens de fa tendreffe, elle fe jetta aux pieds de cette perfonne, & l'appella cent fois fa chere tante. En effet, la Demoifelle Beauchâteau étoit cette fille, le fruit de la féduction du Préfident & de la foi bleffe de celle dont on venoit de parler.

Beauchâteau, Acteur de la Troupe de l'Hotel de Bourgogne, eut un fils qui, dès l'âge de huit ans fe rendit célebre par différentes petites Pieces de vers qu'il compofa pour plufieurs perfonnes de la Cour & pour d'autres, qu'on raffembla en un volume in-4o, sous le titre suivant; La Muse naisfant

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