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OLIMPIAS.

Pour mieux calmer vos maux, fur Téglis, & fur vous,
Je veux faire éclater mes bienfaits les plus doux.
SOSTHENE.

Que pouvez-vous encor? votre main bienfaifante
A, depuis fi long-tems, furpassé mon attente,
Qu'il ne me refte rien, Madame, à defirer.

QLIMPIA S.

Non, non, j'ai trop peu fait : je veux le réparer.
Je dois récompenfer la valeur & le zéle
D'un fujet vertueux, à fon devoir fidéle.

La plus haute vertu, pour l'homme, eft un devoir,
Les Dieux daignent pourtant épuifer leur pouvoir,
A rendre heureux, un jour, le mortel qui s'y livre:
Cet exemple des Dieux, les Rois doivent le fuivre.
Heureuse, de pouvoir payer avec éclat,

Vos foins & vos travaux pour le bien de l'Etat!

Ah! Madame....

SOSTHENE.

OLIMPIAS.

Pyrrhus fuccede à la couronne,

Et doit, en cet inftant, époufer Antigone:
Un fils me reste encor ; je le donne à Téglis;
De ce que je vous dois, voilà le digne prix:
Je ne puis trop permettre à ma reconnoiffance;
Et je ne puis, trop haut, mettre la récompenfe.

SOSTHENE.

Je vois, avec transport, cet excès de bonté;
Et, d'un honneur fi grand, mon cœur eft trop flatté :
Plus il eft éclatant, plus je me fens confondre;
Madame, à vos bienfaits, comment puis-je répondre ?
OLIMPIAS.

En impofant filence à de funeftes feux :

Jufqu'au cœur de Pyrrhus, Téglis porte fes vœux.

SOSTHENE.

Téglis! que

dites-vous?

OLIMPIA S.

Que prétend fon audace?

Veut elle que Pyrrhus, fur le trône, la place!
Veut-elle qu'il renonce à l'honneur d'être Roy?
Car enfin vous fçavez ce qu'exige ma foy;
Puis-je....

SOSTHENE.

Ne craignez rien d'un amour téméraire ;

Je fuis fujet, Madame, avant que d'être pere:
De Pyrrhus, de l'Etat, la gloire & le bonheur,
Même contre mon fang, l'emportent dans mon cœur.
Son ame, pour ce Prince, eft en vain enflâmée,
Ma fille recevra la main de Ptolomée.

OLIMPIA S.

A s'élever trop haut l'on rifque d'échouer:
Mais, d'un fi grand bienfait, elle doit fe louer.

Et vous-même, voyez fi jamais les Monarques,
Plus loin, de leur eftime, ont fçû porter les marques;
Et fi quelque fujet, par degrés élevé,

A ce comble de gloire, eft jamais arrivé ?
De mon affection, cette preuve nouvelle,
Softhêne, doit du moins redoubler votre zéle.

M

SCENE III.

SOSTHENE feul.

A fille aime Pyrrhus! à ce fuperbe amour,

Je reconnois le fang qui lui donna le jour !
Le plus flateur espoir.... mais en est-elle aimée?
Puis-je en douter? la Reine en eft trop allarmée.
Je lis dans tes deffeins, perfide Olimpias,
Et tous tes vains détours ne m'abuseront pas :
J'ouvre les yeux enfin : ce fut par ta furie,
Que, fi cruellement, Téglis me fut ravie;
Et tu crois aujourd'hui, par ta feinte bonté,
Appaifer la fureur de mon cœur irrité;

Et, pour un foible honneur, que Softhêne abandonne
Le défir de placer fa fille fur le trône?

Non, non, j'ai trop fouffert : tu m'as trop outragé;

D'un affront fi fanglant je dois être vengé.

De tes lâches foupçons, Téglis fut la victime;
L'amour nous vengera, fi l'amour fut fon crime.
Diffimulons pourtant, & cachons-nous fi bien,
Que, de nos foins fecrets, l'on.ne foupçonne rien?
Trompons même Téglis; pénétrons dans fon ames
Que l'hymen projetté defefpére fa flâme:
Mettre obftacle à l'amour, c'eft lui prêter des feux;
C'est plus étroitement en refferer les nœuds.

SCENE I V.

SOSTHENE, TEGLÍS.

SOSTHENE.

Pprochez-vous, Téglis,que me fait-on entendre?
A l'amour de Pyrrhus, vous oferiez prétendre ?
Et, fans l'aveu d'un pere, engageant votre foi,
Vous pourriez afpirer au cœur de votre Roi?
TEGLIS.

Je ne le puis nier pouvois-je m'en deffendre?
Si, vers moi, de Pyrrhus, les vœux daignent defcendre,
Mon cœur peut-il, Seigneur, ne les pas approuver;
Les miens doivent-ils pas jufqu'à lui s'élever?

SOSTHENE.

Non, le fang d'un fujet, quelque beau qu'il puiffe être, Est trop vil pour s'unir à celui de fon maître.

La Reine cependant, par fon affection,
Permet encor affez à votre ambition:

Toujours, de mes travaux, de mes foins, plus charmée,
Elle vous veut, ma fille, unir à Ptolomée.
Etouffez donc enfin un téméraire amour;

Je l'ordonne; & fonge qu'il vous faut, en ce jour,
Relever votre fort par cet hymen augufte.

SCENE V.

TEGLIS feul.

H! que m'ordonnes-tu, barbare!....

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pere injufte,

De quel plus rude coup, pouvois-tu m'accabler, De l'exil, des dangers, je n'avois pû trembler; Mais, Dieux ! en ce moment, mon ame intimidée, De ce fatal hymen, ne peut fouffrir l'idée ! Grands Dieux ! quand, dans les flots, j'allois trouver

la mort,

Pourquoi vous oppofer à la rigueur du fort?
Il m'eût été plus doux de perdre alors la vie,
Que d'être en proïe aux maux dont je fuis poursuivie.
Je le voi trop, Pyrrhus, je ne puis être à toi:
Tout, jufqu'à mon amour, m'en impose la loi :
Hélas ! j'aimerois peu, je ferois trop cruelle,
Si je te laiffois perdre un trône où l'on t'appelle.

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